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Une volonté à toute épreuve

Publié le par michelmonsay

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En ayant été la première femme à traverser l’Atlantique et le Pacifique à la rame, mais aussi à accomplir un tour du monde à la voile en solitaire à contre-courant, Maud Fontenoy s’est forgée une solide réputation. Elle s’en sert aujourd’hui pour alerter et transmettre par sa fondation et ses autres fonctions, l’impérieux besoin de préserver les océans, ce capital indispensable à l’avenir de l’homme.

 

Investie totalement dans sa fondation, Maud Fontenoy travaille même le dimanche pour parvenir à satisfaire les obligations et sollicitations, que génère son engagement pour la sauvegarde des océans et du littoral, particulièrement à travers une sensibilisation de la jeunesse. Vivant aujourd’hui à Marseille, elle regroupe ses rendez-vous sur Paris et les enchaîne à un rythme soutenu, toujours avec le même souci de persuader son auditoire. Comme à la conférence où elle est intervenue lors de l’Université de la terre à l’Unesco, dont elle est porte-parole pour les océans, qui avait pour thème de bâtir une société nouvelle en agissant pour la nature.

Également vice-présidente du Conservatoire du littoral, toutes les fonctions qu’elle cumule vont dans la même direction, cela lui semble très important d’avoir cette cohérence et de ne pas aller là où elle n’est pas légitime. A la manière d’un Nicolas Hulot, on l'a vue sur France 2 l'année dernière dans des documentaires produit par Luc Besson, où elle était partie sur son bateau à la rencontre d’hommes et de femmes qui se consacrent à la mer : « Cela a démontré sur différentes destinations qu’en sauvegardant les océans, on sauvegarde aussi les hommes. »

 

L’Unesco et le CES

Auprès de l’Unesco, Maud Fontenoy contribue dès qu’elle le peut à mettre en avant l’action de la commission océanographique internationale, de cohésion entre les états pour assurer les surveillances des océans, notamment par rapport aux tsunamis : « Cette commission est en train de mettre en place des procédures pour faciliter les évacuations en cas de tsunami, et pouvoir ainsi les conseiller à différentes zones territoriales, comme la Méditerranée par exemple où il existe des risques de séismes donc de tsunamis. » Cette jeune femme déterminée s’implique aussi deux fois par semaine en tant que personnalité qualifiée de la section de l’environnement du Conseil économique et social. Elle travaille actuellement avec ses collègues sur l’analyse et l’identification des actions à mener pour protéger la biodiversité, et sur la sécurité des plates-formes pétrolières.

 

Les enfants au centre de son engagement

En 2008 Maud Fontenoy, qui œuvre déjà dans le cadre associatif depuis une dizaine d’années pour transmettre ses valeurs et sa passion de la mer à la jeune génération, décide de créer sa fondation  en mettant l’accent sur l’éducation : « On ne peut plus être sur un discours culpabilisateur et moralisateur concernant l’écologie. Il faut faire comprendre à tout un chacun que l’harmonie avec la nature est indispensable à notre bien-être. C’est aussi de l’innovation technologique et scientifique en inventant ce que sera demain et en créant de l’emploi. On parle toujours de coût pour préserver l’environnement mais Il faut savoir par exemple, que la pollution des eaux côtières et les maladies qu’elle engendre coûtent 12 milliards de dollars à l’économie mondiale. En plus de cela, la manne océanique représente un capital que l’on est en train de dilapider. »

Dès l’âge de 21 ans, elle s’investit notamment auprès d’enfants malades ou habitant les cités, avec le désir de s’adresser à ceux que l’on vient voir moins souvent. Son message à l’époque est déjà de les amener vers la nature et le dépassement de soi. Message qui prend toute sa dimension quelques années plus tard lors de ses différents exploits sur les océans, en proposant un projet pédagogique qui permet aux jeunes de suivre le parcours de la navigatrice tout en apprenant.

 

Une enfance à part

L’écriture a toujours été un plaisir pour Maud Fontenoy, autant pour faire partager ses aventures que pour défendre une cause. Cela a commencé très tôt avec les rédactions qu’elle envoyait durant sa scolarité entièrement suivie par correspondance. Son enfance est loin d’être banale, la petite Maud a tout juste une semaine que ses parents l’embarquent sur le bateau familial avec ses deux frères, où elle va vivre jusqu’à l’âge de 15 ans en naviguant à travers le monde. Elle en garde un souvenir paradisiaque : « On était en plein cœur de la nature dans une vie simple et sobre, empreinte de liberté et dépossédée des habitudes de la consommation courante. Cela m’a donné des vraies valeurs. Mes parents m’ont appris qu’il était important d’aller au bout de ses rêves, de ne pas trop s’écouter, de batailler, d’être digne et de donner du sens à ce que l’on fait. » Le moins que l’on puisse dire est qu’elle a mis ces préceptes en application.

