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Une passion et des convictions bien ancrées

Publié le par Michel Monsay

Une passion et des convictions bien ancrées

À la tête de l’Institut du monde arabe (IMA), Jack Lang est en passe, à 75 ans, une nouvelle fois de faire des miracles pour mettre en avant la culture. Celui qui a marqué de son empreinte indélébile le monde culturel sous les années Mitterrand, apparait déçu par ce qu’est devenue la politique aujourd’hui.

 

Appelé par le Président de la République en janvier 2013 avec l’accord de l’ensemble des pays arabes, pour redresser l’IMA dont les finances et la fréquentation n’étaient pas très bonnes, Jack Lang qui aime les missions difficiles ne pouvait qu’accepter celle-ci. Ses attaches avec le monde arabe ont commencé durant sa période étudiante alors qu’il était militant anticolonialiste. Par la suite en étant professeur de droit il a noué des liens avec des professeurs du Maghreb, puis comme créateur du festival mondial de théâtre universitaire de Nancy, il a invité des auteurs, intellectuels et chercheurs arabes. « L’IMA est une institution unique, qu’aucune autre capitale ne possède, qui établit le pont entre le monde oriental et occidental, comme l’explique son Président. Dans cette période où des violences éclatent dans des pays du Proche-Orient, nous avons besoin plus que jamais d’une telle institution qui incarne l’esprit d’ouverture, de tolérance, de respect et de paix. »

 

Une année grandiose

Le temps de se mettre en place avec son équipe, Jack Lang a voulu frapper un grand coup en 2014 avec trois grandes expositions : L’Orient-express, le pèlerinage à La Mecque et le Maroc contemporain qui a lieu en ce moment. D’autres sont à venir en 2015 sur les jardins arabo-musulmans, et sur l’Egypte ancienne à travers les récentes découvertes d’archéologues. Libre, indépendant, sans pression d’aucune sorte, l’IMA est aussi un lieu de réflexion, de dialogue, avec des colloques et des débats organisés régulièrement sur l’actualité politique, culturelle et sociale. En janvier 2015, un symposium international sur le renouveau du monde arabe, montrera tous les changements positifs survenus ces dernières années dans plusieurs pays. Sans augurer de la suite, Jack Lang a réussi à faire repartir la fréquentation à la hausse, mobiliser des mécènes, et après des années de déficit, 2014 sera à l’équilibre.

 

D’une circonscription à l’autre

Absent des bancs de l’Assemblée Nationale depuis 2012, il n’en ressent aucun manque : « La politique ne donne pas aujourd’hui une belle idée d’elle-même. Elle manque d’imagination, de souffle, d’élan, se limite encore plus qu’avant à des combats de chefs et de sous-chefs et ne propose pas de projets forts. » Pourtant en 2012, il s’était présenté dans les Vosges pour les élections législatives et avait été battu de justesse dans une circonscription difficile, qui était à droite depuis trois législatures. Paradoxalement, c’est dans la région où il était le plus légitime, étant né à Mirecourt dans les Vosges et ayant vécu longtemps à Nancy, qu’il a été battu. Alors que son parachutage dans le Loir et Cher puis dans le Pas-de-Calais s’étaient fort bien passés. Même si cette campagne électorale sur le terrain l’a passionné, il n’a de regrets que pour ses proches et amis qui se sont mobilisés. Il se dit reconnaissant au sort de ne pas l’avoir choisi comme député des Vosges, car il serait aujourd’hui dans une situation très difficile face à la désindustrialisation galopante et une politique gouvernementale qui ne lui paraît pas assez volontariste. Pour autant, il ne serait pas  dans les frondeurs, ayant toujours eu le sens de la solidarité.

Parachuté dans le Loir et Cher en 1986, il a beaucoup aimé cette région et y compte encore de nombreux d’amis, notamment à Blois dont il a été maire durant 11 ans. Il vient d’y retourner pour participer à une manifestation qu’il a créée en 1998, Les rendez-vous de l’Histoire. Beaucoup le reconnaissent, Jack Lang a transfiguré la ville, il l’a réveillée. Ayant toujours préféré l’action aux discours, il y a construit entre autres une nouvelle bibliothèque, une université, une école d’ingénieur, un pont, et la halle aux grains qui a failli être détruite avant qu’il n’arrive est devenue un haut-lieu culturel.

 

Fidèle à ses convictions

A l’Assemblée Nationale, en tant que député du Loir et Cher, il a particulièrement apprécié la période durant laquelle il était  président de la commission des affaires étrangères de 1997 à 2000, où il s’est occupé de dossiers sur la protection des droits de l’homme dans différents pays, les traités européens, le développement économique en Afrique. Plus tard, lorsqu’il a été élu du Pas-de-Calais, il s’est trouvé parfois en désaccord avec ses propres amis, notamment quand le Président Sarkozy a entrepris une révision constitutionnelle en 2007, et lui a demandé avec d’autres personnalités de gauche de faire partie d’un comité de réflexion présidé par M. Balladur et dont Jack Lang est devenu vice-président : « Nous avons avancé avec ce comité, des propositions qui étaient conformes à celles que le Parti socialiste lui-même avait formulées quelques années auparavant. Ce qui tue la politique est cette incapacité à être en cohérence avec soi-même, on ne peut pas tenir un langage différent selon qu’on soit dans l’opposition ou au gouvernement. J’ai donc été le seul socialiste à voter cette réforme des institutions. »

De même pour la loi Hadopi, il a trouvé incompréhensible que les socialistes se dressent aussi violemment contre ce texte, qu’il jugeait être en conformité avec tout ce qu’il avait entrepris comme Ministre de la culture : « C’est parce que je me sens beaucoup plus à gauche que certains donneurs de leçon qui m’ont engueulé à l’époque, que j’ai voté ces textes. Ce sont eux qui trahissaient l’idéal républicain en refusant de démocratiser la Constitution et en s’opposant à une loi de régulation d’Internet. » Aujourd’hui moins engagé dans la vie politique du fait de ses responsabilités à l’IMA, il est néanmoins en très bons termes avec le Président Hollande même s’il n’est pas toujours en accord avec ses décisions.

