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reportages en region

La gourmandise made in Normandie

Publié le par Michel Monsay

Depuis le 1er janvier 2018, Gourmandie est devenue Saveurs de Normandie avec de nouvelles ambitions de croissance. Les 100 entreprises adhérentes génèrent 17 000 emplois agricoles et agroalimentaires qui fabriquent 400 produits arborant le logo de la marque.

 

Créée en 2003 par l’Institut régional de la qualité agroalimentaire de Normandie afin de valoriser les produits de la région, la marque Gourmandie, évolue avec la nouvelle politique d’attractivité territoriale résultant du regroupement des deux Normandie, en changeant de nom pour s’appeler Saveurs de Normandie, comme l’explique Isabelle David, la directrice : « Cela va nous permettre d’être plus lisible et plus clair pour nous développer à l’international, et jouer la synergie avec la communication de la région autour du mot Normandie dans une dimension évidente d’intérêt partagé. »

Isabelle David

Une marque ambitieuse

Aujourd’hui, une centaine d’entreprises alimentaires sont adhérentes de la marque, principalement des PME, et mettent en commun des moyens pour valoriser collectivement la qualité de leurs produits. Les cotisations annuelles varient de 400 à 5000 euros selon la taille de l’entreprise et le nombre de produits. Cela se traduit autant par de la communication que par du développement commercial pour être davantage présent dans les circuits de distribution, la restauration hors domicile ou les épiceries fines. Différentes actions sont d’ores et déjà prévues à destination de l’export sur des salons et auprès d’enseignes de distribution avec lesquelles la marque a des partenariats. Officiellement lancée sur le salon de l’agriculture, Saveurs de Normandie va bénéficier d’un large programme de communication pour faire connaître la nouvelle dénomination et identité visuelle au grand public.

Animation gare Saint-Lazare

Une marque exigeante

Pour bénéficier du logo Saveurs de Normandie, le produit doit respecter trois critères, rappelle Isabelle David : « Il doit être élaboré en Normandie et privilégier la matière première régionale, ce qui n’est pas toujours le cas pour d’autres marques. Cela favorise le lien entre l’agriculture et l’agroalimentaire, nous aidons ainsi nos entreprises à structurer des filières régionales avec les agriculteurs, parfois même nous montons une filière lorsque la matière première est rare localement, comme pour l’orge ou le sarrasin. A ce propos, nous lançons au salon de l’agriculture une bière entièrement élaborée en Normandie. Deuxième critère, l’entreprise doit respecter des bonnes pratiques de fabrication en termes d’hygiène et de traçabilité, enfin le goût doit être approuvé par un panel de consommateurs. L’ensemble de la démarche est contrôlé par un organisme indépendant. » Sur les 400 produits référencés par la marque, une partie d’entre eux perpétue une tradition d’innovation dans la région, qui a donné naissance par le passé au fameux Petit-suisse, au lait UHT ou à la salade 4ème gamme.

 

Des entreprises impliquées

La Chaiseronne, qui emploie 35 salariés, est basée à Brecey dans La Manche. Elle propose une gamme de produits comprenant des viandes à destination de la restauration et des collectivités, mais aussi des plats cuisinés et terrines pasteurisées que l’entreprise vend à la grande distribution. Guillaume Vimond, cogérant de la Chaiseronne, précise : « L’éleveur a cette fierté de savoir que la race de bœuf normand et la façon d’élever l’animal sont valorisées par la Chaiseronne auprès de nos clients. L’entreprise a été créée en 1980 dans un bassin d’élevage, où elle est devenue le transformateur local. Nous travaillons avec une cinquantaine d’exploitants bovins et trois éleveurs de porcs qui se trouvent dans un rayon de 20 km, ce qui nous permet de suivre l’élevage de près, notamment pour l’alimentation des animaux. » Saveurs de Normandie a ouvert les portes de la GMS à La Chaiseronne, lui a permis de gagner des magasins, d’être présent sur des salons, de faire partie d’un réseau permettant un précieux partage d’informations et de logistique, enfin le logo lui a apporté une importante visibilité.