Elle vit quand même l’expérience de la vraie école, à l’occasion de son année de terminale qu’elle passe en internat. Après avoir décroché son Bac, elle enchaîne avec deux années de droit avec l’envie d’être avocat ou juge pour enfant : « Je voulais combattre les inégalités, l’injustice, donner de la voix à ceux qui n’en ont pas, mais au bout de deux ans, je me suis rendu compte que les bancs de la fac étaient trop stables pour moi et que j’avais besoin d’autre chose. »

 

Impossible n’est pas Maud

Bien évidemment la mer lui manque, elle fait l’école des Glénans, continue à naviguer avec sa famille, et en parlant avec Gérard d’Aboville, le maître en la matière, se dit que traverser l’Atlantique à la rame pour une femme serait un défi intéressant. Ce n’est pas la seule motivation qui la décide, elle aime la simplicité de l’embarcation, un bateau à rames très proche de l’eau. Il y a aussi le goût de l’effort, qui est une caractéristique importante de sa personnalité, et la volonté : « C’est sûr qu’il faut des bras, des jambes, des mains, mais c’est votre tête qui vous fait tenir. Deux hommes qui étaient des armoires à glace ont tenté la même année cette traversée, et ils ont tous deux abandonné. Ce ne sont pas les gros bras qui font tenir, la difficulté est de vivre sur ce truc minuscule dans le noir et dans les vagues. »

Ce bouillonnement, cette énergie vitale incroyable, ce besoin de vouloir sans cesse se dépasser que possède Maud Fontenoy, vont la pousser à réussir la traversée de l’Atlantique à la rame en 2003, et deux ans plus tard, celle du Pacifique.

 

Une double victoire

C’est probablement cette force qui l’aide à surpasser l’épreuve d’un cancer du col de l’utérus qu’on lui annonce quelques jours avant le départ de son 3ème défi. Après ses deux exploits à la rame, elle revient à ses premiers amours en tentant un tour du monde à la voile en solitaire à contre-courant, ce qui est évidemment beaucoup plus dur. Comme il est hors de question d’abandonner ce projet qu’elle prépare depuis deux ans, elle se fait opérer en urgence et part avec l’angoisse d’avoir une hémorragie interne et l’inquiétude de savoir si elle pourra avoir un enfant un jour : « Le fait que toute mon énergie vitale était concentrée à réussir ce défi en mer, m’a peut-être aidée à combattre aussi la maladie. » Partie de l’île de la Réunion le 15 octobre 2006, elle boucle son tour du monde 5 mois plus tard après avoir démâté et réparé son bateau durant 4 jours à la limite de ses forces. Une fois de plus, elle est la première femme à réaliser un tel exploit.

Si elle reconnaît que la solitude est très difficile à vivre intellectuellement face aux difficultés sur le bateau, elle n’a jamais envisagé de relever autrement ses défis : « C’est un combat personnel, il faut se renforcer soi-même pour pouvoir ensuite aider les autres. »

 

Une page est tournée

Ces exploits appartiennent au passé de Maud Fontenoy, aujourd’hui à 34 ans elle veut continuer à relever d’autres défis, ceux de son engagement à travers sa fondation et ses différentes responsabilités. Ce n’est pas pour autant qu’elle arrêtera de naviguer, elle a d’ailleurs il y a trois ans traverser l’Atlantique sur son voilier avec son garçon de 7 mois. Lorsqu’on lui évoque la peur, elle explique que curieusement c’est plutôt un atout : « La peur est une des premières questions qui vient en tête devant un défi. On croit qu’elle est paralysante mais en fait elle vous permet d’être plus rigoureuse, disciplinée, préparée, on la range dans un petit coin pour bien faire attention à tout. »

 

Publié dans Portraits

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Une satire sociale sombre et jubilatoire

Publié le par michelmonsay

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On ne connaît qu’assez peu le romancier américain de 81 ans, E.L. Doctorow, et pourtant nombre de ses écrits, traduits en 30 langues pour certains, ont été adaptés au cinéma comme le superbe Ragtime par Milos Forman. Dans son dernier roman, il s’inspire d’une histoire vraie en rallongeant la durée de vie des protagonistes, afin de pouvoir traverser l’Histoire du XXe siècle américain et en souligner les dysfonctionnements. Par sa belle écriture imagée, l’auteur nous raconte avec émotion, drôlerie et noirceur, la vie de deux frères marginaux liés par un indéfectible amour fraternel, qui aura raison des nombreux obstacles et malheurs qu’ils rencontreront. Devenu aveugle peu avant d’avoir 20 ans, le frère cadet est le narrateur de ce récit qu’il démarre en relatant son adaptation à la cécité. Rapidement, il replonge au cœur de l’enfance des deux frères dans la grande maison bourgeoise familiale. Premiers émois amoureux, camps de vacances, vie insouciante, puis départ à la guerre du grand frère, décès des parents, et au retour de l’ainé qui a été gazé dans les tranchées de 14-18, la vie des deux frères bascule dans une autre dimension. Ce roman à la fois lumineux, burlesque et empreint d’une touche de mélancolie, bien que centré sur les deux frères, voit défiler une galerie de personnages très bien croqués.

 

 Homer & Langley – Un roman de E.L. Doctorow – Actes Sud – 229 pages – 22 €. 

