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Nestlé en cuisine

Publié le par Michel Monsay

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Petit poisson deviendra grand

Publié le par Michel Monsay

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« L’Occident n’a pas d’antiterrorisme au sens strict »

Publié le par Michel Monsay

« L’Occident n’a pas d’antiterrorisme au sens strict »

Eminent spécialiste en criminologie, domaine dont il est professeur au CNAM de Paris, à New-York et à Pékin, Alain Bauer a été consulté par tous les ministres de l’Intérieur depuis les années 1980 jusqu’à aujourd’hui, après avoir été conseiller du Premier Ministre Michel Rocard. Il intervient dans de nombreux pays comme conseil de gouvernement, de services de police ou de renseignement, et a écrit une cinquantaine d’ouvrages sur les questions de sécurité et de terrorisme.

 

Les attentats de Paris vont-ils changer la donne en matière de contrôle aux frontières ?

Alain Bauer - Dès le lendemain des attentats, le Président de la République a annoncé que les frontières seraient mieux contrôlées, ce qui était déjà prévu dans le cadre de la COP 21, mais il est impossible de totalement les fermer. Pour mémoire, la France occupée par les nazis réussissait quand même à avoir des interstices pour laisser passer armes et résistants. L’Europe avec la chute du Mur de Berlin, en 1989, pensait que le monde n’était plus composé que de Bisounours. Nous avons alors supprimé nos frontières intérieures et sous-traiter nos frontières extérieures à des pays qui n’en avaient pas les moyens. La libre-circulation est un confort pour temps de paix, aujourd’hui il faut savoir ce que l’on veut et être cohérent. Soit contrôler les frontières en aidant massivement les pays de première ligne, soit les fermer, soit réduire Schengen aux Etats capables de tenir leurs frontières, soit continuer la libre-circulation et accepter que des terroristes en profitent aussi.

 

Que sait-on exactement de l’Etat islamique et peut-on en venir à bout ?

A.B. - L’Etat islamique (EI) est une structure entièrement construite autour des anciens de l’armée de Saddam Hussein, une sorte de sainte alliance des sunnites qui se bat d’un côté contre les chiites majoritaires en Irak et de l’autre contre les kurdes. Leur objectif initial était de faire payer aux américains le retour de l’Iran chiite sur la scène internationale. L’EI a eu dès le départ le soutien des monarchies sunnites du Golfe et l’alliance des tribus locales irakiennes. En prenant Mossoul en juin 2014, ils ont récupéré beaucoup d’armes, d’argent et se sont autonomisés avec la ressource régulière du pétrole et tous les trafics possibles. Il s’agit bien aujourd’hui d’un Etat avec un territoire à cheval sur la Syrie et l’Irak, une organisation, des ministères, une monnaie qui est le dinar en or, un système de communication et une armée mercenaire d’environ 50 000 soldats. Mais la guerre n’est pas un jeu vidéo où des avions à des milliers de km de la France envoient des bombes sans que personne ne réponde, elle n’est pas à sens unique. Une fois que l’on a décidé, malgré les mises en garde de l’EI, qu’on doit intervenir sur le terrain Irakien, puis Syrien, pour abattre l’Etat islamique, il faudra des moyens considérables, aider les kurdes, l’armée irakienne au sol, et retourner les tribus locales. Sans parler du problème des alaouites du Président Assad.

 

Quelle est votre analyse à propos du terrorisme perpétré en France cette année ?

A.B. - L’assassinat d’Hervé Gourdel en septembre 2014 en Algérie a été le premier avertissement de l’EI à la France à ne pas venir s’occuper de leurs affaires sans quoi nous le paierions très cher. L’EI lance des appels réguliers pour recruter des futurs combattants à venir sur leur territoire défendre le califat, tout en précisant : Si on vous en empêche, si vous n’y arrivez pas, alors attaquez les occidentaux chez eux. Le terrorisme a beaucoup évolué, nous sommes passés d’un terrorisme singulier, centralisé et étatique jusqu’en 1989 à des terrorismes de plusieurs niveaux : des terrorismes d’état ou régionalistes qui ont à peu près disparus, des terrorismes hybrides avec des « gangsterroristes », mi-criminels mi-terroristes, ils sont souvent sont très autonomes et n’hésitent à prendre des initiatives, avec comme prototype initial Khaled Kelkal en 1995, puis Merah, Kouachi, Coulibaly et beaucoup de ceux du 13 novembre. Le mode opératoire de ces terroristes est artisanal, souvent désordonné et extrêmement déterminé. Egalement des terroristes de proximité, « lumpenterroristes » au sens marxiste du terme, spontanés et peu prévisibles. Et même des terroristes honteux, incapables d’assumer leurs actes.