L’entreprise familiale de salaisons artisanales Roches blanches existe depuis quatre générations, comme l’explique Stéphane Malandin, son dirigeant : « Mon arrière grand-père fabriquait du saucisson sec à Fécamp à la fin du XIXe siècle pour la marine de pêche qui partait à Terre-Neuve durant quatre mois, et à l’époque il n’y avait pas d’autre moyen de conservation de la viande que le salage et le séchage. » Défenseur des valeurs régionales, la famille Malandin a naturellement adhéré à Gourmandie dès sa création en 2003, trouvant là une structure qui réunisse tous les savoirs-faires normands et qui l’aide à s’approvisionner localement, comme l’indique Stéphane Malandin : « Cela nous a fait gagner un temps considérable pour monter la filière, de l’éleveur à l’abatteur, puis au découpeur jusqu’à nous, transformateur. »

Aujourd’hui avec Saveurs de Normandie, les entreprises adhérentes de la marque et par ricochet les agriculteurs travaillant pour elles vont bénéficier d’une nouvelle impulsion de la région entière nouvellement constituée, avec la volonté de rayonner davantage sur l’ensemble du territoire national et à l’export.

Stéphane Malandin

 

Publié dans Reportages en région

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Un caractère authentique

Publié le par Michel Monsay

Un caractère authentique
Un caractère authentique

Triplement récompensée au salon de l’agriculture de Paris, la Choue, est une bière artisanale fabriquée à la brasserie de Vauclair avec notamment une eau très pure, sa propre levure non chimique et une double fermentation haute. Cette brasserie de Haute-Marne participe à la renaissance de la corporation en France, avec aujourd’hui près de 1200 brasseurs en activité.

 

Au fond de la vallée de l’Aujon en Haute-Marne, un ingénieur agronome en héritant de la ferme familiale décide d’entreprendre des travaux pour créer une brasserie en 2001 en s’appuyant sur l’eau de source locale d’une grande pureté. Cette eau était captée dès 1550 par les frères de Vauclair qui dépendaient de l’ordre du Val des Choues. De fait, la bière issue de cette brasserie a naturellement pris ce nom de Choue, qui signifie chouette en vieux patois marnais. Les premières années, la brasserie produisait 20 000 litres par an. Peu à peu la gamme a été élargie à sept produits : blonde, blanche, rousse, brune, triple, Noël, et une plus légère, déclinés sous différents conditionnements, de la bouteille de 33 cl au fût de 20 litres. Aujourd’hui 220 000 litres sont fabriqués chaque année, comme l’explique Anthony Nury, qui après avoir été salarié et associé a repris la brasserie depuis 2013 : « Nous produisons en majorité des bouteilles de 75 cl et des fûts de 20 l, mais nous avons une grosse marge de progression avec plusieurs marchés à développer : La 33 cl, la bière bio et le fût que l’on pourrait accroître pour en vendre en dehors du département. Pour l’instant, nos clients sont principalement en Haute-Marne. »

 

Des ingrédients de choix

S’agissant de bière artisanale, le procédé de fabrication, dans toutes ses étapes, dure près d’un mois. Pour le malt d’orge, qui est la matière première essentielle en dehors de l’e        au, la brasserie se fournit auprès de la malterie Soufflet, capable de lui livrer 25 sortes de malt différent du plus clair au plus foncé avec des goûts plus ou moins torréfiés selon le traitement subi par l’orge durant le maltage. Autre ingrédient indispensable, le houblon, cette plante grimpante cultivée en Alsace pour la brasserie de Vauclair, dont il n’est utilisé qu’un gramme par litre, apporte amertume et arômes à la bière tout en aidant à sa conservation. Enfin la levure, qui n’est pas chimique comme chez la plupart des 1200 brasseurs en France, est cultivée sur place par Anthony Nury et sa petite équipe de 9 personnes, chose assez rare qui donne à la bière un caractère unique. Cette levure utilisée pour une fermentation haute à 25° de type belge, à l’inverse des bières allemandes plus légères, donne un produit vivant qui n’est ni filtré ni pasteurisé.