 

Publié dans Livres

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Une voix capiteuse portée par une pop au délicieux lyrisme

Publié le par michelmonsay

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Depuis 7 ans qu’elle est apparue sur le devant de la scène, en étant la 1ère chanteuse française d’un prestigieux label britannique, Barbara Carlotti a rencontré un joli succès d’estime auprès de la critique. A près de 38 ans, elle signe un magnifique 3ème album qui la place aujourd’hui parmi les plus grandes artistes françaises, tant son talent déborde de ses 12 nouvelles chansons qui laissent sans voix. Justement la voix de cette chanteuse est tout à fait exceptionnelle, on pense sur certaines intonations à Barbara. Grave, caressante, mélancolique, parfois plus légère, sa voix nous bouleverse dès les premières notes et nous accompagne délicieusement tout au long de ce voyage dans lequel on replonge indéfiniment. Des voix comme celles-là sont rares, précieuses, et tellement plus vraies, vivantes, intenses que celles de ces pseudos stars ou similis chanteuses qui vendent pourtant des milliers d’albums. Ce superbe voyage que nous offre cette auteure, compositrice, interprète s’est construit tout au long de ses pérégrinations au Brésil, au Japon et en Inde, où elle est partie trouver de nouvelles inspirations et s’enrichir d’autres cultures. Pour sublimer les très beaux textes qu’elle a écrits, l’artiste a composé une envoûtante palette de pop aux accents autant symphoniques, qu’électroniques. Les compositions d’une savoureuse diversité, au même titre que l’écriture raffinée et la voix unique, participent à faire de cet album un événement incontournable de la chanson française.

 

 Barbara Carlotti – L’amour, l’argent, le vent – Atmosphériques – 1 CD : 12,99 €. 

 



Publié dans Disques

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Une richesse musicale et poétique époustouflante

Publié le par michelmonsay

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Après 20 ans d’une carrière où Dominique A s’est affirmé avec sa touche de mystère et d’étrangeté bien reconnaissable, comme le leader d’un mouvement majeur de la chanson française mêlant une grande exigence des textes et des musiques, voici un magnifique 9ème album, sans doute son meilleur. A 43 ans cet artiste si précieux dans le paysage musical parvient à une sorte d’aboutissement, en nous proposant 13 morceaux peut-être plus accessibles qu’auparavant, en tout cas d’une qualité, d’une fluidité, d’une émotion et d’une évidence incomparables. Dès les premières notes, la musique classique s’invite dans les compositions lumineuses de cet album, en venant côtoyer des accords rock, jazz ou de pop électronique. Cette alchimie qui fonctionne à merveille sur tous les tempos, voit se répondre ou se mêler avec un lyrisme et à travers des mélodies somptueuses, un quintet à vent composé d’une flute, d’une clarinette, d’un hautbois, d’un basson, d’un cor anglais, et une formation rock traditionnelle. L’autre atout impressionnant de cet auteur compositeur interprète, réside dans la richesse poétique de ses textes, parfois intimistes et quelquefois où il nous livre un regard éclairé sur les dérives de notre société, en nous invitant à sortir des villes stressées pour nous laisser porter par les bonheurs de la nature. En dehors des modes, avec sa voix toute en sensualité et en émotion, Dominique A nous offre un voyage inoubliable aux couleurs harmoniques tellement rares, que cet album restera l’un des moments phares de l’année.

 

 Dominique A – Vers les lueurs – Cinq 7 – 1 CD : 14,99 €.

Publié dans Disques

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« Nous devons arrêter cette loi de la jungle où on laisse importer à tout va contre nos producteurs »

Publié le par michelmonsay

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Paysan breton devenu urbain, Patrick Le Hyaric est un homme de convictions qu’il défend avec passion, autant dans les journaux L’Humanité et La Terre qu’il dirige, que dans son engagement politique. Député européen depuis 2009, à 55 ans il est aujourd’hui candidat pour le Front de gauche aux législatives, dans la circonscription d’Aubervilliers et Pantin en région parisienne.

 

Quelles premières mesures attendez-vous du Président Hollande ?

Patrick Le Hyaric - L’urgence est de répondre aux attentes de nos concitoyens en créant les conditions pour accroître leur pouvoir d’achat, avec une augmentation des rémunérations par un nouveau partage des richesses, et une diminution d’un certain nombre de coûts énergétiques et alimentaires. Pour ces derniers, il faut aller à la fois vers une meilleure rémunération du travail agricole, et contenir un certain nombre de prix alimentaires à la consommation en inventant de nouveaux mécanismes.

Par ailleurs, il faut entreprendre une réforme du secteur bancaire avec une modification du système de crédit, pour réduire l’endettement des agriculteurs, des artisans, des commerçants et des PME, afin de ne plus les asphyxier et maintenir l’emploi dans ces entreprises. Autre réforme structurelle à mettre en place, il est impératif d’arrêter de fermer les services publics, surtout dans nos campagnes si l’on veut stopper la désertification. Pour cela, nous devons sortir de la règle de la RGPP (révision générale des politiques publiques) en se dégageant des marges de manœuvres financières, avec une autre politique fiscale dont les recettes proviendraient plus du capital et moins du travail.

 

Le résultat de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle est-il satisfaisant et que peut-il augurer pour la suite, notamment aux législatives ?

