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La consécration d'une grande romancière féministe et sociale

Publié le par Michel Monsay

La consécration d'une grande romancière féministe et sociale
La consécration d'une grande romancière féministe et sociale

Le hasard fait bien les choses, hier je disais le plus grand bien de L'événement, le film d'Audrey Diwan adapté du livre d'Annie Ernaux, et ce 6 octobre restera le jour où pour la première fois une française s'est vue décerner le Prix Nobel de littérature. Se raconter, finement, précisément, à la première personne, pour finalement dévoiler des mécanismes collectifs, c’est l’œuvre puissante, féministe et universelle, qu'a bâtit depuis 1974 Annie Ernaux, et qui vient d'être honorée par la plus prestigieuse récompense internationale. Ce Prix vient s’ajouter aux multiples autres venus saluer son œuvre remarquable, inaugurée en 1974 par Les Armoires vides. Ont suivi notamment La Femme gelée (1981), La Place (1983), Une femme (1987), Passion simple (1992), La Honte (1997), L’Événement (2000), L’Occupation (2002), Mémoire de fille (2016)… Jalons d’un chemin d’écriture qui a vu Annie Ernaux s’éloigner rapidement de la fiction au profit du récit personnel, jamais synonyme chez elle de complaisance ou d’épanchements narcissiques. Une trajectoire au cœur de laquelle brille sans doute d’un éclat particulier Les Années (2008), l’éblouissante autobiographie impersonnelle qui a fait définitivement taire les ultimes contempteurs d’une œuvre résolument sans afféteries et, pour cela, longtemps dénigrée avec une rare violence par l’arrière-garde machiste et académique de la critique littéraire, d’une écriture qui toujours s’est efforcée de tout nommer au plus précis, au plus simple, au plus cru, les actes, les corps, les émotions : « Je suis venue au monde pour cela, pour dire ce qui m’est arrivée. C’est difficile, c’est lourd, mais c’est un devoir. Mon devoir. Pour que d’autres puissent s’avouer peut-être : vous me donnez envie de parler de moi. C’est ça, le rôle de l’écriture, quand elle mérite de s’appeler littérature. Un rôle de purification, de catharsis. » Un geste littéraire paradoxalement aussi éloigné de l’autobiographie, telle qu’on l’entend habituellement, que de l’autofiction. « Je n’ai pas le désir de découvrir les zones d’ombre de ma vie », expliquait, dans le livre d’entretiens L’Écriture comme un couteau (2003), l’admiratrice de Proust et de Bourdieu, de Tchekhov et de Beauvoir, qu’est Annie Ernaux. Précisant : « Je me considère très peu comme un être unique, au sens d’absolument singulier, mais comme une som­me d’expériences, de déterminations aussi, sociales, historiques, sexuelles, de langages, et continuellement en dialogue avec le monde (passé et présent), le tout formant, oui, forcément, une sub­jectivité unique. Mais je me sers de ma subjectivité pour retrou­ver, dévoiler des mécanismes ou des phénomènes plus généraux, collectifs. » Annie Ernaux n’a jamais visé l’aveu, cherchant bien plutôt à atteindre ce ­qu’elle appelle « la valeur collective du “je” » : parler de soi pour tendre aux autres un miroir où se reconnaître et composer de livre en livre une autobiographie qui se confonde avec la vie du lecteur. C’est cette universalité, cette ascèse, son courage et son acuité clinique qu’ont décidé de distinguer les jurés du prix Nobel de littérature, intensifiant la lumière jetée sur l’œuvre féministe et universelle, puissante et sans complaisance de l’écrivaine, aujourd’hui âgée de 82 ans. Ses livres constituent à jamais une remarquable radiographie de l'intimité d'une femme qui a évolué au gré des bouleversements de la société française depuis l'après-guerre.

Publié dans Chroniques

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Un geste de cinéma esthétique et politique qui nous transperce

