Palmarès 2017
Comme chaque année, je dresse un bilan de mes publications pour le plaisir de retirer le meilleur de l'année écoulée et s'y replonger le temps d'une lecture, d'une écoute ou d'un visionnage, mais aussi pour ceux qui n'auraient pas encore ressenti le bonheur de goûter à ces chefs-d’œuvres et à ces très belles rencontres, voici mes favoris de 2017, par rubrique et avec le lien vers l'article, sur lequel il suffit de cliquer :
Meilleur film 2017 : The lost city of Z
http://michelmonsay.over-blog.com/2017/03/fresque-romanesque-de-haute-volee.html
Meilleur DVD 2017 : Manchester by the sea
http://michelmonsay.over-blog.com/2017/04/un-drame-epoustouflant-de-retenue-et-de-maitrise.html
Meilleur disque 2017 : Camille
http://michelmonsay.over-blog.com/2017/06/de-la-poesie-a-l-etat-pur.html
Meilleur roman 2017 : Si rude soit le début
Plus belle rencontre 2017 pour un portrait : Catherine Deneuve
http://michelmonsay.over-blog.com/2017/05/le-cinema-passionnement.html
Plus belle rencontre 2017 pour une interview politique ou sociétale : Alain Duhamel
Photo la plus appréciée par les lecteurs en 2017 : L'atelier d'un charmant bricoleur sarde
http://michelmonsay.over-blog.com/2017/10/l-atelier-d-un-charmant-bricoleur-sarde.html
La rencontre de deux grands artistes
Pour la troisième fois, Mavis Staples a fait appel à l’excellent Jeff Tweedy, le chanteur et guitariste du groupe Wilco, pour produire son nouvel album et cette fois pour également l’écrire et le composer. Grande dame de la soul, la chanteuse américaine de 78 ans se voit offrir un écrin pour poser sa très belle voix chaude, grave et rageuse. Celle qui a côtoyé Martin Luther King dans les années 1960 a toujours été active dans le combat pour les droits civiques, d’autant plus aujourd’hui dans l’Amérique de Trump. Sur les 10 merveilleuses chansons que Jeff Tweedy a écrites, on y retrouve les courants musicaux naturels de Mavis Staples, la soul, le gospel, le blues, mais il emmène aussi la chanteuse vers des rythmes funk, rock ou folk. Cette osmose parfaite entre générations et univers musicaux différents se traduit aussi dans les textes, où les deux artistes ont voulu s’exprimer sur les fractures qui divisent leur pays. Ayant commencé sa carrière en famille avec les Staples singers, cette chanteuse de Chicago s’est trouvée en quelque sorte une nouvelle famille avec le leader de ce groupe originaire de la même ville, qui lui permet d’exprimer un talent que l’on déguste avec un grand bonheur.
Mavis Staples - If all I was was black - Anti - 1 CD : 14,99 €.
Ne pas se fier aux apparences
Lauréat du Prix Femina, ce roman captivant, tout à la fois dramatique, drôle, bouleversant, nous plonge avec une impressionnante minutie non dénuée d’humour dans le mystère d’un fait divers sordide perpétré en 1941 dans un château du Périgord. Le romancier de 53 ans qui en est l’auteur a commencé par puiser dans sa propre vie la matière de ses sept premiers écrits, avant de se passionner pour des personnages troubles et controversés ayant été au centre de faits divers. Il s’est donc glissé depuis quelques années dans la peau d’un enquêteur très scrupuleux à la recherche de la vérité dans des affaires judiciaires qui ont fait grand bruit. Remarquablement construit, son dernier roman réussit à nous faire ressentir des sentiments totalement opposés sur les personnages au fil des découvertes que fait l’auteur dans son enquête. En commençant et en finissant par une citation du Club des Cinq d’Enid Blyton, Philippe Jaenada fait preuve de légèreté, d’autant que les nombreuses digressions qui parsèment le livre vont dans le même sens, mais cela ne l’empêche pas de s’investir intensément dans cette énigme irrésolue. Le roman commence avec fantaisie dans une voiture que l’auteur vient de louer pour aller dans le Périgord à la recherche d’indices, de détails, sur les lieux et dans les archives de cette affaire. Très vite, nous faisons connaissance avec Henri Girard, le personnage principal, qui avant d’être considéré comme l’assassin a été un sale gosse selon certains dires. Le romancier nous entraîne dans une passionnante partie de Cluedo, en mettant en lumière très finement les erreurs et manipulations des policiers et magistrats qui ont instruits cette affaire, mais aussi un amour filial et paternel tout aussi surprenant qu’émouvant, et en écrivant à la manière d’un redresseur de torts le magistral portrait d’un homme rebelle et incompris.
La serpe - Un roman de Philippe Jaenada - Editions Julliard - 643 pages - 23 €.