 

Un cheminement par étapes

Passionné de théâtre durant son adolescence, il le pratique en amateur avant de créer plus tard un festival à Nancy, mais sa volonté est de devenir professeur. Après des études de droit et de Sciences-politiques, il devient professeur de droit à la faculté de Nancy. A partir de là, il va mener trois vies qui s’entremêlent, celle de professeur et de juriste, celle de citoyen de gauche engagé dans la vie collective, et la troisième concerne bien évidemment la culture. La politique est venue progressivement à lui. Tout d’abord, il invite François Mitterrand en 1974 à venir assister à son festival de théâtre à Nancy, puis se laisse convaincre par un ami de s’inscrire sur une liste pour les élections municipales de 1977 à Paris dans le 3ème  arrondissement, dont la tête de liste Georges Dayan est un ami intime de François Mitterrand. Comme Jack Lang est élu conseiller municipal, il trouve normal d’adhérer au Parti socialiste. De fil en aiguille, après la défaite aux Législatives de 1978, François Mitterrand, qui est accusé d’être un homme du passé, décide de s’entourer de personnes plus jeunes et innovantes. Commence alors la longue et fructueuse collaboration entre le futur Président de la République et Jack Lang.

 

Aux côtés de François Mitterrand

Cela démarre par la campagne pour les premières élections européennes en 1979 dont Jack Lang a la charge, et qui se finit devant 150 000 personnes au Trocadéro. François Mitterrand est vite convaincu par la capacité de son conseiller pour la culture à drainer autant de monde, autant d’artistes et d’intellectuels. A peine élu, le chef de l’Etat lui confie l’organisation de sa journée d’investiture, qui se finit avec une foule immense au Panthéon. Les rapports entre les deux hommes vont aller crescendo, François Mitterrand étant retenu et intimidant, Jack Lang plutôt timide et ayant un profond attachement au leader socialiste. Durant les deux septennats, mis à part les deux cohabitations il est le seul Ministre de la culture du Président Mitterrand, et devient une référence à ce poste en créant de très nombreux événements comme la Fête de la musique, les journées du patrimoine et en amenant la culture dans toute sa diversité à un niveau jamais atteint. Ils mènent ensemble également d’importants grands travaux qui aujourd’hui forcent l’admiration, mais qui avaient provoqué des polémiques à l’époque, comme le grand Louvre avec la construction de la pyramide, l’Opéra Bastille, la grande bibliothèque, … De cette période exceptionnelle, il conclut : « François Mitterrand m’a apporté énormément, son intelligence politique, sa finesse, son immense culture. Si ce que nous avons entrepris a été une réussite, c’est en raison de ce duo original que nous formions, tout en étant très différents nous avions la même passion et la même détermination. »

Publié dans Portraits

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Comédie singulière au charme imparable

Publié le par Michel Monsay

Comédie singulière au charme imparable

L’art de la comédie est si complexe que lorsqu’un cinéaste nous en propose une qui évite la lourdeur et les pièges récurrents à ce genre, puis une seconde qui a la même singularité, la même qualité d’écriture tout en étant très drôle, on ne peut qu’attendre avec impatience son nouveau film. Après « Copacabana » et « Pauline détective », Marc Fitoussi nous enchante une nouvelle fois avec un sujet totalement différent, le monde agricole par le biais d’un couple d’éleveurs de bovins, qu’il traite avec la finesse et la précision qui le caractérisent en évitant tous les clichés. Outre le talent des acteurs qui est primordial dans la réussite d’une comédie, le scénario, les dialogues et la justesse des personnages, même les secondaires, sont tout aussi importants. Ici, tout y est, Isabelle Huppert une nouvelle fois surprenante, Jean-Pierre Darroussin très touchant dans un rôle qu’il endosse remarquablement, une histoire qui prend toujours une direction inattendue, des dialogues qui provoquent autant le rire que l’émotion, et une vision moderne de l’agriculture. Le film démarre justement avec un couple d’éleveurs qui préparent un taureau charolais pour un concours agricole, que cet animal exceptionnel va remporter. Ils rentrent ensuite en Austin mini break dans leur ferme en Normandie, tandis que leur employé ramène le bestiau. Le fils, apprenti acrobate, qui était venu garder le troupeau les accueillent en râlant à cause de leur retard et des 3 heures de route qu’il va devoir faire. Même si le couple a l’air de toujours s’aimer, on sent un peu d’agacement par moment chez lui, alors qu’elle, semble avoir besoin de sortir de leur routine, de prendre du temps pour elle et faire autre chose que de s’occuper des vaches. Sans être une pure comédie de bout en bout, ce film à l’équilibre parfait, navigue d’une cocasserie jubilatoire à une tendresse, un charme qui ne tombe jamais dans la mièvrerie, parfois même à une pointe de gravité, d’où l’on ressort totalement conquis.

                                                                                                                     

La ritournelle – Un film de Marc Fitoussi avec Isabelle Huppert, Jean-Pierre Darroussin, Pio Marmaï, Michael Nyqvist, … - M6 vidéo – 1 DVD : 19,99 €.

Publié dans DVD

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« Nous pouvons tous être acteurs de la lutte contre l’exclusion »

Publié le par Michel Monsay

« Nous pouvons tous être acteurs de la lutte contre l’exclusion »

Alors qu’elle avait mené jusqu’à présent une carrière politique et associative dans l’action sociale, Véronique Fayet, 61 ans, est depuis juin dernier, la première femme élue Présidente du Secours Catholique. D’ATD Quart Monde à la Mairie de Bordeaux en tant qu’adjointe d’Alain Juppé, sa priorité a toujours été la lutte contre l’exclusion et la précarité.

 

En quoi consistent les actions du Secours Catholique en France ?

Véronique Fayet - Le Secours Catholique en France, c’est 1000 salariés, 62 000 bénévoles, entre 600 000 et 800 000 donateurs, pour accueillir 1 million et demi de personnes chaque année. Notre but est d’agir sur les causes de la pauvreté et de redonner à ces personnes le pouvoir d’être autonome. Nous sommes implantés sur la totalité du territoire avec des actions en faveur du logement, de l’emploi, des actions de soutien aux familles mais aussi des actions dans les prisons. Dans la ruralité, nous travaillons avec des personnes âgées, des agriculteurs en difficulté, des personnes isolées pour lesquelles nous allons inventer un moyen de transport. Autre exemple, à Calais nous nous occupons de migrants étrangers qui vivent dans une situation de dénuement extrême. Cette misère qui dure depuis une vingtaine d’années, bien avant Sangatte, a conduit nos bénévoles à se structurer pour répondre à ce besoin particulier, notamment en proposant encore un vestiaire, l’un des tous derniers que nous avons.