Les groupes terroristes d’aujourd’hui sont souvent des nébuleuses sans sommet. C’est une erreur d’analyse de penser qu’en supprimant le sommet, on atteint les organes vitaux. Malgré la mort de Ben Laden, ce qu’il reste de ce qu’on appelle improprement Al-Qaïda continue imperturbablement à lancer des opérations comme celle de Bamako le 20 novembre. Ce cycle terroriste que nous vivons, comme tous les autres qui l’ont précédé, prendra fin par une réponse politique au plan international. Il faut regarder ces événements en perspective dans un temps qui est naturellement long. Arrêtons d’être amnésique, nous vivons dans un univers marqué par l’immédiateté avec un cerveau qui fonctionne en mode Twitter, mais ce n’est pas le vrai monde.

 

Que faut-il changer dans le renseignement français ?

A.B. - Nous mettons trop d’individus dans les fichiers par précaution et sans hiérarchisation de dangerosité, alors que nous n’avons pas les moyens de surveiller tout le monde. Il faut changer la culture du renseignement intérieur. La France comme le reste de l’Occident, n’a pas de renseignement antiterroriste au sens strict, elle a du contre-espionnage et de la lutte contre le crime organisé. Dans ces deux métiers, le temps est votre allié pour remonter la filière, et le secret est une obligation pour ne pas affoler la cible et protéger vos sources. Dans l’antiterrorisme le temps est votre ennemi et il faut tout partager. Comme ce sont les mêmes services qui font tout, ils deviennent schizophrènes. Il faut donc des analystes pour mieux appréhender les problématiques de l’antiterrorisme. Le renseignement extérieur l’a bien compris, alors que l’intérieur commence tout doucement à le faire sous l’impulsion de Nicolas Sarkozy et Manuel Valls. Ce problème du renseignement français s’est concrétisé lors des attentats du 13 novembre avec un désastre au niveau de la prévention, et un extraordinaire succès à Saint-Denis avec des indicateurs, du terrain, de la coordination internationale et de l’échange d’informations.

 

Quelles sont les racines de cette radicalisation de jeunes français et que faut-il faire pour éradiquer le problème ?

A.B. - Ces français qui dérivent vers le djihadisme sont à la recherche d’un idéal, ils ont un problème d’identité entre deux cultures, ou pas de culture du tout, et une absence de reconnaissance. Pour devenir un héros, avant il fallait travailler, gagner de l’argent, être un chercheur, maintenant il suffit de passer à la télé. Ces jeunes qui veulent exister, utilisent l’élément majeur du terrorisme : la communication. Regardez Abaaoud, un terroriste sanglant qui avait sa page Facebook, et se montrait sur Youtube en paradant avec des cadavres attachés qu’il trainait à l’arrière de sa voiture. Il faut rétablir des règles avec des sanctions intégratrices et non éliminatrices à la fois dans l’Education nationale et dans la magistrature. Le laxisme généralisé dans la réponse à la délinquance amène des individus à se dire que tout est permis. Vous noterez qu’il y a eu de nombreuses perquisitions, dont beaucoup dans les espaces annoncés comme sensibles et aucune réaction d’hostilité, comme si enfin l’Etat faisait ce qu’on lui demande. C’est la démonstration que lorsque l’Etat revient, il est respecté, jusqu’à présent c’était une certaine lâcheté qui était le problème. Mais il faudra équilibrer le sécuritaire et le social, l’éducatif et le répressif à terme.

Tous ceux qui expliquent que la laïcité est une neutralité devraient relire la loi de 1905. L’Etat doit comprendre qu’il ne s’agit pas de séparation entre l’église et lui-même mais de libre exercice du culte sous le strict contrôle de l’Etat du point de vue de l’ordre public. Tout ce qui a été toléré par une République molle ne doit plus l’être, il y a des limites d’ordre public. Il faut réapprendre ce qu’a été la construction de la Nation dans toute sa diversité, et retrouver une colonne vertébrale à la République.