P.L.H. - Le score de 11% réalisé par Jean-Luc Mélenchon dans le contexte actuel est un exploit considérable. En proposant le partage des richesses, une transformation du système démocratique, l’engagement dans une mutation écologique profonde, un changement des orientations des politiques européennes, il a rassemblé 4 millions d’électeurs et sans ces voix, François Hollande n’aurait pas été élu. Il serait bien qu’il y ait des représentants du Front de gauche à la direction des affaires du pays, cela signifierait un engagement vers une politique luttant résolument contre l’austérité et la crise, pour une réorientation de la construction européenne et qui sortirait du cadre actuel dans lequel se discute la réforme de la PAC.

Pour les législatives, il faut une majorité de gauche au parlement avec un pluralisme politique, comprenant des députés du Front de gauche qui garantiraient un vrai changement. S’il y a un risque d’élimination de la gauche dans une circonscription ou une possible élection d’un candidat du FN, l’ensemble des forces progressistes doivent se mettre d’accord dès le 1er tour pour éviter cela. Notre mouvement politique est en progression constante depuis que nous l’avons créé en 2009 aux élections européennes, et nous comptons bien continuer pour les législatives. A ce propos ma candidature a pour but de combattre notamment la perte de souveraineté des peuples et des parlements que nous subissons, en renforçant les rangs des députés qui feront tout pour que notre budget national ne soit pas décidé par le Président de la Commission de Bruxelles mais par nous-mêmes.

 

Que souhaitez-vous que la gauche mette en œuvre pour le monde agricole ?

P.L.H. - Nous devons arrêter cette loi de la jungle où on laisse importer à tout va, contre nos producteurs de fruits et légumes et de viande bovine. Il faut d’une part les protéger par un mécanisme de préférence communautaire contre la concurrence mondiale. D’autre part, rechercher des coopérations entre états voire continents et non entre multinationales, pour un respect des souverainetés alimentaires de tous les peuples dans le monde. Pour cela, l’OMC doit être beaucoup plus vigilante. Ensuite, des prix minima intra-communautaires à l’intérieur de l’UE doivent être mis en œuvre en réinventant les mécanismes de soutien public. En même temps sur le plan national, on pourrait mettre à l’étude un système de coefficient multiplicateur, qui interdirait aux intermédiaires comme les centrales d’achats de s’accaparer toute la valeur ajoutée de la production agricole, et de faire pression sur les prix à la production en important exagérément. On doit aussi favoriser l’installation des jeunes agriculteurs tant par les fonds structurels européens que par une politique nationale, dans une perspective de mutation environnementale de notre agriculture.

 

Quelles sont pour vous les priorités à l’échelle de la planète ?

P.L.H. - L’alimentation et l’eau sont les principales questions pour l’avenir de l’humanité. On ne règlera pas la question des migrations si on ne s’attaque pas aux questions de suffisance alimentaire. Certains peuvent faire des discours à courte vue sur les sans-papiers, mais ces gens-là ne viennent pas ici par plaisir mais parce qu’ils n’ont rien à manger. Il suffit de voir ce qui se passe au Sahel où les gens continuent de mourir de faim. Il faudrait de l’argent pour les sauver, mais au regard des dépenses militaires ou des sommes colossales que l’on a utilisées pour sauver les banques ce ne serait pas extravagant, et pourtant on ne le fait pas. Humainement on ne peut pas tolérer cela, pas plus que l’on peut accepter en France qu’un paysan avec un quota laitier de 900 000 litres soit au RSA. Pour l’un et l’autre, c’est le monde qui marche sur la tête.

 

Que représente aujourd’hui les journaux que vous dirigez et quel regard portez-vous sur le monde médiatique ?

P.L.H. - La Terre reste un journal de référence dans le monde rural avec une mission de médiation et de fédération pour faire revivre nos campagnes. L’Humanité porte aujourd’hui des choix de transformation structurelle de la société. Le journal est le confluent des débats d’idées de toute la gauche qu’elle soit politique, associative, syndicale ou des personnalités intellectuelles. Tous les journaux ont une orientation éditoriale, du Figaro à Libération en passant par La Croix ou Le Monde. Ils participent ainsi au débat démocratique et il faut les féliciter pour cela. A l’inverse, le système médiatique avilit le débat en découpant les phrases et les images en rondelles et en les passant en boucle, ce qui brouille totalement le message des politiques et fait perdre les repères. L’idée que les citoyens ne s’intéressent plus à la politique a été démentie durant cette campagne présidentielle, autant lors des primaires socialistes que lors des émissions de France 2 où les audiences ont été très fortes, ce qui est formidable pour la démocratie.

 

Quel pouvoir a le Parlement européen aujourd’hui et quel est votre sentiment sur l’austérité, la crise grecque et la croissance ?

P.L.H. - Le traité de Lisbonne donne au Parlement européen un pouvoir de codécision mais pas d’initiative. Par exemple pour la réforme de la PAC, nous avons un commissaire à l’agriculture avec lequel nous avons beaucoup travaillé, mais je sais qu’au bout du compte ce sera la Commission européenne et le Conseil européen qui imposeront leur vue. Il faut donc trouver un système plus démocratique. On sent bien au Parlement européen et un peu partout en Europe que l’on n’est plus dans une ligne d’austérité à tout prix. Tous les partis la prônant ont été rejetés lors d’élections locales et la victoire de François Hollande a contribué à débloquer la situation. Concernant la crise grecque, il faut arrêter le mémorandum de la Troïka (UE, BCE et FMI), donner de l’air à la Grèce, permettre à la banque centrale de prêter à 1% et congeler une partie de la dette, je pense que c’est une voie de sortie pour ne pas laisser la Grèce de côté.