 

Elaboration d’une bière

Une journée de fabrication à la brasserie de Vauclair démarre avec le concasseur qui broie le malt d’orge avant d’être mélangé à 600 litres d’eau à 50 °dans la cuve de brassage. Puis, deux paliers de hausse de température vont permettre de transformer l’amidon en sucre, un premier à 68° pendant une heure et un second à 78 ° durant un quart d’heure. Vient ensuite la filtration en plusieurs étapes pour séparer par gravité les résidus solides de la partie liquide appelée moût, et récupérer tous les sucres restants dans ces résidus de céréales. Il en ressort 900 l de moût qui est porté à ébullition à 97 ° auquel est incorporé le houblon sous forme de granulés, puis la température est portée à 100° durant une heure et quart. Cinq minutes avant la fin, un deuxième houblon davantage aromatique est ajouté, de même que selon les bières, de la coriandre, du gingembre, de la cannelle ou de l’écorce d’orange amère. Afin d’obtenir un moût limpide, une nouvelle filtration est opérée pour éliminer toutes les particules. Ensuite, avec un échangeur thermique à plaques, la température du moût va être descendue à 21° pour le transférer dans les cuves de fermentation et y adjoindre la levure. Celle-ci va transformer 80% des sucres en alcool durant quatre jours de fermentation, puis la levure va être tuée en faisant tomber la température à 0°. La bière va ainsi rester 16 jours au froid avec tous les deux jours une extraction de la levure par le bas de la cuve conique. Une deuxième fermentation est opérée avec l’ajout de sucre voire de miel et d’une autre levure, le tout étant chauffé à 20°, mis en bouteille et conservé une semaine dans une pièce à 25° pour que la levure puisse travailler. Au bout de ce temps, le produit devient gazeux et pétillant, la fabrication de la bière est alors terminée.

Un caractère authentique
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La ruralité fait son cinéma

Publié le par Michel Monsay

La ruralité fait son cinéma
La ruralité fait son cinéma
La ruralité fait son cinéma
La ruralité fait son cinéma
La ruralité fait son cinéma
La ruralité fait son cinéma
La ruralité fait son cinéma
La ruralité fait son cinéma
La ruralité fait son cinéma

Pour sa 19ème édition, le festival international du film documentaire sur la ruralité de Ville-sur-Yron continue de mettre en lumière les mutations du monde rural et agricole en France et ailleurs, à travers 15 films en compétition qui témoignent autant des dysfonctionnements, des désarrois que des solutions pour redynamiser les territoires ruraux.

 

Chaque année au mois de mai, ce charmant village situé au cœur du Parc naturel régional de Lorraine accueille le festival « Caméras des champs », organisé par une équipe de bénévoles, avec un budget de 40 000 euros, et avec à sa tête un directeur passionné, Luc Delmas, professeur agrégé d’histoire à la retraite qui nous explique les critères de sélection des documentaires en compétition : « Nous avons reçu cette année 130 films et en avons retenu 15, à la fois pour leur contenu mais aussi la qualité des images et du son. Il faut que le propos soit bien tenu, pas redondant, qu’il y ait un fil conducteur, une colonne vertébrale, un point de vue de l’auteur qui ne se perde pas dans des ramifications en étant victime de la quantité d’informations reçues. » Ce festival, c’est également des débats à la suite des projections où agriculteurs, ruraux, universitaires, réalisateurs et autres échangent en toute liberté et vont ensuite partager des repas conviviaux autour de produits locaux. Au-delà de la générosité et de la dimension très humaine qui se dégage de cette manifestation et fait un bien fou par les temps qui courent, il y a l’opportunité de voir un panel assez complet des initiatives prises dans la ruralité mais aussi de découvrir certaines aberrations dont les médias bizarrement ne se font pas l’écho.