Autrefois nous avions des vestiaires où nous donnions les vêtements, aujourd’hui ce sont des boutiques où les gens choisissent ce qui leur convient en échange d’une somme modique. Nous avons aussi mis en place il y a 10 ans un réseau qui s’appelle « Tissons la solidarité », avec la création d’entreprises d’insertion pour récupérer, trier et revendre les vêtements. De même la distribution alimentaire, avec tout ce que cela comporte d’humiliant, s’est transformée en épicerie solidaire. C’est là une des évolutions du Secours Catholique, pour rendre aux personnes la capacité d’agir et choisir leur vie. Nous avons pris ainsi le chemin ouvert par le Père Wresinski et ATD Quart Monde qui n’ont jamais proposé de distribution.

 

Quel est votre rôle à travers les Caritas dans le monde, notamment au Moyen-Orient et en Afrique ?

V.F. - Tout d’abord, Secours Catholique – Caritas France est une seule association avec un double nom. Caritas étant une confédération d’organisations catholiques à but caritatif. Nous gardons le nom historique, mais nous sommes une Caritas parmi les 165 réparties dans le monde entier. Nous intervenons partout où il y a une Caritas ou une ONG que l’on connait bien. Nous n’avons pas de salariés ni de bénévoles à l’étranger, ce sont des équipes d’ici qui partent en mission. Actuellement nous finançons beaucoup la Caritas Irak qui est très menacée. En Afrique, nous aidons les Caritas sur des programmes d’agriculture paysanne, mais aussi à se former et à se structurer pour qu’elles aient une action plus efficace dans la construction et le financement de projets. Il y a des Caritas dans tous les pays du Moyen-Orient avec sur place un travail de longue haleine sur la paix, avec les communautés et avec les réfugiés. Récemment des jeunes de ces Caritas ont suivi une formation que nous avons organisée au Liban, et beaucoup nous ont dit qu’avant ils ne se parlaient pas entre égyptiens, jordaniens, palestiniens, libanais, … voire ils ne s’aimaient pas beaucoup, et cette formation les a fait devenir frères.

 

Qui sont les bénévoles du Secours Catholique et quel est votre sentiment sur le Prix Nobel de la paix ?

V.F. - Le profil des bénévoles est assez variable, certains sont en activité, d’autres à la retraite, beaucoup sont demandeurs d’emploi et à la faveur de cette période difficile, ils s’investissent dans le bénévolat et acquièrent des compétences qui pourront leur servir par la suite. Nous avons aussi beaucoup de jeunes, eux-mêmes souvent en précarité, et de fait il n’y a pas vraiment de frontière entre celui qui est accueilli dans une délégation du Secours Catholique et celui qui s’engage dans le bénévolat, généralement c’est le même. Cela conforte notre slogan « Tous acteurs », nous pouvons tous être acteurs de la lutte contre l’exclusion, à partir du moment où quelqu’un nous dit j’ai besoin de toi pour cette mission.

L’attribution du Prix Nobel de la paix à une jeune pakistanaise et à un indien, qui se battent contre l’oppression des enfants et pour leur droits à l’éducation, est un symbole très fort. La meilleure façon de lutter contre la pauvreté est de combattre l’échec scolaire et l’illettrisme, la vraie racine de la pauvreté se trouve ici. La scolarisation dans tous les pays dans un premier temps et ensuite la réussite à l’école sont essentiels. L’éducation, c’est aussi la paix, lorsque l’on a les mots pour dire les choses, on a moins de violence en soi.

 

Au-delà du terrain, avez-vous une action politique pour faire changer les choses ?

V.F. - Ce que nous faisons auprès des migrants à Calais est une action d’urgence qui peut se comparer à celle des camps de réfugiés ailleurs dans le monde. L’hiver va être très dur, il n’y a pas d’hébergement prévu pour ne pas recommencer Sangatte, juste un point d’accueil pour l’alimentation et le vestiaire. Parallèlement à une action de terrain comme celle-ci, qui nous permet de prendre conscience d’une réalité et de déduire un certain nombre de pistes d’action, nous menons toujours un plaidoyer auprès des pouvoirs publics. Depuis deux ans nous demandons la création d’une mission d’étude pour ne pas rester dans cette situation indigne. Finalement, le Ministre de l’intérieur a mandaté deux hauts fonctionnaires  pour trouver une solution avec les anglais et l’Union européenne, ce qui nous donne un peu d’espoir même si nous savons que cela va être très compliqué. Nous sommes de plus en plus écoutés grâce aux collectifs d’associations comme Alerte, mais la situation budgétaire du pays nécessite des choix qui ne vont pas toujours dans le sens que l’on voudrait.

 

Est-ce que la religion et la foi ont une importance dans les actions que vous menez ?

V.F. - Nous accueillons tout le monde quelque soit la religion, autant pour les salariés et bénévoles que pour les personnes qui font appel à nous, mais nous considérons aussi que le droit à la spiritualité est un droit pour tout être humain. Il est important de proposer en plus de la satisfaction des besoins élémentaires, la possibilité de vivre une spiritualité. Voilà pourquoi nous avons mis en place des voyages de l’espérance, où viennent des musulmans, des chrétiens, des athées et cela se passe formidablement bien, car au fond beaucoup ont une soif de transcendance. Il fut un temps où l’on n’avait pas le droit de parler de religion, de foi au nom de la sacro-sainte laïcité, aujourd’hui on ose davantage.

 

Avez-vous des solutions pour combattre le chômage ?