Pour la croissance, il y a un débat intellectuel à avoir autour du terme de croissance pour définir comment on la conçoit. Si l’on fait de la croissance en augmentant la productivité du travail et la compétitivité, ce n’est pas positif, je préfère pour ma part le développement humain, social et écologique. Autant il est intéressant que l’on ait fait un pas sur le projet de croissance, autant on doit rester vigilant pour qu’elle se traduise par de l’emploi stable correctement rémunéré, et une forte réduction de la pauvreté que nous avons aujourd’hui dans l’Union européenne. Je ne remets pas en cause le fait que l’Allemagne et la France soient les fers de lance de l’UE, mais je préfèrerai que l’on ne discute pas uniquement de ce côté-là, et que l’on cherche à élargir la discussion avec d’autres pays comme l’Espagne, l’Italie, le Portugal ou même le Royaume-Uni pour voir comment générer du développement humain.

 

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Un humanisme viscéral

Publié le par michelmonsay

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Ecrivain renommé, lauréat du Goncourt et membre de l’Académie française, Jean-Christophe Rufin a vécu en 60 ans plusieurs vies en une seule. Médecin engagé dans l’humanitaire autant dans de très nombreuses missions à travers le monde qu’en tant que président d’ONG, il a aussi été entre autres ambassadeur au Sénégal, conseiller ministériel, attaché culturel au Brésil, et continue à se demander ce qu’il fera plus tard.

 

Il y a incontestablement une certaine proximité entre Jean-Christophe Rufin et Jacques Cœur, le héros de son dernier roman intitulé « Le grand Cœur ». Tous deux natifs de Bourges au lendemain de guerres, ils ont côtoyé le pouvoir et subi une forme de disgrâce, l’écrivain n’ayant pas été reconduit en 2010 à son poste d’ambassadeur de France au Sénégal. Il ne cache pas une admiration pour le protagoniste de son histoire : « Jacques Cœur a d’une certaine façon découvert l’Orient moderne et changé notre regard sur le monde. Né au creux de la guerre de 100 ans où la France connaissait la ruine et la famine, il a mis en place un extraordinaire système d’abondance qui a installé le pays dans une phase de développement. Nous avons en commun une haine de la guerre, une espérance de rapports humains fondés sur l’échange, le respect, et à son image je pense être quelqu’un de positif. »

Comme souvent pour ses romans d’aventures à la veine historique, le succès est au rendez-vous pour Jean-Christophe Rufin qui l’analyse au-delà de son fidèle lectorat, comme un besoin du public pour des héros positifs.

 

L’évidence de la médecine

Autre similitude entre le riche marchand devenu grand argentier du roi et l’écrivain, ils se servent du voyage comme instrument, au service du commerce pour l’un et de l’engagement humanitaire pour l’autre : « Quand je suis en vacances, je ne pars pas en voyage, je préfère rester chez moi en Haute-Savoie au cœur de la montagne. Je déteste aller quelque part sans avoir rien d’autre à faire que du tourisme. »

La médecine a rapidement été une évidence pour Jean-Christophe Rufin, d’abord par son grand-père qui l’exerçait, puis avec la 1ère greffe du cœur en 1967 qui a fini de le convaincre. Elevé par ses grands-parents à Bourges, son enfance est solitaire. Il lui faut attendre l’âge de 10 ans pour rejoindre sa mère qui travaille à Paris, et il rencontre son père pour la 1ère fois à 18 ans. En découvrant un horizon bouché dans l’univers hospitalier, le jeune médecin se dirige vers l’humanitaire. Ayant toujours préféré le contact avec le malade à la médecine scientifique, après avoir fait son service militaire comme coopérant en Tunisie, il s’engage auprès d’ONG naissantes comme Médecins sans frontières (MSF). Sa première mission en 1979 l’amène en Ethiopie, pays qui va le bouleverser et dans lequel il retournera à plusieurs reprises. Il y pénètre par la province d’Erythrée en se cachant dans le maquis et en accompagnant de nuit le mouvement de guérilla.

 

Au cœur de l’humanitaire

Cette vie le passionne et durant plusieurs années, il alterne de nombreuses missions avec des postes de médecins des hôpitaux à Paris. Après 6 ans avec MSF, il quitte l’organisation suite à une dispute comme il y en avait souvent à l’époque dans l’humanitaire français, et continue d’intervenir sur des situations de crise pour Action contre la faim (ACF). Il deviendra par la suite vice-président de MSF et président d’ACF.