 

L’épandage des boues d’épuration

La compétition s’ouvre justement sur un documentaire intitulé « Nos boues taboues » où l’on apprend que la région parisienne produit 150 000 t de boues d’épuration par an. Les terres d’Ile de France étant déjà saturées de produits toxiques, il faut trouver d’autres terres agricoles dans les régions voisines pour recycler les boues. Un plan d’épandage dans le Cher provoque la création d’un mouvement citoyen qui pose clairement la question : Pourquoi les campagnes devraient-elles digérer les boues des villes ? Comme il est dit dans le film : « Si les boues ont besoin de l’agriculture, je ne suis pas sûr que l’agriculture ait besoin des boues. » D’autant que malgré le traitement de ces boues, il subsiste des traces de plomb, cadmium, zinc, cuivre, potentiellement toxiques et ne présentant aucun intérêt agronomique. Les enjeux de santé publique ne feraient-ils pas le poids ? Le mouvement citoyen du Cher a finalement obtenu au tribunal de Nantes une diminution des quantités d’épandage. L’avenir passe sûrement, comme il est montré dans le film, par la multiplication d’initiatives comme celle de Phytorestore. Cette entreprise dépollue les boues de stations d’épuration, grâce notamment à des roseaux et des jardins filtrants, pour en faire un compost et un terreau bio.

 

Encourager les circuits courts

Avec « Vivre au pays à tout prix », le réalisateur rend hommage à son département de naissance, les Ardennes, qu’il aime profondément et où il est revenu s’installer avec femme et enfants. Dans ce film, il nous plonge dans le quotidien de producteurs locaux qui ont fait le pari de la vente directe, notamment dans une boutique paysanne où ils se sont regroupés à 28, sur des marchés ou des épiceries avoisinantes. Ces hommes et ces femmes qui ne comptent pas leur temps de travail sont le plus souvent producteurs, transformateurs et vendeurs. Ils symbolisent les circuits courts, alternative à la grande distribution, que les consommateurs plébiscitent de plus en plus et qui contribuent au développement et à l’attractivité des territoires ruraux. Si la démarche est vertueuse à tous points de vue et qu’elle permet une reconnaissance directe du travail, on voit que l’entourage familial, même s’il peut s’avérer difficile à gérer avec les petits, est déterminant dans la réussite du pari de ces producteurs.

Après le film du soir, présenté hors-compétition, une table ronde autour des circuits courts nous apprend que 44% des français ont changé leurs habitudes alimentaires suite aux crises sanitaires. Une agricultrice de Moselle, membre d’un GAEC de 800 ha en polyculture élevage, témoigne de l’engouement autour du magasin de vente directe, l’Ayotte, qu’elle a créé il y a 3 ans avec 47 producteurs proposant 1200 références. Ils se relaient sur le lieu de vente, leur dégageant ainsi du temps pour leur exploitation tout en générant un chiffre d’affaires conséquent. Pour aller plus loin, la chambre d’agriculture de Moselle réfléchit à la création d’une plateforme de producteurs pour fournir une alimentation de proximité à des cantines, hospices et autres collectivités.