V.F. - Beaucoup d’équipes locales ont des actions pour l’emploi, notamment en constituant des groupes de soutien aux demandeurs d’emploi qui sont au chômage depuis longtemps et parfois peu qualifiés, dans lesquels ils ont la parole, ce qui crée une dynamique collective. Le chômage, c’est souvent la solitude, la dévalorisation de soi-même, la perte de confiance, et ces groupes les aident à continuer à travailler avec Pôle-emploi ou la mission locale jusqu’à ce qu’ils retrouvent un emploi. Nous avons aussi le réseau « Tissons la solidarité » avec 75 entreprises d’insertion, qui travaillent en partenariat avec de grandes maisons de couture pour qualifier les personnes et augmenter ainsi leurs chances d’un retour à l’emploi. Pour certains qui cumulent les difficultés, la durée de deux ans du contrat d’insertion n’est pas suffisante, nous avons donc mis sur pied une expérimentation en Rhône-Alpes qui prolonge d’un an ce contrat. Nous allons évaluer sa pertinence avant la fin de l’année et voir s’il faut porter une demande de changement de règlementation auprès du Ministère. Avec le collectif Alerte, nous avons obtenu d’être présents à la conférence sociale, réservée normalement aux partenaires sociaux, pour évoquer la question de ceux qui sont en dehors de l’emploi et envisager des négociations sur ce sujet.

 

Quel bilan tirez-vous du récent sommet sur le climat et pourquoi le Secours Catholique s’investit sur ce sujet ?

V.F. - Une déléguée du Secours Catholique était présente au sommet de New York, et nous en a fait un retour plutôt positif avec un certain nombre d’idées qui commencent à faire consensus : Accepter de réduire les énergies fossiles de manière substantielle et programmée sur plusieurs années, revenir à une agriculture familiale et non intensive, ne pas produire de l’énergie verte au détriment de systèmes agricoles locaux. Cela laisse espérer que le sommet sur le climat à Paris en décembre 2015 soit efficace et positif. Nous constatons tous les jours, notamment dans les pays du Sahel, à quel point les dérèglements climatiques causent des dégâts sur l’agriculture et aggravent la pauvreté. L’Eglise va vraiment se positionner sur ce sujet avec une encyclique du Pape François début 2015 sur l’écologie humaine.

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L’art de se réinventer

Publié le par Michel Monsay

L’art de se réinventer

Chanteur et leader d’un des plus grands groupes de l’Histoire du rock, Led Zeppelin, Robert Plant, à l’inverse de ses collègues encore en activité, a su totalement se réinventer depuis la séparation du groupe en 1980 suite à la mort du batteur. A 66 ans, il sort un dixième album solo qui est certainement le plus beau, où se mêlent avec une grâce infinie toutes les musiques que l’artiste a explorées au fil des années. Rock psychédélique, rythmes et sonorités d’Afrique du Nord et de l’Ouest, blues, folk celtique, country américaine avec une ambiance électronique qui par moments enveloppe sublimement le tout. Pour bâtir cette merveille de métissage, il s’est entouré de six excellents musiciens, dont un gambien, qui s’évertuent à donner le meilleur de leurs instruments qu’ils soient électriques ou traditionnels. Considéré à juste titre comme l’une des plus belles voix de la musique moderne, Robert Plant ne monte plus dans les aigus comme avant mais sa voix est peut-être plus belle encore. Elle n’a rien perdu de sa sensualité, de son animalité, elle a gagné en douceur, en subtiles nuances et nous procure toujours autant de frissons. A travers 11 morceaux où il n’y a pas une miette à jeter, cet artiste exemplaire, que sa curiosité et son exigence ont détourné d’une nostalgie qui aurait pu être légitime, nous convie à un voyage qui nous faire perdre le Nord. Rien ici n’est prévisible, nous passons d’une émotion à l’autre avec la même gourmandise de découvrir comment cet alchimiste a réussi à gommer les frontières, pour que toutes ces musiques s’harmonisent à la perfection. Cet anglais voyageur n’a décidément pas fini de nous surprendre et de nous passionner. Assurément l’un des tous meilleurs albums de l’année.

 

Robert Plant – Lullaby and …The ceaseless roar – Warner Music – 1 CD : 15,99 €.

Publié dans Disques

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« Beaucoup de familles musulmanes s’investissent dans le monde agricole »

Publié le par Michel Monsay

« Beaucoup de familles musulmanes s’investissent dans le monde agricole »

Nommé Président du Rassemblement des musulmans de France en 2007, Anouar Kbibech, 53 ans, est aussi vice-président du Conseil français du culte musulman. Ingénieur des ponts et chaussés, titulaire d’un mastère en aménagement et maîtrise d’ouvrage urbaine, il est également directeur de systèmes d’information chez SFR.

 

Quelle est la relation de votre religion avec l’agriculture et l’environnement ?

Anouar Kbibech - Cette relation considère que la nature est la création de Dieu, au même titre que l’Etre-humain. L’Islam nous incite à respecter la nature sous toutes ses formes : animaux, eau, plantes, … .

Du coup, l’adoration envers Dieu ne s’arrête pas au fait de s’acquitter des œuvres spirituelles telles que la Prière ou le Jeûne. Mais elle englobe aussi les prescriptions qui protègent la vie et la nature.

Cette relation considère également que la nature a été créée par Dieu pour être au service de l’Homme.

 « Que l’Homme considère donc sa nourriture : c’est Nous qui versons l’eau abondante, puis Nous fendons la terre par fissures, et y faisons pousser grains, vignobles et légumes, oliviers et palmiers, jardins touffus, fruits et herbages, pour votre  jouissance vous et vos bestiaux.»

Le monde agricole est très fortement ancré dans la tradition française. L’agriculture est très représentative du terroir français. 

Beaucoup de familles musulmanes s’investissent dans le monde agricole, notamment dans le Sud de la France.

Aujourd’hui, le monde agricole est confronté à plusieurs problématiques qui peuvent nous interpeller.

L’agriculture est un acteur majeur dans la politique de la « sécurité alimentaire » pour préserver l’avenir de l’humanité.

L’agriculture doit également relever le défi de la productivité !

Cette productivité doit-elle se faire à tout prix …  même au détriment du bien-être animal ?

La réponse est clairement non ! En la matière, la faim ne peut justifier les moyens.

 

Quelles sont les pratiques alimentaires spécifiques à votre religion et en quoi consistent-elles ? Sont-elles respectées par l’ensemble de la communauté ? Ont-elles évolué avec le temps ?

A.K. - Les pratiques alimentaires correspondent à des prescriptions bien identifiées dans le Coran. Les musulmans sont très attachés à l’accès à des produits alimentaires Halal.

Halal est un terme arabe qui signifie permis ou licite pour les musulmans.

Le contraire de Halal est Haram qui signifie interdit ou illicite.