Toutes ces missions lui font vivre des moments inoubliables comme le basculement des Philippines, où il s’est retrouvé poussé par la foule à l’intérieur du palais présidentiel, au moment même de la fuite du dictateur Marcos par hélicoptère. Ou comme la famine en Ethiopie : « La taille de cette catastrophe était impressionnante, on était littéralement submergé. Lorsqu’on déjeunait, les gens venaient taper contre les portes en fer de notre maison. » En découvrant toutes ces situations de guerre, de révolution, il ressent le besoin de comprendre, et parallèlement à son internat de médecine et ses missions, il entre à Sciences-Po dans un cursus aménagé. Cette réflexion sur le rôle de l’humanitaire dans les relations internationales, le conduit à écrire son premier livre sous la forme d’un essai en 1986, pour transmettre son expérience du terrain et identifier les pièges à déjouer.

 

Un terrain plus officiel

Toujours curieux de mondes nouveaux pour nourrir ses écrits, il approche celui du pouvoir en devenant conseiller du secrétaire d’état aux droits de l’homme Claude Malhuret en 86, et du ministre de la Défense François Léotard en 93. Pour celui-ci il s’occupe d’opérations de maintien de la paix, de ponts aériens sur des zones de conflit et se spécialise sur la Bosnie, où il contribue à faire libérer 11 otages français. Il prend des notes durant cette période trépidante comme il le faisait déjà lors des missions humanitaires, avec le désir de devenir romancier. Pendant plusieurs années, il écrit des essais n’osant pas se lancer dans le roman, il était perçu à l’époque davantage comme un technicien qu’un intellectuel. Entre les deux postes de conseillers ministériels, il part découvrir l’Amérique Latine en étant nommé attaché culturel et de coopération au Brésil où il reste 2 années.

Pour finir en beauté son expérience avec le pouvoir, il accepte comme un défi en 2007 le poste d’ambassadeur de France au Sénégal : « Pendant 3 ans j’ai résisté au président Wade, aux réseaux Françafrique, à Sarkozy, avec l’impression d’un bras de fer permanent tout en étant en accord avec la population, et en renouvelant les relations entre les deux pays. Les sénégalais m’adorent, le tout nouveau président Macky Sall m’a appelé il y a 2 jours pour me demander quand je venais. Je leur ai apporté ma connaissance de l’Afrique et davantage de respect, alors que la tendance de la France est de continuer à essayer de faire la loi dans ce pays. » Inévitablement, il a été remercié à la fin de son mandat qui n’a pas été renouvelé.

 

L’écriture enfin !

Jean-Christophe Rufin avait besoin de vivre toutes ces vies avant de franchir le pas du roman en 1997, et bien lui en a pris puisqu’en 4 ans il reçoit le Goncourt du 1er roman pour « L’abyssin », le prix Interallié pour « Les causes perdues » et le prix Goncourt en 2001 pour « Rouge Brésil ». En plus d’être récompensés, ses livres sont des succès, notamment « Rouge Brésil » vendu à 700 000 exemplaires et traduit en 19 langues. Il aime l’idée que le roman est un instrument pour traverser le monde, les couches sociales, pour restituer des portraits, des paysages, des couleurs, des émotions. Lorsque Jean-Christophe Rufin raconte une histoire, il a toujours besoin de distance, à la fois en prenant le temps nécessaire pour digérer ce qu’il a vécu et s’en servir quelques années plus tard dans la fiction, mais aussi en utilisant souvent un contexte historique pour évoquer des problématiques actuelles : « Au cœur de tous mes livres, il y a la rencontre de l’autre, la façon dont on accommode les différences soit entre des groupes humains, les français qui arrivent au Brésil au XVIe siècle (Rouge Brésil), soit entre deux individus, une femme française qui tombe amoureuse d’un brésilien (La salamandre), soit dans un dilemme interne, une femme franco-algérienne prise entre les mondes européen et musulman (Katiba). »

 

Ne jamais s’endormir sur ses lauriers

Autant le prix Goncourt que l’entrée à l’Académie française en 2008, Jean-Christophe Rufin les a vécus avec beaucoup de bonheur comme une reconnaissance, mais plutôt une étape qu’un aboutissement. A tout juste 60 ans, il est le plus jeune académicien et à ce titre contribue à inscrire l’institution dans la France d’aujourd’hui, en y faisant découvrir des nouveaux talents et en rappelant la nécessité de garder une ouverture vers l’international.

Comme le terrain humanitaire et son métier de médecin  lui manquent, il a décidé de repartir en mission dans les jours qui viennent : « Je suis allé l’an dernier en Haïti écrire un article pour Paris-Match. En visitant un camp de choléra, je me suis demandé ce que je fichais là et pourquoi je n’avais pas une blouse pour travailler avec les médecins. C’est mon métier et je n’ai pas envie de l’abandonner complètement. » Qui plus est, il ressent un besoin essentiel de continuer à vivre des moments forts pour nourrir son imaginaire d’écrivain. Autrement, quand il lui reste un peu de temps, cet homme qui s’est toujours demandé ce qu’il fera quand il sera grand, est tout autant rêveur que sportif au cœur de sa montagne savoyarde, où il aime pratiquer l’alpinisme, le vélo et la marche.

 

Publié dans Portraits

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Interview de François Hollande réalisée le 29 août 2011

Publié le par michelmonsay

Cette interview réalisée plus de 8 mois avant son accession à la présidence de la République confirme la cohérence des propos de François Hollande, qui me confiait déjà les mêmes orientations qu'il a mises en avant ces jours-ci. J'étais ressorti emballé par cette rencontre avec un homme simple, déterminé, disponible, qui faisait preuve autant de qualités humaines que de grande compétence et d'un sens de l'analyse très pointu.