 

La difficulté d’être agriculteur

Dans « Vaches à lait », la situation est beaucoup plus compliquée pour la famille d’un petit céréalier de la Sarthe qui a fait quelques années plus tôt une tentative de suicide, et ne parvient toujours pas à s’en sortir avec un prêt à rembourser de 160 000 €. Emouvant témoignage des enfants, admiratifs devant le courage de leurs parents qui travaillent plus et produisent plus mais se heurtent au prix des céréales qui ne leur permet pas de gagner correctement leur vie. A un degré moindre, même problème pour cette famille et leurs 75 vaches dans le Cantal, avec un prix du lait qui n’est pas assez rémunérateur. Comme le dit cet agriculteur qui a repris l’exploitation familiale : « Avant on travaillait et on y arrivait, aujourd’hui on travaille mais on n’y arrive pas forcément, il faut être intelligent, innovant. » A trois fermes de là justement, deux frères agriculteurs et 26 autres ont créé en 2010 leur propre marque de lait « Vallée du Lot », avec des vaches nourries uniquement d’une herbe riche en biodiversité. Résultat, 10 millions de litres vendus en direct par an, cette petite coopérative ne connaît pas la crise.

 

Paysan boulanger en périurbain

En obtenant le 2ème prix du jury pour « Les agronautes », Honorine Perino se voit récompenser à la fois pour la démarche avec son mari de devenir agriculteurs aux portes de Lyon, mais aussi pour la manière très touchante de filmer cette aventure familiale. A 40 ans, cette biologiste de formation qui a appris le métier de réalisatrice sur le tas en est à son 7ème film, tous sur l’agriculture. C’est elle, en réalisant un documentaire sur les paysans boulangers, qui a donné l’envie à son mari de se reconvertir. Depuis 7 ans, il s’est formé à ce nouveau métier en étant à la fois au four, au moulin, à la vente et dans les champs où il cultive des blés anciens. Le problème est qu’ils ont besoin de construire une ferme pour habiter sur place, vu qu’ils produisent, stockent, transforment et ont 3 enfants.

Le film pointe la complexité et l'incohérence des règles administratives et usages qui régissent le foncier agricole en zone périurbaine, où il est plus rentable de vendre ses terres à la construction qu’à des projets agricoles innovants. Le nombre d’agriculteurs continue de diminuer dans le périurbain mais rien n’est fait pour favoriser leur installation. Malgré les difficultés, le mari est comme un poisson dans l’eau avec son nouveau métier, il ne lui manque plus qu’à gagner le procès pour obtenir ce fameux certificat d’urbanisme qui débloquerait tout. Quant à Honorine Perino, elle attend la même chose bien évidemment, mais à coté de cela elle va continuer à filmer le monde agricole : « Il y a des moments magiques où les gens que je filme me servent sur un plateau ce que je veux sans leur avoir demandé quoi que ce soit. Parfois il suffit de sortir la caméra pour qu’ils donnent le meilleur d’eux-mêmes, avec des instants de sincérité que l’on n’a pas dans la vraie vie. »

 

Une compétition de qualité

Parmi les autres films, « Un paese di Calabria », qui a obtenu  le 1er prix, redonne un peu d’espoir dans le genre humain. Riace, un village du sud de l’Italie, victime de l’exode rural, renaît grâce à l’arrivée de migrants depuis une vingtaine d’années. Le 3ème prix a été attribué à « La colère dans le vent » qui se déroule à Arlit dans le nord du Niger, où depuis 40 ans Areva exploite l’uranium en provoquant pollution, maladies et en défigurant les paysages. Un prix d’encouragement et le prix du public sont revenus à « Une poule sur un piano » qui raconte l’histoire d’hommes que tout semble opposer mais qui se sont mobilisés pour reconstruire le château de Goutelas au cœur du Forez dans les années 1960, et où Duke Ellington est venu passer 3 jours. Le prix du jury lycéen a récompensé « Sur le rebord du monde », peut-être le plus beau visuellement, qui nous emmène à Penmarc’h à la pointe du Finistère, soumis au risque de submersion dû aux fortes tempêtes et où les marins pêcheurs font face au naufrage économique. Pour clore ce beau festival, laissons à son directeur le dernier mot : « Dans les premiers temps de Caméras des champs, les documentaires agissaient comme des lanceurs d’alerte, et depuis quelques années tout en continuant à dénoncer les causes des désarrois, ils mettent en avant des solutions locales et des alternatives qui peuvent nous rendre plus optimistes. »

