Une petite merveille de poésie et d'invention

Publié le par Michel Monsay

Une petite merveille de poésie et d'invention

Le Garçon et le héron éblouit par la vitalité créatrice de son génial auteur octogénaire, Hayao Miyazaki, et se trouve être la synthèse complète de son univers toujours surprenant et profondément bouleversant. Le maître du film d'animation japonais n'avait pas réalisé de long-métrage depuis le beau et mélancolique Le Vent se lève en 2013, qui à l'époque avait été annoncé comme le point final de son œuvre cinématographique. Le récit s’inscrit dans un premier temps dans la réalité la plus difficile : la guerre, celle durant laquelle est né Hayao Miyazaki, et qui a irrigué la quasi-totalité de son œuvre. Elle frappe le personnage central de plein fouet, qui assiste à distance à la destruction de Tokyo par les bombardements de la capitale japonaise lors de la première moitié de l’année 1945, et par ricochet, à distance, à la mort de sa mère, hospitalisée et certainement annihilée par le déluge de feu américain, dans une séquence d’ouverture, qui suit la course effrénée du jeune garçon Mahito à l’intérieur du chaos, saisissante par sa force graphique et émotionnelle. Cette force que l'on retrouve tout au long du film, où Mahito, tel Alice aux pays des merveilles, glisse d’espace onirique en corridors fantastiques, et que l'on suit avec émerveillement. Le Garçon et le héron est le long-métrage d'Hayao Miyazaki qui a nécessité le plus de temps de travail, sept ans très exactement. Cette longue production témoigne bien du travail d'orfèvre du cinéaste et de ses exigences plastiques, qui atteignent ici des sommets après des années de maturation. Pendant près de deux heures, le film fait ainsi défiler quantité d'images subjuguantes, que ce soit des paysages désolés ou des fragments et détails particulièrement soignés. Le dessin est toujours aussi délicat, les couleurs vives et les idées foisonnantes et extravagantes. D'une technicité sans faille, cet artisanat animé à la main et à l’ancienne, dévoile toute sa grandeur et sa puissance de la première à la dernière image. On plonge avec ravissement dans cette poésie, cet imaginaire foisonnant d'une beauté rare qui compose ce conte d’apprentissage à portée philosophique, où le patrimoine culturel japonais est entremêlé de références occidentales. Harmonie contre chaos, retenue contre débordement, calme contre agitation : toute l’œuvre du maître de l’animation est présente dans ce superbe film, régi par ces oppositions de phases qui s’y déploient à chaque strate dans une éblouissante fantasmagorie.

Publié dans Films

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