Pour que la viande soit Halal, le sacrifice doit être rapide pour être le moins douloureux possible. Le sang doit être évacué et le sacrificateur musulman doit prononcer la formule religieuse en égorgeant l’animal, la tête tournée vers la Mecque.

Il faut bien noter que dans l’abattage rituel, l’Islam est très attentif à la non-souffrance de l’animal. Toutes les dispositions doivent être prises pour soulager l’animal.

Face à l’utilisation parfois abusive du terme Halal, le consommateur musulman s’inquiète du manque de rigueur et exige plus de transparence.

Le nombre d’intervenants et la multiplication des manipulations augmentent le risque d’erreurs voire de fraudes.

Le Conseil Français du Culte Musulman a recommandé aux acteurs concernés de rationaliser l’organisation de l’Abattage rituel et de fiabiliser les engagements pris.

 

Comment votre religion a-t-elle évolué ces dernières années notamment sur les questions de bioéthique (santé, OGM) ?

A.K. - L’Islam est ouvert au progrès scientifique qui permet à l’Humanité d’ouvrir de nouveaux  horizons.

Cependant, certaines manipulations génétiques, et leur application dans le monde de l’agriculture, nous interpellent.

Ainsi, rejetant toute notion de doute, notamment sur les effets à long terme sur l’espèce humaine, l’Islam rejette toute utilisation des OGM.

Plus globalement, la jurisprudence islamique (Fiqh) est amenée à répondre à des questions posées par certaines avancées technologiques (don des organes, clonage, …).

Il est alors proposé de créer des Comités pluridisciplinaires regroupant plusieurs spécialistes dans le domaine de la biotechnologie, de l’environnement ainsi que des responsables religieux pour étudier ces nouvelles technologies et leurs impacts sur l’être humain et sur l’environnement.

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« À Lampedusa, le Pape avait dénoncé la "mondialisation de l'indifférence »

Publié le par Michel Monsay

« À Lampedusa, le Pape avait dénoncé la "mondialisation  de l'indifférence »

Diplômé de l’école supérieure de journalisme de Lille, licencié en sciences religieuses et en théologie, Bernard Podvin est ordonné prêtre en 1986 pour le diocèse de Lille. A 54 ans, il porte la voix de l’Eglise catholique de France depuis 2008, lorsqu’il a été nommé secrétaire général adjoint, porte-parole et directeur du service information-communication de la Conférence des évêques de France.

 

Quelle est la relation de votre religion avec l’agriculture, la ruralité et l’environnement ?

Mgr Bernard Podvin - L'Eglise catholique et le monde agricole ont des siècles de proximité. Les paroisses se sont constituées au rythme de la vie rurale. Avant qu'un état civil existe en France, faisait foi le recensement de l'état religieux d’une population sédentaire. La Jeunesse Agricole Chrétienne (JAC) a suscité un syndicalisme agricole abondant. L'enseignement catholique agricole a formé des générations. Aujourd'hui, les mutations sont évidemment considérables. La mobilité sociale, la mondialisation, la crise européenne, les défis environnementaux ont transformé les mentalités. L'Eglise catholique, marquée en Occident par le manque de vocations, a réorganisé son réseau paroissial. Pour la religion chrétienne, Dieu Créateur confie la terre à l'homme  "afin de la rendre habitable". Il n'est donc pas surprenant que la spiritualité catholique ait toujours insisté sur les points suivants : respecter la création parce qu'elle vient de plus grand que soi.  Produire ? Oui, mais dans le respect des valeurs humaines et environnementales. On devine donc aisément les préoccupations des chrétiens  aujourd'hui : citons notamment la désertification du monde rural, le rythme de vie des actifs agricoles, l'éclatement familial, la disparité des revenus, les menaces sur l'équilibre écologique. Tous les sujets d'actualité sont sensibles aux yeux de  l'Eglise catholique : la crise sans précédent de filières, la paupérisation d'un monde rural, l'aventurisme d'une urbanisation, les bouleversements climatiques, les incohérences de réformes territoriales, l'individualisme croissant sont des clignotants majeurs. En positif, l'Eglise catholique encourage la vie associative, la lutte contre les précarités, la préservation par les communes du patrimoine religieux, la recherche nouvelle de modes de vie respectueuse de la biodiversité, ... Inutile de dire que le Dimanche est essentiel à nos yeux comme point d'équilibre de la société !

 

Quelles sont les pratiques alimentaires spécifiques à votre religion et en quoi consistent-elles ?

Mgr B.P. - À la différence d'autres traditions religieuses, la foi catholique ne se bâtit pas sur de nombreux préceptes alimentaires. C'est la conception éthique et spirituelle  des choses qui compte : ne pas être aliénés par la société de consommation, lutter contre la faim dans le monde sont des points forts. L'insistance est plutôt sur le jeûne en Carême dans la préparation de Pâques et l'abstinence de viande le mercredi des cendres, les vendredis et le Vendredi saint. Jeûner est  le rappel que le bonheur ne vient pas que de cette société. Jeûner était tombé dans la pratique, mais est de retour aujourd'hui chez une génération soucieuse de réaffirmer sa foi. Le Carême redevient un "sujet médiatique". Il y a aussi une attente spirituelle très grande. Les monastères et la religion populaire sont des lieux très fréquentés.

 

Comment votre religion a-t-elle évolué ces dernières années notamment sur les questions de bioéthique (santé, OGM) et de biodiversité ?

Mgr B.P. - Benoit XVI parle d’une "écologie humaine". Respecter l'environnement, c'est respecter toutes les dimensions de la vie : bioéthique et protection planétaire vont de pair. De la vie naissante à la vie finissante, en passant par le souci du chômage, des migrations, c'est toute la vie qu'il faut protéger. Le Pape François, premier Pape en provenance du Sud, et dont  la popularité dépasse largement la sphère catholique, s'inspire beaucoup de St François d'Assise, précurseur au 13e siècle d'une pensée écologique. À Lampedusa, le Pape avait dénoncé la "mondialisation  de l'indifférence". La phrase a fait le tour du monde. Elle résume bien la conception catholique devant les enjeux inédits de la planète ! 