 

                                                                                  

Quelques repères

En plus d’être professeur de criminologie, Alain Bauer a été conseiller entre autre de la police de New-York après les attentats du 11 septembre, où il a contribué à créer un service de renseignement spécialisé dans l’antiterrorisme, qui est aujourd’hui encore unique en son genre. Il a également présidé des organismes publics de recherche stratégique, de réforme de la sécurité publique. Écrits en français, en anglais, en chinois et en italien, ses ouvrages font référence en la matière. A 53 ans, il est le seul professeur de criminologie en France.

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L’acharné de littérature

Publié le par Michel Monsay

L’acharné de littérature

Grand Prix du roman de l’Académie française pour « Les prépondérants », Hédi Kaddour a éclaboussé cette rentrée littéraire de son talent, que l’on avait découvert en 2005 avec « Waltenberg ». Professeur de littérature, poète, chroniqueur littéraire, ce cosmopolite a vécu plusieurs vies avant de devenir romancier.

 

Au moment de retrouver Hédi Kaddour chez Gallimard, son éditeur, il est impossible de ne pas évoquer ce qui s’est passé trois jours plus tôt dans les rues de Paris : « C’est la fin de notre déni, nous sommes passés de l’autre côté de quelque chose, il ne s’agit plus d’attentats, nous sommes en guerre. Il faut en finir avec cette idée que la guerre ne coûte rien, il va falloir que l’on se donne les moyens de réagir avec puissance en augmentant le budget des armées et de l’Intérieur, c’est-à-dire une augmentation des impôts. Ce serait un signe fort à envoyer à Daech. Nous avons besoin également d’unité nationale, de lucidité et de stratégie, tout en surveillant les dérives que ces événements peuvent provoquer. »

L’écrivain n’envisage pas de s’inspirer de cette actualité pour écrire un roman, il aurait l’impression de répéter ce que la presse a déjà écrit, et préfère la distance dans le temps pour créer une histoire, il cite pour cela Thomas Mann : « Le romancier est l’énonciateur murmurant de l’imparfait. »

 

Une reconnaissance unanime

Donné favori pour le Goncourt jusqu’à la dernière minute, Hédi Kaddour n’en est pas moins resté lucide d’autant qu’il est généralement méfiant vis-à-vis de ces vagues d’opinion. Pour Waltenberg, il n’avait été éliminé qu’à la dernière sélection du Goncourt 2005, et avait obtenu le Goncourt du premier roman. S’il reconnait avoir eu l’orgueil d’espérer être sur certaines listes des prix littéraires en septembre, il ne s’attendait pas à figurer sur quasiment toutes les sélections. En obtenant le Grand Prix du roman de l’Académie française, Hédi Kaddour a été touché d’être récompensé par cette grande maison, défenseur de la langue française qui lui tient tant à cœur : « Nous nous battons tous les jours contre la tyrannie des clichés, l’adjectif facile, la grande voix du « on », opinion la plus courante et la plus bête, qui s’empare de certains mots et nous oblige presque à les utiliser. »

Ses trois romans ont beaucoup bénéficié du soutien des libraires, et tout naturellement l’écrivain se fait un plaisir de répondre à leur sollicitation à Paris comme en province pour une séance de signatures, de lecture, d’autant qu’il aime aller à la rencontre du public. De même il ne rechigne pas non plus à aller défendre son livre dans des salons, festivals ou auprès des médias, dans l’intérêt de sa maison d’édition, qui durant plusieurs années publiait à perte ses recueils de poèmes.

 

L’art du roman

L’engouement des jurys littéraires, de la presse et du public pour « Les prépondérants » s’explique à ses yeux par le fait qu’il s’agisse d’un vrai roman avec toute la complexité que cet art requiert, et non une autofiction ou autre chronique : « Un roman est une œuvre de fiction avec la capacité à faire entrer le lecteur dans une forme de rêve éveillé, qui soit en même temps une composition de voix contradictoires avec un arrière-plan de réalité, et une orchestration de l’ensemble. Le mien est à la fois un roman d’aventures, de passions, et un roman où des mondes se confrontent, s’observent à des moments importants pour l’Histoire. »