Publié dans Reportages en région

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L'amoureux de la normande

Publié le par michelmonsay

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En reprenant il y a 7 ans l’exploitation familiale dans l’Orne, en vaches laitières de race normande sous appellation d’origine protégée camembert et pont-l’évêque, Charles Deparis a fait le choix de la qualité. Bien lui en a pris, aujourd’hui sa production de lait se porte bien et contribue à fabriquer par la fromagerie Gillot, les deux plus célèbres pâtes molles normandes dont il ne manque pas une occasion de faire la promotion, et ce pour l’ensemble de la filière.

 

Engagé avec les Jeunes Agriculteurs (JA) pour bien vendre son lait et mieux faire connaître les produits normands qui sont fabriqués avec, Charles Deparis ne veut pas être qu’un producteur cantonné sur son exploitation. Il se sent très attaché à la race bovine normande et au terroir normand, et de ce fait contribue à valoriser leur image et encourager les agriculteurs de sa génération à en faire autant avec les JA, mais aussi en étant président de l’organisme de défense et de gestion (ODG) du pont-l’évêque. Après un grand-père et un père agriculteurs, il a repris en 2006 l’exploitation familiale près de Briouze dans l’Orne, composée d’un troupeau 100% de vaches normandes en AOC devenu depuis AOP.

Avant de s’installer le jeune homme a pourtant hésité, il ne voulait pas le faire avant de se marier pour ne pas imposer la vie à la campagne à sa future épouse. Il a d’abord commencé par un BEP tourisme, ayant certaines dispositions en communication, en anglais et en espagnol, il enchaîne ensuite avec un Bac pro en lycée agricole, puis exerce des petits boulots et fera même un BTS. Entre-temps, il a rencontré une prof de collège qui a accepté de devenir sa femme et de vivre à la campagne. Ils ont aujourd’hui deux enfants et à aucun moment ne regrettent leur choix.

 

Autant impliqué sur son exploitation que dans l’image de la filière

En s’installant, Charles Deparis a tout de suite privilégié la qualité au volume : « Même si je ne suis pas écologiste, en produisant en AOP on a le respect de l’environnement, ce qui contribue à redorer l’image de l’agriculteur auprès de la société. Le fait que mon lait soit en AOP camembert et pont-l’évêque, cela lui donne la notoriété propre à ces appellations qui tirent vers le haut l’ensemble de la production. Mon engagement est de maintenir cette qualité au sein de la filière, pour que l’on ne dise pas dans 20 ans : ah ! Le camembert ou le pont-l’évêque, ce n’est plus ce que c’était. » Dans son exploitation, il produit 365 000 l de lait avec 55 vaches sur 83 ha, auxquels il faut ajouter les parcelles que des anciens lui prêtent, avec au total 50 ha d’herbe, 15 de maïs, 20 de blé et 5 de betterave fourragère dans une zone plutôt humide, où la plupart des terres ont été drainées et ont des rendements fourragers assez élevés. S’il a un salarié à mi-temps et son cousin à quart-temps, il tient à faire lui-même 12 traites des vaches sur les 14 de la semaine, afin de contrôler au mieux sa production et montrer l’exemple en tant que président de l’ODG. Ces journées de 7h à 20h s’organisent entre les réunions à Caen, les différentes tâches sur son exploitation et une entraide avec plusieurs agriculteurs du coin qui travaillent en CUMA.

