Dans la lignée de Ferré et Rimbaud
A 66 ans, Hubert-Félix Thiéfaine poursuit son petit bonhomme de chemin en sortant un 17ème album sans se soucier des modes, et en inscrivant une nouvelle collection de magnifiques chansons poétiques et rebelles dans une œuvre majeure enfin reconnue. Son précédent disque lui a valu ses deux premières Victoires de la musique, meilleur album et artiste de l’année 2012, mais aussi un succès public qui a largement dépassé ses nombreux fidèles qui le suivent depuis 35 ans pour certains. A l’écoute des 12 petits bijoux qu’il nous offre aujourd’hui, il paraît de plus en plus évident que cet artiste profond et puissant est le digne héritier du grand Léo Ferré. Jusque dans la voix où l’on perçoit quelques similitudes, et bien sûr dans la qualité des textes, une poésie sombre au pouvoir incandescent doublée d’un regard cinglant et si juste sur notre société. Il manie les mots avec dextérité en soignant autant le fond que la forme, pour en faire jaillir des paroles directes, sans artifices ni compromis, tantôt émouvantes tantôt percutantes. Quant à la musique, mis à part deux morceaux, il en a confié l’écriture à plusieurs complices comme J.P. Nataf, Cali, Arman Méliès ou Jeanne Cherhal. Leurs très belles compositions forment un parfait écrin aux textes ciselés par l’un des tous meilleurs orfèvres de la chanson française. Si la couleur musicale est plutôt rock, les mélodies envoûtantes sur des tempos plus ou moins rythmés donnent à cet album une partition de premier plan. Revenu de ses excès qui ont failli avoir raison de sa santé, l’artiste est aujourd’hui au meilleur de sa forme dans tous les sens du terme, pour nous offrir un disque plus apaisé avec quelques couleurs plus vives, traversé d’un verbe toujours aussi lucide, fiévreux et d’une puissance rare.
Hubert-Félix Thiéfaine – Stratégie de l’inespoir – Columbia – 1 CD : 15,99 €.