C’est en compulsant des journaux américains des années 1920, qu’il a l’idée de faire débarquer une équipe de tournage hollywoodienne dans une société coloniale au Maghreb sous protectorat français. Cette arrivée des américains, en plus de troubler l’ordre avec des mœurs plus libres, du matériel moderne, apporte à l’auteur un regard de biais très intéressant dans ce face à face entre colons et colonisés. Si au départ, il voulait mettre en lumière les erreurs du monde colonial, assez vite en écrivant, ses personnages vont prendre le dessus pour laisser au final non pas un message péremptoire mais une voix plus diffuse, plus subtile. Le choix d’une ville imaginaire sans vouloir nommer le pays provient des souvenirs mêlés du romancier, entre son enfance tunisienne jusqu’à l’âge de douze ans avant qu’il n’intègre le lycée Henri IV à Paris, et plus tard ses treize années comme professeur coopérant de littérature au Maroc.

 

L’importance de l’Histoire

Son goût revendiqué pour les fresques aux nombreux personnages avec une toile de fond historique correspond pour lui à une forme de résistance : « Nous sommes tissés d’Histoire, mais nous vivons sous la pression d’un marché qui veut nous faire oublier le passé pour nous vendre des produits présentés comme nouveaux. C’est une forme d’aliénation, et l’un des meilleurs moyens de ne pas devenir un jouet du marché, de ne pas se faire dicter jusqu’à ses jugements esthétiques, est de travailler le lien avec le passé sous la forme d’une obligation de connaissances. » L’importante période de documentation qui précède l’écriture d’un roman lui permet de ne pas faire d’anachronismes, et de trouver des événements singuliers qu’il incorpore minutieusement à son histoire, sans que l’on sente la fiche de bibliothèque qui pourrait mettre un terme à l’illusion romanesque. Son style, fait de mots simples mis dans l’ordre juste, évite les métaphores faciles ou les rythmes artificiels pour se concentrer sur une forme de transparence qui donnerait juste à voir, à entendre, à sentir. Pour son prochain roman, Hédi Kaddour devrait en situer l’action aux débuts de l’empire romain : « J’ai eu à la fois envie de me replonger dans Virgile, mais aussi faire revivre ce monde que l’on est en train de passer par dessus bord avec la réforme de l’Education Nationale. »

 

Le poète devenu romancier

A 70 ans, malgré l’enthousiasme autour de ses romans, il n’a aucun regret de ne pas avoir commencé plus tôt à s’atteler à ce genre littéraire. Cela lui a pris d’un coup en revenant d’une promenade dans Paris en 1997, durant laquelle il prenait des notes pour un poème, il décide alors d’écrire un gros roman d’aventures. Mais c’est d’abord la poésie qui est entrée dans sa vie dès le début des années 1980 : « C’est un laboratoire de la création, du langage, une façon de travailler sur les mots extrêmement scrupuleuse. » Il est assez rapidement publié par la NRF de Gallimard et aujourd’hui encore même s’il n’écrit plus de poèmes, il est resté rédacteur en chef adjoint de la dernière grande revue de poésie en France, intitulée Po&sie. Ponctuellement, il a signé aussi des chroniques littéraires dans L’autre journal, Le Monde et Libération.

Durant l’écriture des Prépondérants, quelques romans l’ont accompagné comme Le hameau de Faulkner, L’acacia de Claude Simon ou Les possédés de Dostoïevski. Quant à la voix narrative, il s’est inspiré de celle des Deux anglaises et le continent,  le film de Truffaut : « Cette voix est un mélange de précision et d’humanité, de respect des personnages et de leur clair-obscur. »

 