 

Les bons choix

Après ne pas s’être payé les deux premières années, la situation de l’exploitation est plutôt bonne puisqu’il prend un salarié à plein temps pour les deux mois d’été et va pouvoir partir en vacances avec sa petite famille. Sa réussite vient en partie de sa compréhension du système : « Aujourd’hui, il faut davantage gérer le coût alimentaire des animaux que la production de lait par vache. Certains agriculteurs l’ont compris et sont prêts à faire des efforts pour avoir une qualité et de fait un meilleur prix pour leur lait, et d’autres vont compenser un prix plus bas par le volume, ce n’est pas un bon calcul à mon sens. »

 

A 34 ans, Charles Deparis se sent privilégié de vivre à la campagne et non en ville, avec tout ce que cela comporte en bonheurs sensoriels et en espace, mais le moment qu’il préfère entre tous est : « Lorsqu’au printemps je mets mes génisses à l’herbe, après les avoir surveillées tout l’hiver, les avoir vu grandir sans encombres et les voir ainsi courir, sauter et se régaler dans les prés vergers, c’est un pur bonheur. »

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La savoureuse expression du bocage

Publié le par michelmonsay

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Symboles de la très belle campagne du Pays d’Auge, le camembert de Normandie, le pont-l’évêque et le livarot, tous trois sous appellations d’origine protégée, ne sont jamais aussi bons que lorsqu’ils sont fabriqués dans le respect des valeurs de l’AOP. Les acteurs de cette filière, en plus de produire des trésors de la gastronomie française en dégageant une marge financière intéressante, valorisent la vache normande, le pâturage en prés vergers et tout un terroir incomparable.

 

Depuis maintenant un an et demi pour clarifier l’offre au consommateur, les AOC ont définitivement laissé place à l’appellation européenne AOP sur tous les produits agricoles ayant obtenu ce signe officiel de qualité, excepté les vins qui restent en AOC. Le camembert de Normandie, le livarot et le pont-l’évêque sont tous trois en appellation d’origine protégée (AOP), ce qui garantit un lien étroit entre les fromages et leur terroir d’origine. C’est dans le pays d’Auge que se trouve le berceau de ces trois AOP, grâce à un milieu physique particulier favorable à l’herbe, des savoirs-faires à la fois herbagers qui se sont développés au fil du temps sur ce territoire, mais aussi laitiers à travers la maîtrise d’une génétique bovine autour de la vache normande, et fromagers.

Comme l’explique Alain Jacquet, ingénieur terroir à l’Institut National de l’origine et de la qualité (INAO) de Caen : « Avec un climat humide sans déficit hydrique estival, des températures qui sont rarement très hautes, des sols pentus et argileux défavorables au labour, les normands ont développé un système bocager qui délimite les prairies et protège les animaux. L’alimentation herbagère des vaches donne un lait très qualitatif qui contient de la vitamine A sous forme de carotène, donnant aux pâtes de ces fromages une couleur jaune. En plus la normande est la race française qui possède le taux protéique le plus riche avec la caséine, ainsi que des aptitudes laitières et fromagères très performantes. La vache normande est probablement la meilleure fromagère au monde. »

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Caractéristiques de ces produits d’exception

Ces fromages à pâte molle très parfumés ont des périodes d’affinage assez courtes et se consomment rapidement comparés aux fromages de montagne. Le camembert a une croute fleurie avec la pousse du pénicillium, le livarot et le pont-l’évêque ont des croutes lavées qui favorisent le développement d’un goût plus prononcé. Dès 1855 avec l’ouverture de la ligne de chemin de fer entre Caen et Paris, les produits laitiers normands rencontrent un grand succès dans la capitale. Cela va changer les pratiques agricoles en diminuant les labours et en amenant la couverture en herbe du pays d’Auge et de l’ensemble de la Normandie.

