Sommet pour la biodiversité : qui y croit ?

Publié le par Michel Monsay

Sommet pour la biodiversité : qui y croit ?

On fonce vers l’extinction de la vie sur Terre et on nous vante un « sommet pour limiter le désastre », voir « neuf jours pour sauver la vie sauvage » ? Qui peut croire qu’un énième barnum sur le climat ou sur la biodiversité peut inverser le cours de la débâcle environnementale ? Le congrès d’une « Union internationale pour la conservation de la nature » s’ouvre donc à Marseille. À lire les vagues propositions françaises – des « motions » pour la préservation des mammifères marins ou des vieilles forêts d’Europe – et les déclarations d’une secrétaire d’État à la biodiversité qui veut envoyer des « signaux forts » tout en rappelant, bien sûr, qu’« il y a le temps des acteurs économiques » et qu’« on ne peut pas renverser le modèle du jour au lendemain », on comprendra que le temps des vœux pieux se porte bien. Les 90 mesures du Plan biodiversité de 2018 étant surtout incitatives, c’est le contraire qui s'est produit : Des dizaines de projets d’extensions de zones commerciales et aéroports, un chèque en blanc accordé aux pratiques détruisant la biodiversité, comme la réintroduction en 2020 des pesticides néonicotinoïdes, alors que leur interdiction avait été prévue par la loi. Même quand le gouvernement prévoit de consacrer un (piteux) 0,25 % du plan de relance à la biodiversité, bien plus de moyens sont consacrés à un modèle qui la détruit partout en France. Un récent rapport de l’ONU chiffrait l’investissement nécessaire pour sauver cette planète à 3 % du PIB mondial ; on en est à 0,10 %. Pendant ce temps, la biodiversité du quotidien disparaît sous nos yeux, à une vitesse vertigineuse. Les espèces qui s’éteignent font des adieux trop discrets pour être entendus. Quant aux arbres, ils ne feront du bruit que quand ils nous tomberont dessus. Arrêtons-nous un moment devant un de ces gigantesques champs de maïs qui prolifèrent en France, destinés à l’alimentation animale. Écoutons le silence de ce champ. Aucune chance d’y entendre la moindre mésange ni le moindre chardonneret, les insectes ne sont pas là non plus, et n’allons pas inspecter le sous-sol, pas de risque d’y trouver un ver de terre. Le glyphosate fait son boulot. « La vie sauvage » a disparu. On ne peut pas « renverser le modèle du jour au lendemain », n’est-ce pas ? Si, on peut. En refusant ce que deux chercheurs allemands appellent « le mode de vie impérial ». En réfléchissant à chacun de nos actes de consommation. En s’engageant et en choisissant des représentants politiques qui pensent que, oui, on peut. Malheureusement il n'y en a pas tant que ça dans la longue liste de prétendants à la Présidentielle. Tant qu'il y aura des sommets comme celui-ci sans véritable contrainte pour changer les pratiques, on assistera impuissant à l’effondrement de la biodiversité et à la poursuite du dérèglement climatique.

Publié dans Chroniques

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