 

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L’ancien dirigeant du PS, favori des primaires socialistes où tous les français peuvent voter les 9 et 16 octobre, n’en finit plus d’étonner son monde par la métamorphose qu’il a opérée depuis plusieurs mois. A 57 ans, il a indéniablement pris une nouvelle dimension, qui pourrait le mener à devenir le leader que la gauche attend depuis François Mitterrand.

 

Comment vous situez-vous par rapport au projet du Parti Socialiste ?

François Hollande - Ce projet m’engage, je l’ai voté, j’aurai donc à le traduire, mais il y a aussi une crise, une conjoncture et des marges de manœuvre limitées. Si j’en ai la responsabilité, le choix que j’aurai à faire sera de fixer un ordre de priorités, et d’organiser un agenda pour que nous puissions faire ce que nous avons présenté aux français, avec la cohérence et la crédibilité nécessaires. D’ores et déjà, je mets l’accent sur la jeunesse, considérant que ce doit être la grande cause du prochain mandat présidentiel, et une réforme fiscale d’ampleur sans laquelle il ne peut y avoir de progrès économique, de justice sociale, de modernisation du pays.

Nous avons la démographie la plus dynamique d’Europe et une population active qui continue d’augmenter, c’est un atout et non une charge. La jeunesse doit être un levier pour permettre au pays de se développer par la réussite de cette nouvelle génération. Avec une progression du chômage aux deux extrêmes de l’âge actif, je propose un contrat de génération permettant à un employeur de garder un salarié de plus de 55 ans tout en embauchant un jeune de moins de 25 ans en CDI, avec une exonération de charges sociales sur les deux emplois. L’agriculture est peut-être le meilleur exemple de ce contrat de génération, avec des parents qui cèdent leur exploitation à leur enfant tout en continuant à y travailler et à transmettre le savoir.

 

Quelles mesures pourriez-vous prendre pour que le monde agricole aille mieux ?

F.H. - La réforme fiscale que je préconise aura son volet agricole avec un double objectif : favoriser l’emploi, l’investissement dans l’innovation, et l’environnement. Il y aura aussi un volet nouveau sur les mécanismes assurantiels pour faire face aux crises et aux aléas du marché. Deuxièmement : la jeunesse sera aussi une priorité pour l’agriculture avec une politique d’entrée dans le métier et d’installation qui devra être renouvelée et rénovée, en soutenant financièrement les jeunes qui souhaitent s’engager dans la carrière d’agriculteur, avec le maintien de prêts bonifiés.

J’entends aussi favoriser avec l’aide de l’Etat, des régions et de l’ensemble des partenaires, des politiques structurelles qui permettront de lier sur un même territoire plusieurs exploitations, comme cela a été fait pour l’achat du matériel agricole avec les Cuma. L’objectif sera de mettre en œuvre des mesures à la fois économiques et environnementales. Mais je n’oublie pas que la 1ère tâche qui m’incombera sera aussi de préserver le budget agricole au niveau européen, veiller à ce que la PAC permette la diversité des productions, la redistribution des aides, et un lien entre production et protection de l’environnement.

L’agriculture est un secteur à multiples enjeux. Enjeu territorial bien sur, enjeu environnemental je l’ai dit, enjeu alimentaire essentiel aujourd'hui pour l’Europe et la France. Et enfin un enjeu économique car c’est un des seuls secteurs excédentaires en terme de balance commerciale pour la France, en produits de base agricoles, en produits de qualité et en produits transformés industriels. C’est un atout essentiel. C’est pourquoi j’ai toujours considéré l’agriculture comme un enjeu global, celui d’une profession que je respecte mais aussi celui des consommateurs et de tous les citoyens.

 

Comment êtes-vous devenu le favori des primaires et de l’élection présidentielle en elle-même ?

F.H. - Une élection présidentielle est une alchimie, une rencontre entre un homme ou une femme, une circonstance et l’aspiration d’un pays. Sans préjuger des qualités, il faut correspondre à la période et il me semble qu’aujourd’hui plus qu’hier, je suis celui-là. Nicolas Sarkozy a décrédibilisé son modèle idéologique, la réussite individuelle, sans prendre conscience que l’organisation collective, la solidarité pouvaient être des leviers de progrès. Il a beaucoup choqué par son comportement personnel. Les inégalités qui sont apparues insupportables sur le plan social, ont été un frein à notre développement économique. Cela a créé une attente d’une réponse politique différente, plus stable, cohérente et précise.

De là est née mon ambition pour incarner un président qui aurait à la fois la force nécessaire, la hauteur de vue et le respect de tous ses concitoyens, en n’étant pas simplement le chef d’une majorité. Il faut être capable d’avoir cette empathie à l’égard de la population, pour qu’elle vous reconnaisse autant comme une autorité qu’un semblable, dans une conjugaison de responsabilité et de simplicité. Le verbe fait partie de ce lien, et même si j’ai été marqué par François Mitterrand, il faudra en 2012 faire du neuf. Pour les primaires, au-delà de l’ordre des priorités qui nous différencient, de l’insistance et la précision sur un certain nombre de choix, nos concitoyens choisiront la personnalité qui pourra rassembler le plus largement les français en leur redonnant confiance. C’est la condition pour battre Nicolas Sarkozy.

