Émouvante histoire d'amour dans l'Italie ouvrière des années 70

Publié le par Michel Monsay

Émouvante histoire d'amour dans l'Italie ouvrière des années 70

Dans les années 1970, le cinéma italien était rouge sang. Engagé à gauche toute, empruntant autant à la comédie qu’au drame réaliste. Un vrai crime d’amour (1974) est une fable ouvrière cinglante, ancrée dans ces années de plomb, quand la misère endémique et la corruption politique infusaient les scénarios. Après son conte cruel L’Argent de la vieille, Luigi Comencini réalise une variation de Roméo et Juliette en pays ouvrier. Un vrai crime d'amour est un titre important quoique plutôt méconnu du cinéma italien des années 70, et l’une des grandes réussites de son auteur. C’est un film qui dépeint avec beaucoup de justesse la classe ouvrière, et la difficulté de s’aimer quand on travaille dans la même usine mais qu’on n’appartient pas au même bord idéologique et culturel, et qu’on est contraint à des horaires épuisants, de longs trajets pour se rendre sur son lieu de travail et des logements vétustes ou exigus. Stefania Sandrelli est bouleversante dans le rôle de Carmela, une immigrée sicilienne catholique, dans la banlieue industrielle de Milan, qui tombe amoureuse d’un ouvrier communiste et athée, interprété par Giuliano Gemma. Luigi Comencini adopte le ton d’une tragédie sociale, dans un film qui aborde le sujet central dans l’histoire italienne de l’immigration interne. Depuis la fin du XIXème siècle les populations pauvres et rurale du sud du pays se déplacent vers le nord industrialisé. Ces mouvements migratoires s’accentuent après-guerre, dans les années 50 et 60, et provoquent le déracinement d’une partie du prolétariat, employée dans les usines turinoises ou milanaise mais issue de Sicile, Naples ou la région des Pouilles. Le personnage de Stefania Sandrelli est victime de sa condition et des contradictions culturelles qui divisent l’Italie. Le film n’est pas seulement un témoignage sur l’exploitation des ouvriers. Il dénonce aussi le désastre écologique provoqué par l’industrialisation intensive, mais c'est surtout une tragédie intense, ponctuée de tendresse, mise en scène avec finesse et une profonde empathie par Luigi Comencini, un humaniste lucide, et donc désespéré.

Un vrai crime d'amour est à voir ici ou sur le replay d'Arte.

Publié dans replay

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article