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« Selon l'hindouisme, la nature rétablira l'équilibre tôt ou tard »

Publié le par Michel Monsay

« Selon l'hindouisme, la nature rétablira l'équilibre tôt ou tard »

Aujourd’hui un des référents dans le domaine de la spiritualité hindoue, surtout à La Réunion, le département français le plus hindou, Swami Advayananda, 61 ans, est un moine qui a fondé en 1985 un ashram au Port dans son île natale. Après des études en métropole, un début de carrière commerciale, il démissionne et part en Inde se former durant 3 ans. Il rentre à La Réunion en 1983 pour enseigner la religion hindoue et s’y consacrer pleinement.

 

Quelle est la relation de votre religion avec l’agriculture et l’environnement ?

Swami Advayananda - L'hindouisme qui n'a pas de fondateur unique est né par le culte des éléments naturels : le feu (agni), l'eau (varouna), la terre (bhoumi), le vent (vâyou), ... Les premiers livres sacrés de l'hindouisme sont les Védas – le mot "véda" voulant dire "le savoir". La première partie de ces livres est constituée d'hymnes déifiant les éléments naturels.

La société hindoue, ayant évolué, a vu l'apparition d'une culture mythologique importante au Moyen-Âge avec la construction de grands temples et le culte des symboles (statues, images, diagrammes, ...). Malgré cette évolution, le rite védique du feu a été intégré dans la nouvelle forme d'hindouisme, et certains personnages de cette nouvelle forme de religion hindoue ont rajouté d'autres éléments de l'agriculture tels le culte de la vache et du vacher. La vache est devenue sacrée car elle représente la mère qui donne le maximum et prend le minimum. Le vacher est symbolisé par Krishna, le dieu champêtre par excellence, puisqu'on l'appelle aussi Gopâla (protecteur des vaches).

La religion et la science étant inséparables, l'hindouisme a donné naissance aussi à la médecine âyurvédique qui utilise toujours d'innombrables plantes de la nature.

De plus le symbolisme des formes et les couleurs des fleurs sont très importants dans l'hindouisme. On n'offre que des fleurs épanouies qui symbolisent l'épanouissement de notre personnalité ou des pétales de fleurs qui symbolisent nos pensées positives. La couleur jaune représente la lumière, le rouge la vie, le bleu l'infini, …

L'eau est aussi très présente dans l'hindouisme. Il n'y a pas de rituel sans eau et tous les cours d'eau sont sacrés, les plus connus sont bien sûr la Gangâ et la Yamouna.

La Terre est considérée comme une Déesse dans l'hindouisme. Il y a une histoire mythologique qui raconte que le fils de la Terre a tellement abusé d'elle qu'elle est allée voir Brahma, le Créateur, pour rétablir l'équilibre. Mais Brahma est la fonction de création, c'est Vishnou qui est la fonction de préservation. Nous sommes les fils de la terre et par notre égoïsme, nous la détruisons. Mais la nature rétablira l'équilibre tôt ou tard, selon l'hindouisme.

Une grande majorité d'agriculteurs réunionnais est hindoue. Leur engagement dans l'agriculture et l'élevage ainsi que dans la transformation des produits est une réalité locale.

Quelles sont les pratiques alimentaires spécifiques à votre religion et en quoi consistent-elles ?

S.A. - La vache étant sacrée dans l'hindouisme, les Hindous ne consomment pas de viande bovine et bien souvent porcine aussi. Par contre, les sacrifices d'animaux (boucs et coqs) étant dans la tradition populaire hindoue locale, ces viandes sont bien sûr consommées avec un ensemble d'épices appelé "massalé".

Beaucoup de gens tendent à devenir végétariens mais ils ne constituent pas la majorité.

L'hindouisme s'adapte à son époque car il n'a jamais été une religion figée. En Inde, certains Hindous recommencent à manger du bœuf car à l'époque des Védas, les Hindous n'étaient pas forcément végétariens.

Comme dans beaucoup de traditions anciennes, un dicton déclare "si on coupe un arbre, il faut en planter trois !" Les rites hindous sont gourmands en fleurs, plantes et fruits variés. De ce fait, ils contribuent à la préservation des espèces. Le yoga, sous son aspect hindou, recommande le bio, bien sûr. Certains textes sacrés hindous, dont la Bhagavad-Gîtâ, recommandent certaines formes de nourriture, non seulement en qualité mais aussi en quantité. Ils préconisent de ne remplir l'estomac que d'un tiers, un autre tiers pour l'eau et un autre tiers d'espace pour la digestion.

 

Comment votre religion a-t-elle évolué ces dernières années notamment sur les questions de bioéthique (santé, OGM) et de biodiversité ?

S.A. - Malheureusement, les principes et la réalité sont souvent différents. La surpopulation mondiale amène la destruction de masse des espèces de toute sorte. Le problème se situe à ce niveau principalement : l'homme toujours insatisfait, veut toujours quelque chose de neuf. Là où les traditions orientales parlent de plénitude "intérieure", l'homme ne la recherche que dans le monde matériel.  Le matériel et le spirituel ont chacun leur place respective, mais la disproportion de matériel amène l'humanité à la destruction de son environnement. 

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« Tout va trop vite et l’humain perturbe le cycle naturel de la vie »

Publié le par Michel Monsay

« Tout va trop vite et l’humain perturbe le cycle naturel de la vie »

Directeur depuis 25 ans de l’Institut européen de bouddhisme tibétain, Joseph Serra, 59 ans, a été aussi vice-président de l’Union bouddhiste européenne. Il s’est toujours employé à développer le dialogue interreligieux et celui entre la science et la spiritualité. Parallèlement, ingénieur diplômé et professeur agrégé en génie civil, il s’investit aujourd’hui dans l’éducation à l’environnement.

 

Quelle est la relation de votre religion avec l’agriculture et l’environnement ?