Publié le par Michel Monsay

Un geste de cinéma esthétique et politique qui nous transperce

Lion d'or à la Mostra de Venise 2021, une récompense amplement méritée à l'inverse de la Palme d'or de cette année, L'Événement est une œuvre qui affronte une douloureuse réalité avec un sens aiguisé du cinéma. En adaptant le roman autobiographique d’Annie Ernaux, Audrey Diwan signe un film percutant, sensible et engagé, avec en son centre la remarquable comédienne, Anamaria Vartolomei. La réalisatrice nous embarque dans une plongée à pic au cœur d’un conflit intime d’une violence inouïe, qu’une loi inepte a fait vivre à de nombreuses femmes françaises jusqu’en 1975, et que d’autres endurent encore aujourd’hui ailleurs dans le monde. Tout dans la facture de ce film tend à la sobriété, des décors à la lumière en passant par les couleurs, les costumes, maquillages et coiffures. En optant pour le format ramassé 4/3, qui focalise le regard, en plaçant sa caméra toujours à juste distance, et souvent au plus près du visage, de la peau, de la nuque de son actrice ; en structurant son récit tel un compte à rebours, Audrey Diwan réalise un tour de force : rendre organique, concret, palpable ce que représente le fait de mettre fin à une grossesse non désirée, et nous faire éprouver de l'intérieur ce que vit le personnage central de cette histoire poignante. La réalisatrice réussit un mélange rare de cinéma à la fois naturaliste et profondément sensoriel, quasi sensuel même, mais aussi politique dans cette France profondément patriarcale et régressive des années 60. Par le fil ténu de la pulsion de survie de son héroïne, le film, qui impressionne par sa maîtrise et sa puissance, emporte tout, au-delà des époques, et devient profondément universel.

A voir sur Canal + VOD pour 2,99€ ici ou sur Canal à la demande (pour ceux qui l'ont).

Publié dans replay

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Quand une mère s'émancipe et sort des codes de la bien-pensance

Publié le par Michel Monsay

Quand une mère s'émancipe et sort des codes de la bien-pensance

Dans un seule en scène, à la fois intime et très vivant, une femme, qui n’a plus l’âge de devenir mère, se retourne sur son passé. Son mari qu’elle aimait tant, n’est plus, et ses enfants se sont échappés, situation sans doute normale, mais toujours douloureuse. Anny  Duperey, solaire, touchante, pleine de grâce et d'humanité, se livre à une correspondance très personnelle sans fards ni tabou, parfois impudique. Elle écrit à ses enfants qu’elle voit de moins en moins. Elle tente de repousser les limites de l’âge, du naufrage inexorable de la vieillesse qui s’annonce.  « Mes chers enfants », c’est par ces mots que débute chacune de ses lettres qu’elle lit sur scène, mais qui n’attendent pas de réponses. La mise en scène évite intelligemment l'aspect routinier de cet exercice, notamment avec des belles images vidéos qui complètent avec à propos les lettres que la comédienne distille en jouant sur toutes les émotions avec sensibilité. Un charme fou, un très beau texte de Jean Marbœuf, c’est d'ailleurs touchant d’entendre les mots d’un homme sachant si bien parler de la femme, de la féminité, et de ses interrogations sur la vie qui passe, un parfum de nostalgie, une envie de liberté, une jouissance de ce qui reste de la vie. Ce sont les confidences d’une femme blessée qui ne sombre pas dans la dépression. Un être de chair et de sang qui se redresse à la faveur d’un changement de décor. La psychologie d’une veuve joyeuse, d’une femme secouée par la vie qui se rebelle contre le sort. Une réflexion sur l’amour, la liberté, les problèmes de société, la solitude, le temps de vivre, et puis tout près de nous, les migrants, sujet sur lequel Anny Duperey est vraiment crédible. D’ailleurs le texte est exactement fait pour elle, et donne à la comédienne un parfait écrin pour nous émouvoir et nous faire sourire. 

Mes chers enfants est à voir au Théâtre de Passy

Publié dans Théâtre

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Femme, vie, liberté

Publié le par Michel Monsay

Femme, vie, liberté

Une image bouleversante. La fille d’une des 83 victimes des protestations en Iran (Minou Majidi) s’est rendue sur la tombe de sa mère, la tête rasée et ses cheveux dans la main. Depuis la mort de Mahsa Amini le 16 septembre, une jeune femme de 22 ans morte pour une mèche qui dépassait de son voile, le soulèvement des femmes mais aussi des hommes partout en Iran ne faiblit pas et il est très difficile de prédire la suite de cette révolte, car la répression continue, le pouvoir ne reculant devant aucun meurtre. Parallèlement, il y a des manifestations prévues ce week-end dans 70 villes à travers le monde pour exhorter les pays occidentaux à sortir de leur mutisme et à refuser de laisser le peuple iranien se faire réduire au silence. L’ampleur des crimes est telle qu’il faut une pression internationale plus forte sur le régime. « La neutralité aide l'oppresseur, jamais la victime. Le silence encourage le persécuteur, jamais le persécuté. » Elie Wiesel

Très belle Une de Libération de lundi dernier.

Femme, vie, liberté

Publié dans Chroniques

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L'humour mordant et très bien vu de Chappatte

Publié le par Michel Monsay

L'humour mordant et très bien vu de Chappatte
L'humour mordant et très bien vu de Chappatte

Publié dans Chroniques

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