Une vie d’enseignement

Hédi Kaddour est recruté par Normale sup au retour de sa coopération au Maroc, sans avoir été normalien mais en ayant été reçu major à l’agrégation de lettres. Il y enseigne la littérature de 1984 à 2006, tout en tenant un atelier de dramaturgie et un d’écriture : « Un cours d’agrégation comporte une pression incroyable, les élèves pouvant aller voir ailleurs s’ils jugent votre cours insuffisant. Michelet avait écrit à propos des grandes écoles comme Normale sup et de leurs élèves : Ils voyaient leur professeur inventer et ils allaient inventant aussi. C’est toujours présent aujourd’hui. » Malgré sa retraite auprès de l’Education Nationale, il continue d’enseigner occasionnellement pour la New-York University de Paris, de même à La chance aux concours, association qui prépare bénévolement des étudiants boursiers aux écoles de journalismes, comme le CFJ, où Hédi Kaddour a donné durant plusieurs années des cours d’écriture du reportage. Il considère avoir beaucoup appris au contact de ses élèves tout au long de sa carrière d’enseignant. Cette vocation est née en deux étapes, d’abord lorsque sa mère en lui lisant à voix haute Croc-blanc ou d’autres histoires lui donne le goût de la littérature, puis en classe de seconde lorsqu’il découvre l’existence d’un métier où l’on est payé pour lire des livres et en parler.

 

En quelques traits

Nomade et cosmopolite, l’écrivain parisien est toujours prêt à partir et se sent bien dans de nombreux endroits du monde. Son principal trait de caractère dans le travail est l’acharnement, mais dès qu’il le peut, après avoir longtemps couru et nagé, il aime aujourd’hui marcher et même lire en marchant : « Non je ne me prends jamais de poteau, je dois avoir un bon radar, sauf une fois je suis rentré dans l’historien René Rémond qui lisait aussi, cela nous a bien fait rire. »

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Admirable roman noir sentimental des années 1950

Publié le par Michel Monsay

Admirable roman noir sentimental des années 1950

Peu connu en France, cet écrivain américain décédé en 1985 a écrit 7 romans, des poèmes et des scénarios pour notamment Roberto Rossellini en Italie ou Fritz Lang à Hollywood. Gallimard a la riche idée de publier en France un autre de ses romans après « In love » il y a 4 ans, et d’en confier la traduction et la préface à Agnès Desarthe. Ecrit en 1958, « Une jolie fille comme ça » baigne dans une atmosphère désenchantée à la Raymond Chandler sans l’aspect polar mais avec la noirceur, une forme de désinvolture, une vision corrosive de la société hollywoodienne, le tout dans une écriture directe, d’une rare économie et au final implacable. Si l’on sent que le romancier connait bien cet univers hollywoodien avec toutes les illusions perdues qui l’entourent, c’est autour de deux personnages, très différents mais tous deux endommagés par la vie chacun à leur manière, qu’il bâtit son intrigue. Un scénariste new-yorkais proche de la quarantaine, travaillant quelques mois par an pour un studio hollywoodien, s’ennuie dans une fête qui s’étire en longueur. En sortant sur la terrasse pour contempler l’océan, il aperçoit en contrebas une jeune femme apparemment enivrée qui entre dans l’eau un verre à la main. Tout en avançant elle est déstabilisée par une vague, perd l’équilibre et semble se noyer. L’homme saute par-dessus la rambarde et court la secourir. Ambitions délaissées, rêves brisés par une réalité cruelle, arrangements avec la vie pour continuer d’avancer, ce superbe petit roman explore les sentiments, les contradictions des êtres à travers une relation venimeuse et envoûtante.

                                                                                                                     

Une jolie fille comme ça – Un roman d’Alfred Hayes – Gallimard – 167 pages – 17 €. 

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Charmante comédie douce-amère

Publié le par Michel Monsay

Charmante comédie douce-amère

Dramaturge américain de 76 ans, auteur de 70 pièces de théâtre, Israël Horovitz a eu besoin de nouveauté dans sa vie et s’est lancé le défi de réaliser un film. Pour cela il a adapté une de ses pièces, en parvenant à créer une vraie œuvre de cinéma sans que l’on ait l’impression de théâtre filmé. Ce passage derrière une caméra est aussi pour lui l’occasion de filmer Paris, qu’il aime tant, avec le charme suranné mais délicieux de la vieille ville et ses rues pavées, ses bords de Seine, ses hôtels particuliers, et avec en fond sonore une musique aux accents nostalgiques. Sous ses aspects de comédie légère, le film change progressivement de registre au fur et à mesure que les trois personnages principaux se dévoilent en laissant entrevoir des secrets douloureux. Pour les interpréter, le réalisateur s’est entouré de comédiens chevronnés aussi à l’aise dans les deux registres, qui apportent brillamment au film autant leur fantaisie que leur sensibilité. Un new-yorkais de 57 ans, qui vient de perdre son père, débarque à Paris pour prendre possession de son héritage, un superbe appartement dans un hôtel particulier du Marais avec un jardin tout aussi magnifique. La vieille dame d’origine anglaise de 92 ans qui y habite lui apprend qu’il s’agit d’un viager. Confrontation de deux cultures, secrets de famille, blessures enfantines, temps qui passe, ce film, tantôt avec humour tantôt avec férocité, réussit le difficile pari d’être en équilibre entre rire et émotion par la finesse d’écriture du dramaturge, l’élégance de la réalisation et la remarquable inspiration des interprètes.