Joseph Serra - Comme pour tout humain, être concerné par l’environnement n’est apparu qu’avec l’essor récent et sans précédent de l’industrie et de la technologie. Aujourd’hui l’humanité consomme près de 1,4 planète, plus que ce que la planète ne peut régénérer. Sa Sainteté Sakya Trizin, grand maître bouddhiste tibétain, a écrit une prière « La crise écologique : une prière souhait » dont voici quelques extraits :

« A cause d’une énorme quantité d’actions dégénérées, l’avidité extrême de certains convoite les ressources du monde. Les arbres et les forêts sont coupés, ce qui déséquilibre l’élément eau et les pluies. … D’innombrables usines produisent des nuages de fumées qui polluent l’air et causent des maladies sans précédent…. La protection naturelle de la couche d’ozone se perce et des maladies de peau incurables apparaissent. Les conséquences de puissants désirs inassouvis risquent de transformer rapidement ce monde en désert… »

L’une des menaces des plus sérieuses est celle de l’alimentation. L’agriculture et l’élevage y sont liés. Avec l’arrivée de la chimie dans l’histoire récente de l’agriculture conventionnelle, les engrais ou fertilisants ont fait leur apparition. La poussée des blés et des herbes a conduit à l’apparition des désherbants. Or sans oligo éléments, le sol est déséquilibré et le champignon progresse plus vite vers la graine avec des blés plus courts. Les fongicides font leur apparition. Les insectes se retrouvent dans un environnement dévitalisé et se rabattent sur le blé, d’où les insecticides. De plus, dévitalisés à 90%, les sols se mettent à mourir. Aujourd’hui, 40% des sols arables de la planète sont ainsi dégradés.

L’élevage industriel présente pour les bouddhistes une double difficulté. D’une part on en a besoin biologiquement pour notre santé, et d’autre part un être vivant nous donne sa vie créant un lien karmique (une sorte de dette).

La transformation des produits rend l’humain malade. Comment en effet rester en bonne santé sans vitamines, antioxydants etc. ? Sans compter tous les poisons, adjuvants et même nanoparticules, inconnues du grand public, que nous ingérons sans cesse.

                                                              

Quelles sont les pratiques alimentaires spécifiques à votre religion et en quoi consistent-elles ?

J.S. - Nous recommandons le régime végétarien. Mais chacun est libre. Pour certains jours du mois ou durant certaines cérémonies, nous avons également des pratiques de jeûne. Il s’agit par exemple de ne plus manger après le déclin du soleil jusqu’au lendemain. Bien entendu, il ne faut pas en profiter pour se gaver à midi en prévision !

 

Comment votre religion a-t-elle évolué ces dernières années notamment sur les questions de bioéthique (santé, OGM) et de biodiversité ?

J.S. - Il est très difficile d’être informé de la réalité. Le grand public ne sait pas que les OGM récents sont de deux sortes : ceux qui produisent leur propre insecticide comme les BT et ceux qui y résistent et donc les absorbent. Ces poisons se retrouvent dans notre alimentation.

Il y a plutôt consensus pour considérer que les manipulations génétiques sur les végétaux et les animaux ne sont pas suffisamment empreintes de raison et de sagesse. Tout va trop vite et l’humain perturbe le cycle naturel de la vie. Aujourd’hui le rythme de disparition des espèces est multiplié par près de 1000 ! L’humain, au sommet de la pyramide, est donc menacé.

Je doute que les prières pour la nature, pour la paix, même si elles sont nécessaires, restent suffisantes, puisque les dégradations se poursuivent.

Si la prise de conscience mondiale est une excellente chose, n’est-ce pas à ceux qui ont produit ces problèmes d’en trouver aussi les remèdes ?

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« Le protestantisme porte une attention renouvelée à l’usage des aliments, au respect des animaux, au refus du gaspillage »

Publié le par Michel Monsay

« Le protestantisme porte une attention renouvelée à l’usage des aliments, au respect des animaux, au refus du gaspillage »

Nommé depuis un an à la présidence de la Fédération protestante de France, le pasteur François Clavairoly, 57 ans, est un des artisans de l’union en 2012 des églises réformées et luthériennes en France. Théologien de formation, il est très attaché à l’œcuménisme et au dialogue interreligieux.

 

Quelle est la relation de votre religion avec l’agriculture et le monde rural ?

François Clavairoly - Le protestantisme en Europe comme en France a été très longtemps lié au monde rural. Son implantation géographique dans notre pays, même en dehors de ses régions de prédilection comme les Cévennes, le Poitou, la Thiérache, la Drôme ou le Vivarais, a cependant considérablement évolué ces 60 dernières années. L’exode rural, l’apparition de grandes agglomérations autour des métropoles, et surtout les mutations des modes de production de l’agriculture elle-même ont bouleversé le paysage. Le Mouvement d’Action rurale (MAR), un mouvement de réflexion économique et théologique porté par des agriculteurs et des spécialistes membres des Eglises protestantes, a accompagné durant toute cette période la réflexion des Eglises et du monde paysan protestant.

 

Quelles sont les pratiques alimentaires spécifiques à votre religion et le regard sur les modes de production et de consommation ?

F.C. - Le message de l’évangile ouvre tous les possibles en matière de recherche, d’innovation, de production et de consommation. Les premiers mots adressés à l’être humain, en forme de vocation, à savoir ces deux impératifs « croissez et multipliez », appellent à la responsabilité et tracent les perspectives d’un avenir fait de richesse et de partage. L’interprétation exclusivement quantitative de ce que peut être la croissance a cependant conduit à une productivité néfaste, à bien des égards. Et la conscience dans le monde protestant de la difficile réconciliation entre agriculture et environnement oblige à opérer encore aujourd’hui des modifications dans les modes de production mais aussi de consommation. Tous les citoyens sont donc concernés par l’agriculture et pas seulement les agriculteurs. « La clef des problèmes écologiques (qu’il faut désormais regarder au plan mondial) est dans les mains des consommateurs. Se soucier positivement de l’alimentation, c’est donner une chance à une agriculture moins intensive, moins paradoxale. Pour respecter l’environnement naturel et culturel, l’’essor d’une agriculture régionale, plus paysanne, à mi-chemin entre le productivisme et le biologique est plus que jamais nécessaire », comme le note un document du MAR.

Sur un autre plan, il faut remarquer que s’’il n’y a aucun interdit alimentaire en protestantisme, il n’en demeure pas moins qu’une attention renouvelée est à porter :

- à l’usage des aliments au plan de leur production et de leur fabrication comme au plan de leur consommation

- au respect des animaux pour ce qui concerne l’élevage et le soin, de la naissance à la mort,

- au refus des gaspillages et, depuis quelques années déjà à une vision du monde portée par ce qu’on pourrait appeler une frugalité joyeuse, renonçant aux excès de consommation en tous genres qui mettent en cause les équilibres de la nature. L’engagement de la Fédération protestante de France à l’occasion de la conférence de l’ONU Paris Climat 2015 en témoigne. (cf. www.protestant.org).