 

La crise actuelle peut-elle favoriser l’extrême droite, et que faut-il faire pour en sortir et relancer la croissance ?

F.H. - Les crises favorisent toujours les replis ou les excès. Penser qu’en chassant les immigrés ou les marchandises nous irions mieux, l’Histoire a démontré que ces solutions conduisaient au pire ou au désastre économique. Il ne suffit pas de dire que nous sommes contre les marchés, les agences de notation, les spéculateurs, l’Europe, pour que d’un seul coup ils disparaissent. Il faut dans cette période de crise montrer de la volonté, de la capacité, de la crédibilité et de la lucidité pour nous donner le temps nécessaire afin d’arriver aux résultats escomptés. La crise actuelle avec une faible croissance, un chômage élevé, une instabilité des marchés et une vulnérabilité des états, valide davantage nos thèses que celles des libéraux ou des conservateurs.

Pour relancer la croissance, notre victoire peut à court terme, être un élément de confiance permettant aux français d’investir davantage, de consommer mieux et de mobiliser leurs forces pour la réussite commune. Parallèlement, il nous faudra mettre l’accent sur 3 grands enjeux : celui de la production et de notre compétitivité, de notre capacité à innover, celui de  l’éducation où nous ne devons pas considérer la formation de nos jeunes comme une dépense supplémentaire mais un investissement, et celui de l’environnement qui peut, si nous savons saisir des opportunités, nous ouvrir des perspectives de croissance. Les nouvelles activités se trouvent dans les économies d’énergie, les énergies renouvelables, des modes de transport différents, une production agricole plus environnementale et mieux valorisée. S’il n’y a pas de croissance, il n’y aura pas de rétablissement des comptes publics et inversement, nous devons faire les deux en même temps.

 

Que doit comporter la réforme fiscale que vous préconisez pour être réussie ?

F.H. – La réforme fiscale doit être simple dans ses principes, efficace dans ses effets et juste dans ses instruments. Simple avec des impôts qui ont une assiette large et des taux en nombre limité, efficace économiquement en encourageant l’investissement et l’emploi, mais aussi en supprimant et redéployant les niches fiscales. Enfin cette réforme devra être juste, en appelant davantage à contribuer ceux qui aujourd'hui, sont les plus favorisés. Je l’ai dit, les français sont prêts à faire des efforts, à condition qu’ils sentent que ces efforts sont partagés équitablement. Aujourd’hui l’Etat emprunte pour payer les intérêts de ses emprunts, nous entrons ainsi dans une spirale où nos enfants devront payer nos dépenses de fonctionnement. Je ne peux pas admettre qu’il y ait cette transmission d’un fardeau qui serait le fruit de nos propres lâchetés. Il y a donc une obligation, c’est d’être rigoureux, en maitrisant nos dépenses, tout en fixant des priorités claires et en s’assurant en même temps de meilleures recettes, c’’est l’objet de la réforme fiscale que je propose.

 

Peut-on échapper à l’austérité et au diktat des marchés pour revenir à une démocratie plus humaine ?

F.H. - Depuis 10 ans, la domination des libéraux et des conservateurs, a délégué aux marchés, les arbitrages que nous devions faire politiquement pour faire face aux difficultés et préparer notre avenir. A ce titre, la PAC avec le démantèlement méthodique des organisations de marché depuis quelques années, est un exemple et une preuve. Pour que l’intelligence de la démocratie triomphe de la force des marchés, il faut mettre en place des règles, des instruments, des taxes sur la spéculation pour dégager des recettes, et pour l’agriculture maintenir des fonds d’intervention, avoir une politique de stockage, à l’échelle de l’Europe voire du monde. La voix de la France compte toujours mais cela dépend beaucoup de celui qui assure la fonction de président. Il peut le faire de manière bavarde et provocatrice ou exercer une influence par la qualité de ses jugements, la force de ses propositions, l’habileté de sa diplomatie et une intelligence de la psychologie humaine. Les rapports entre chefs d’état obéissent certes à des rapports de force, mais aussi  de confiance.

 

Votre manque d’expérience ministérielle est-elle un handicap et si vous êtes élu président, qu’aimeriez-vous laissé comme bilan ?

F.H. - J’ai été davantage qu’un ministre en étant sans doute celui qui a été le plus associé aux décisions du gouvernement de Lionel Jospin. J’étais à la tête du Parti Socialiste et à l’Assemblée Nationale avec Jean-Marc Ayrault, j’avais la responsabilité de faire vivre la majorité plurielle de l’époque. J’ai donc une grande expérience de la responsabilité.

Quant à ce que je voudrais laisser : un pays qui a plus confiance en lui-même, plus harmonieux, plus juste et plus apaisé. Un pays réconcilié entre les générations et entre les catégories sociales. Il faut pour cela avoir des idées claires et être capable de les faire partager. Si l’on a raison tout seul, on finit par avoir tort tout seul. 

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