 

                                                                                                                     

My old lady – Un film de Israël Horovitz avec Kevin Kline, Maggie Smith, Kristin Scott Thomas, … - Koba films – 1 DVD : 17,99 €.

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Pour en finir avec ce patriarcat et ce conservatisme abjects

Publié le par Michel Monsay

Pour en finir avec ce patriarcat et ce conservatisme abjects

Ce film restera comme l’une des plus belles surprises de l’année tant par son sujet, que par la manière de le traiter, la réalisation faite de sensualité et de fougue, et les jeunes comédiennes émouvantes de fraîcheur et de sincérité. Pour son premier long-métrage, la réalisatrice franco-turque de 37 ans nous emmène dans un village reculé et très conservateur de son pays d’origine, où les femmes sont encore totalement soumises à la toute-puissance masculine. Au-delà du pamphlet jamais caricatural contre le sort réservé aux femmes, dans ce village turc comme dans de nombreuses régions du monde, ce film d’une grande finesse, qui ne manque pas d’humour ni de souffle, laisse entrevoir des raisons d’espérer même si le constat présent est parfois dramatique. La cinéaste filme au plus près ses cinq héroïnes, sa caméra mettant en exergue leur beauté, leur espièglerie, leur détresse, mais aussi l’incroyable détermination de la cadette. C’est la fin de l’année scolaire dans une petite ville de Turquie, une jeune fille de 12 ans semble très attristée par le départ pour Istanbul d’une professeure. Elle rejoint ses quatre sœurs ainées qui décident de ne pas prendre le car et de rentrer à pied. En passant par la plage elles s’adonnent à des jeux puérils en toute innocence avec des garçons de l’école. Arrivées chez elles, leur grand-mère qui élève seule les cinq orphelines est déjà au courant par le biais d’une voisine de ce comportement immoral pour les mœurs locales. La joie de vivre des jeunes filles va vite être refroidie par la réaction de la grand-mère, mais surtout par la reprise en main répressive de leur oncle, qui reproche à sa mère d’avoir été trop laxiste avec elles. Cet admirable premier film provoque de nombreuses émotions qui nous font passer par tous les états, et voit la naissance d’une cinéaste possédant déjà un sacré talent et l’insoumission d’un mustang.

                                                                                                                      

Mustang – Un film de Deniz Gamze Ergüven avec Günes Nezihe Sensoy, Doga Zeynep Doguslu, … - Ad Vitam – 1 DVD : 19,99 €.

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Un piano touché par la grâce

Publié le par Michel Monsay

Un piano touché par la grâce

Dès les premières notes sur son piano, Louis Schwizgebel nous éblouit par sa virtuosité, qu’il accompagne d’une incroyable légèreté tout au long de ses deux merveilles de concertos composés par Camille Saint-Saëns en 1868 et 1896. On retrouve dans ces deux œuvres, toute l’élégance et le romantisme du musicien français, lui-même excellent pianiste, qui a su marier difficulté technique et musicalité. Pour les interpréter, Louis Schwizgebel, un des tous meilleurs jeunes surdoués du piano, il a tout juste 28 ans, lauréat de nombreux concours internationaux et qui se produit déjà dans le monde entier. Ce suisse de Genève, dont la mère est chinoise, vit aujourd’hui à Londres et a enregistré en deux ans des concertos de Beethoven, des sonates de Brahms et des poèmes musicaux de Ravel, Liszt et Schubert. Dans cet album consacré à Saint-Saëns, il livre une interprétation moderne et d’une rare fraîcheur, où il allie fougue et délicatesse avec une maestria remarquable. La partie orchestrale, spécialement dans le concerto n°5 dit « L’égyptien », est tout aussi somptueuse avec une légère influence orientaliste très inventive, que l’orchestre symphonique de la BBC met admirablement en valeur. L’enchantement que nous procure ce jeune pianiste, avec ces deux concertos assez différents mais tous deux grandioses, est l’un des plus grands bonheurs musicaux de cette année.

