Une très belle composition en équilibre entre drame et comédie
Ce film est un bonheur, grâce tout d’abord à une écriture parfaite qui alterne efficacement entre des ellipses, des scènes tenues à l'essentiel, et d'autres au contraire qui prennent leur temps : autant dans les situations, qui vont là où on ne les attendait pas, que dans les dialogues, justes et piquants, jamais encombrés de mots d’auteur. Grâce, ensuite à une interprétation superbe de tout le casting, dominé par l'excellent Benjamin Lavernhe et Pierre Lottin que l'on voit de plus en plus ces derniers temps, à juste titre tant sa performance est d'une remarquable justesse, le regard brisé de son personnage, sa résignation mais aussi son univers intérieur sont très puissants. À leur côté, des non professionnels sont mêlés à des acteurs à la réputation avérée, et tous sont plus vrais que vrais. Le souffle qui emporte En fanfare est aussi original qu’il est ancré dans un humanisme authentique, un respect des hommes et des femmes ici racontés. Une fanfare du Nord, ça pourrait générer du folklore, mais le regard d'Emmanuel Courcol fait toute la différence. C’est gai, c’est triste. On rit, on pleure et on reconnaît la fraternité pour ce qu’elle est. Le sel de la vie. Emmanuel Courcol réitère quatre ans après le touchant Un Triomphe, avec Kad Merad en professeur de théâtre dans une prison, dans la comédie dramatique à fond social. Car ici il est bien entendu question de traiter de l’inégalité des chances et de l’espoir d’une connexion entre gens de mondes différents. Le tout dans un contexte du Nord de la France avec comme perspective les délocalisations. Devenu cinéaste sur le tard, Emmanuel Courcol a débuté comme comédien puis scénariste. Il avait déjà 59 ans lors de la sortie de son premier long métrage, Cessez le feu avec Romain Duris en 2017. Sa solide expérience de scénariste, forgée auprès de Philippe Lioret avec lequel il a collaboré sur quatre films dont Welcome, ou auprès d’Édouard Bergeon sur Au nom de la terre, l’a transformé en réalisateur soucieux d’une écriture précise et des problématiques sociales. Ses œuvres projettent souvent un individu dans un univers inconnu. Un procédé narratif efficace permettant au spectateur de découvrir ce nouveau monde en même temps que le protagoniste et de battre en brèche nombre de présupposés et de clichés. Véritable auteur populaire, il assume pleinement de viser un large public sans jamais céder à la facilité. Ce très beau film pourrait bien être le succès de cette fin d'année, il a tous les atouts pour y parvenir.