Le disque incontournable de cette fin d’année
Son dernier album en date sorti il y a 4 ans, « Les chansons de l’innocence retrouvée », nous avait tellement emballés que c’est avec une réelle excitation que le nouveau était attendu. Une nouvelle fois, Etienne Daho à près de 62 ans nous offre une superbe collection de chansons, plus rock que par le passé, assumant ici un univers musical qui l’a toujours fasciné mais auquel il n’a jamais vraiment osé se frotter. Il n’abandonne pas pour autant les ambiances pop qui le définissent et ont fait son succès, leur apportant une touche de psychédélisme envoûtant sur des envolées qui trouvent leur inspiration dans les années 1960-70. La poésie vénéneuse de ses très beaux textes alterne une certaine légèreté face aux dangers de notre époque, ou à cette éternelle quête d’amour qu’il chante depuis plus de 35 ans. Cependant, plusieurs des 12 morceaux du disque sont imprégnés d’événements dramatiques, comme sa péritonite qui a failli lui couter la vie, la mort de sa sœur, les attentats terroristes ou la guerre dans le monde. Enregistré à Londres où il vit en partie, ce magnifique album qu’il chante de sa voix douce si reconnaissable est à la fois un acte de résistance, d’espoir, un voyage musical d’une grande richesse qui nous fascine de bout en bout et à ne manquer sous aucun prétexte.
Etienne Daho - Blitz - Mercury Music - 1 CD : 15,99 €.
Un réalisme sidérant
Depuis 17 ans, Christopher Nolan impressionne par sa virtuosité et sa capacité à nous proposer tous les deux ans des grosses productions hollywoodiennes d’une qualité irréprochable, tout en bousculant les codes. De Memento à Interstellar, le cinéaste anglo-américain de 47 ans est devenu un maître du suspense, en ayant l’art de clouer le spectateur sur son siège sans aucun répit, et Dunkerque le confirme plus que tous ses autres films. De la première à la dernière minute il installe une tension qui nous laisse entrevoir ce qu’ont vécu les 400 000 soldats acculés à la mer par l’armée allemande en 1940, d’autant que la mise en scène magistrale et la reconstitution plus vraie que nature sans quasiment aucuns effets spéciaux laissent sans voix. D’ailleurs point besoin de parler, peu de dialogues dans cet impressionnant film de guerre pas comme les autres, avec un ennemi invisible, mais un son omniprésent qui contribue au même titre que l’image à nous plonger dans cet enfer sous trois angles différents, sur terre, dans les airs et sur mer. Le film démarre sur six soldats anglais qui marchent dans les rues désertes de Dunkerque. Subitement, des tirs allemands fusent et un seul parvient à s’en tirer. Avec l’aide de soldats français qui le couvrent, il arrive à l’immense plage où 400 000 hommes attendent de pouvoir embarquer pour l’Angleterre. Que ce soit le thriller, le film de super-héros, la science-fiction ou la guerre, chaque fois que ce grand cinéaste touche un nouveau domaine, c’est pour y laisser une œuvre majeure qui fera date.
Dunkerque - Un film de Christopher Nolan avec Fionn Whitehead, Mark Rylance, Tom Hardy, … - Warner Bros - 1 DVD : 19,99 €.
Un choc émotionnel inoubliable
Depuis sa présentation au Festival de Cannes en mai dernier, dont il a obtenu le Grand prix, jusqu’à sa sortie en salles à la fin du mois d’août, ce film admirable a bouleversé tous les spectateurs qui ont eu le bonheur de le voir. Le cinéaste de 55 ans qui en est l’auteur, et dont ce n’est que le troisième long-métrage, est par ailleurs scénariste et monteur notamment de Laurent Cantet. Il a été membre d’Act Up au début des années 1990, période à laquelle il situe son film et où cette association militante a réussi par ses actions spectaculaires à réveiller une société indifférente à tous ces malades qui mourraient du sida. Tout au long d’une structure narrative remarquable, Robin Campillo entremêle le drame intime au mouvement collectif, dans une mise en scène directe, percutante et d’un réalisme qui donne au film une puissance brute sans artifice ni racolage sentimental. Les comédiens sont tous impressionnants de justesse et d’implication, d’autant que les personnages écrits par le cinéaste sont plus vrais que nature. Le film s’ouvre sur une réunion de l’Agence française contre le sida qui est interrompu par des membres d’Act Up venus alertés les pouvoirs publics de la lenteur de leur action. Le lendemain, avant le début de la réunion hebdomadaire de l’association, un des membres explique à quatre nouveaux le fonctionnement et la raison d’être d’Act Up. Indiscutablement l’un des tous meilleurs films de l’année 2017, cette œuvre essentielle restera la référence sur les années sida et cette jeunesse qui s’est retrouvée condamnée à mort par amour.
120 battements par minute - Un film de Robin Campillo avec Nahuel Pérez Biscayart, Arnaud Valois, Adèle Haenel, … - Memento films - 1 DVD : 19,99 €.