                                                                                                                      

Louis Schwizgebel – Concertos pour piano n°2 et 5 de Camille Saint-Saëns – Aparté – 1 CD : 16,99 €.

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Une pop-rock poétique époustouflante

Publié le par Michel Monsay

Une pop-rock poétique époustouflante

Cela fait plus d’un an qu’ils font parler d’eux par le biais de leurs concerts et d’un mini-album laissant entrevoir un univers, une originalité et un talent très prometteurs. Avec ce premier album complet, qui était attendu forcément avec impatience, Feu! Chatterton confirme son impressionnante capacité à faire cohabiter chanson française littéraire et pop-rock ambitieuse dans un ensemble cohérent et enthousiasmant. A l’image de la voix du chanteur à la teinte rétro, d’un élégant classicisme autant que d’une rare modernité, le groupe souffle cet étrange mélange de genres empreints d’un romantisme fiévreux. Cet album traversé d’ambiances et de tempos assez différents, qui nous transportent tant par sa rage que par sa douceur, est une merveille d’équilibre entre textes et musiques, les deux étant d’égale qualité. En plus d’une voix unique en son genre qui apporte beaucoup à l’identité du groupe, le chanteur leader écrit également les paroles avec une verve poétique et une puissance d’évocation remarquables. Les douze morceaux, d’une belle richesse musicale aux nombreuses influences, qui multiplient les ruptures de rythme, s’inscrivent dans une palette qui se réinvente constamment sous les doigts des quatre musiciens qui entourent le leader. Il s’agit bien là du groupe français le plus fascinant de la nouvelle génération, par l’exigence de ses créations qui magnifient la langue française tout en enchantant musicalement nos oreilles tout au long de cet album indispensable.

                                                                                                                      

Feu! Chatterton – Ici le jour (a tout enseveli) – Barclay – 1 CD : 13,99 €.

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L’Orient source d’inspiration inépuisable

Publié le par Michel Monsay

L’Orient source d’inspiration inépuisable

Couronné par le prix littéraire le plus convoité, le Goncourt, Mathias Enard rend un vibrant hommage à l’Orient dans son sixième roman avec ça et là des échos très mélancoliques qui renvoient aux exactions d’aujourd’hui en Syrie et ailleurs. Son Orient est celui qui a tant inspiré les plus grands musiciens, écrivains, peintres, savants et aventuriers occidentaux. Cet ancien orientaliste de 43 ans qui a énormément voyagé et vécu dans plusieurs pays du Moyen-Orient, tout en étudiant l’arabe et le persan, se sert de son impressionnante érudition en la matière pour nous emmener sur les traces de tous ces prédécesseurs partis découvrir l’ailleurs avec toutes ses différences et ses richesses. Roman foisonnant admirablement écrit, cette Boussole mêle avec virtuosité les souvenirs personnels du narrateur avec des diversions pertinentes plus ou moins approfondies mettant en scène tous ces prestigieux orientalistes. Un musicologue autrichien spécialiste de l’influence de l’Orient sur la création occidentale, reclus dans son appartement viennois, s’interroge à propos d’un texte que lui a envoyé de Malaisie par la poste sa chère et tendre amie, alors qu’il était sans nouvelles depuis plusieurs semaines. A cette occasion, il relit tous les documents qu’il a en sa possession écrits par cette belle et brillante universitaire orientaliste, amour inaccessible, voyageuse insaisissable, et se remémore les nombreux souvenirs qu’ils ont partagé en Orient, à Vienne ou à Paris. Touchante histoire d’amour, ce roman passionnant, qui bouscule les codes de narration, est truffé d’anecdotes historiques sur les plus grands créateurs et savants des trois siècles derniers. En plus de nous avoir rendus plus érudits une fois le livre refermé, Boussole donne un merveilleux coup de projecteur sur l’Orient, loin de l’image simpliste renvoyée par les médias.

                                                                                                                   

Boussole – Un roman de Mathias Enard – Actes Sud – 378 pages – 21,80 €.

Publié dans Livres

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