C’est en 1890 avec l’invention de la boite en bois par un ingénieur havrais que le camembert trouve son emballage rond si reconnaissable. Pour le livarot, le cerclage avec la laiche permettait de tenir le fromage qui avait tendance à s’affaisser, étant moins riche en matière grasse. Aujourd’hui, ces 5 bandelettes de roseau sont davantage un élément identitaire que nécessaire et ont donné au fromage le surnom de colonel. Quant au pont-l’évêque, sa forme carrée vient des moules en bois du XVIIIe siècle. « L’art de l’association à la normande dans le pays d’Auge, indique Alain Jacquet, est d’être capable sur un même champ, le pré verger, d’avoir six appellations avec le calvados, le pommeau, le cidre et nos fameux trois fromages. Bientôt, on devrait pouvoir y ajouter le bœuf de Normandie. »

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Une exploitation remarquable à l’image de la filière

Avec un troupeau 100% de vaches normandes, le domaine de St Hippolyte près de Lisieux est la seule ferme en France qui transforme sur place son lait en livarot fermier au lait cru, autrement dit qui n’a pas subi de traitement thermique au-delà de 40°. L’exploitation, classée site remarquable du goût, produit 700 000 l de lait par an dont 550 000 sont transformés, ce qui fait une moyenne de 2000 l par jour. 80% du fourrage des vaches laitières est produit sur les 160 ha de l’exploitation, comme le stipule le cahier des charges de l’AOP. « Toutes les étapes de fabrication des fromages se déroulent manuellement, signale Bertille Leroux, responsable du domaine, que ce soit le brassage du caillé ou le moulage, et 500 livarots ou pont-l’évêque sont produits chaque jour dans la fromagerie du domaine. Il faut savoir que 5 l de lait sont nécessaires à la fabrication d’un fromage de 500 g. »

Sur l’ensemble de la filière, 3500 t de pont-l’évêque sont fabriqués chaque année, 1000 t de livarots avec une zone d’appellation plus restreinte géographiquement, et 5000 t de camemberts de Normandie. Le pâturage des vaches laitières au moins six mois dans l’année, autre obligation de l’AOP, empêche un développement microbien pathogène et favorise l’expression des bactéries positives qui vont transmettre le terroir. Autre avantage de cette herbe jeune, elle donne une consistance très souple à la pâte du fromage et une onctuosité en bouche qui n’a pas d’égal.

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Des règles exigeantes pour une qualité irréprochable

Pour chaque appellation, la loi demande qu’il y ait un organisme de défense et de gestion (ODG) dans lequel est représenté l’ensemble de la filière. Ces syndicats interprofessionnels créés en 1995 décident des arbitrages du cahier des charges sur la production de lait et la fabrication des fromages, avec l’homologation du ministère de l’agriculture. « Les 720 éleveurs de ces filières fromagères en AOP, souligne Anne Wagner, directrice de l’association de gestion des ODG laitiers normands, font le choix de miser sur l’autonomie fourragère en valorisant le potentiel de leurs pâtures, et par conséquent de moins dépenser en aliments extérieurs à leur exploitation. Le niveau de production de lait est moindre mais le coût de l’alimentation et des frais vétérinaires le sont aussi, sans oublier que la richesse du lait des vaches en pâture est très prisée des fromageries, et que les éleveurs touchent une prime AOP. Tout cela leur permet de dégager une marge intéressante en ayant des systèmes très cohérents. » Ces AOP contribuent en plus à structurer l’économie locale. Il faut pour produire et transformer 100 000 l de lait, 2,7 emplois en AOP contre 1 emploi dans le secteur industriel.

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Valoriser l’exemplarité de l’AOP

Si les produits laitiers normands bénéficient d’une image très positive d’après une étude menée auprès des consommateurs, l’AOP n’est pas très connue et de ce fait n’est pas un critère de choix au moment de l’achat. Ce logo officiel est pourtant la garantie que le produit, de la traite des vaches jusqu’à l’emballage, est fabriqué sur le terroir de l’appellation. Pour remédier à cette lacune, notamment auprès des jeunes consommateurs, les ODG laitiers de Normandie ont lancé une campagne de communication à visée pédagogique, pour expliquer les valeurs de l’AOP : Respect de l’environnement, maintien de l’emploi sans délocalisation, traçabilité du produit, préservation de paysages traditionnels et bien évidemment le caractère inimitable de ces trois délicieux formages.

Publié dans Reportages en région

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