 

Comment votre religion a-t-elle évolué ces dernières années notamment sur les questions de bioéthique ?

F.C. - La recherche scientifique s’inscrit dans le paysage juridique, politique, économique et éthique du pays. Les enjeux financiers de cette recherche engagent de nombreux secteurs d’activité.

La question posée est donc complexe. Il s’agit de tenir à la fois les exigences de la santé publique et de la liberté de recherche, d’encourager les innovations sans mettre en danger des secteurs d’activité directement impactés par ces innovations. Il s’agit surtout de ne pas laisser l’hubris humaine l’emporter, au nom des intérêts financiers, sur l’intérêt général. Dans une économie et donc une agriculture mondialisées, la régulation politique et l’engagement citoyen sont ici en première ligne.

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« Le judaïsme porte en ses racines bibliques les valeurs du monde rural »

Publié le par Michel Monsay

« Le judaïsme porte en ses racines bibliques les valeurs du monde rural »

Elu Grand Rabbin de France en juin dernier pour 7 ans, Haïm Korsia, 51 ans,  est aussi aumônier général des armées. Titulaire de nombreux titres universitaires dont un doctorat en histoire contemporaine, il est l’auteur de nombreux ouvrages porteurs d’un judaïsme ouvert et apaisé.

 

Quelle est la relation de votre religion avec l’agriculture et l’environnement ?

Haïm Korsia - Au début de son histoire, le peuple hébreu était essentiellement nomade et tirait sa subsistance de l’élevage des ruminants. Ainsi s’est forgée une relation très particulière avec le monde animal, empreinte de respect pour ces êtres, création du Tout-Puissant. C'est le sens de la mission que l’Eternel confie à Adam : travailler la terre et la conserver, dans sa diversité minérale, végétale et animale. Le berger de la bible est aussi porteur de valeurs humaines plus égalitaires, loin d’une société sédentaire qui hiérarchise les hommes et élève la possession au rang de valeur absolue. De nombreuses lois bibliques s’appliquent au monde de l’agriculture et de l’élevage, et ces lois sont toujours aujourd’hui respectées sur la terre d’Israël.

L’agriculture, pilier économique du royaume d’Israël dans l’Antiquité, devient source et modèle d'une certaine justice sociale. Le paysan n’est pas propriétaire de la totalité des récoltes mais doit en céder une part, certes faible, aux indigents (Lévitique XIX, 9-10). Ce rapport à la terre permet aussi l’apprentissage de la notion de reconnaissance envers le Créateur et relativise le lien entre le propriétaire et la terre ou les troupeaux possédés.

La terre elle-même fait objet d’un grand respect qui se traduit par la loi de la jachère (tous les 7 ans). La terre n’est pas un simple moyen de subsistance, exploitable à souhait et totalement épuisable ! Cette règle dite de Chemita est toujours respectée aujourd’hui moyennant quelques aménagements liés à l’agriculture moderne.

Imprégnés par les textes bibliques, les juifs ont toujours gardé ce lien fort à la Terre, témoin d’une conception digne et éthique de l’humanité et de la foi en le Créateur. Le judaïsme porte ainsi en ses racines bibliques les valeurs du monde rural.

 

Quelles sont les pratiques alimentaires spécifiques à votre religion et ont-elles évolué avec le temps ?

H.K. - Les règles alimentaires (cacherout) sont nombreuses. Révélatrices du rapport de l’Homme à la chose matérielle, ces règles ont une vocation identitaire et culturelle.

Ainsi parmi les mammifères, seuls les ruminants ongulés sont consommables. Les oiseaux appartenant aux familles des gallinacés, anatidés et colombidés sont seuls consommables. Ces animaux sont abattus rituellement. L’abattage rituel, pourtant si décrié aujourd’hui, a vocation à réduire la souffrance animale, comme l’écrit le Pr. Temple Gradin (Université du Colorado).   

Enfin, les poissons portant écailles et nageoires (téléostéens) sont aptes à être consommés. Tout autre animal est interdit. Seules les productions des animaux dits casher (aptes) sont consommables (lait, œufs….) à exception du miel. Tout produit, matière ou graisse d’origine animale, est proscrit.

Si les règles de base sont immuables, l’évolution de l’industrie agroalimentaire a nécessité une adaptation des habitudes de consommation. Ainsi la surveillance casher s’est étendue à la quasi-totalité des produits manufacturés. Le développement de certaines denrées labélisées casher va connaître un grand essor, avec la présence de logos facilement reconnaissables.

Une production particulière de fromage casher se développe pour éviter les présures d’origine animale. Le vin fait également l'objet d’une attention particulière. Boisson sacrée, le vin doit être surveillé pendant tout le temps de sa production, de la mise au pressoir jusqu’à la mise en bouteille.

 

Comment votre religion a-t-elle évolué ces dernières années notamment sur les questions de bioéthique (santé, OGM) et de biodiversité ?

H.K. - La santé et la bioéthique sont des préoccupations majeures du judaïsme. A cet égard, tout progrès en matière d'hygiène est accueilli avec enthousiasme.

La crise de la vache folle a été particulièrement significative. La transformation d’herbivores stricts en carnivores gavés de farine animale a mené à une catastrophe sanitaire sans précédent. Il a été prouvé alors scientifiquement que l’abattage rituel fut plus protecteur que l’abattage avec étourdissement préalable utilisant le pistolet à tige perforante.

Dans le domaine des OGM, le monde rabbinique ne s'est pas encore véritablement prononcé. Il existe certes une interdiction stricte de mélanger ou de greffer des espèces végétales différentes (Traité Kilaim michna 7) ou d’accouplement d’espèces animales différentes. Toutefois, dans le domaine génétique, la question demeure. Il sera essentiel de suivre l’évolution des données scientifiques, notamment l’impact des OGM sur la santé humaine.

Quant à la biodiversité, elle est un témoignage magnifique de l’existence du Créateur. Comme il est écrit « L’Eternel prit l’homme et l’établit dans le jardin d’Eden pour le travailler et le conserver » (Genèse, II, 15), l’homme a le devoir de préserver son environnement. Toute disparition d’espèce animale ou végétale doit être vécue comme un drame !

Transmettre ce patrimoine biologique à nos enfants est une mission essentielle pour nous tous. Sachons être à la hauteur de cette noble tâche !

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