Kingdom reprend à son compte la figure du zombie pour en faire une image du peuple affamé par une caste de puissants
Cette minisérie mêle habilement drame en costume médiéval sud-coréen et horreur. Malin et joyeusement terrifiant, loin des lourdeurs de la moribonde The Walking Dead, le scénario de Kingdom donne un petit côté social au combat du prince héritier, figure idéalisée, à la fois noble et proche du peuple, opposé à des dirigeants machiavéliques ou pleutres, qui méprisent les pauvres. Malgré son sous-texte grave et quelques scènes redoutables, Kingdom garde un joli sens de l’humour, porté par les gesticulations de certains personnages et la sidération des victimes de zombies. Le cinéaste Kim Seong-hun a le sens du rythme et multiplie les bonnes idées visuelles. Les six épisodes de cette courte première saison, apparemment une deuxième est déjà tournée, trépidante et attachante, s’enchaînent à toute vitesse. On apprécie une série apocalyptique qui ne soit pas un enchaînement de réflexions existentielles redondantes noyées sous une violence vaine. C'est aussi un spectacle de pourpre et de soie, avec des splendides pavillons et temples de bois sublimés par l'incandescence des frondaisons automnales ou éteints par la grisaille austère de campagnes désargentées, dans une impressionnante reconstitution historique. Kingdom refuse la surenchère de Game of thrones (amours consanguins, dragons domestiques, arbres prophètes, etc.) et intéresse parce qu'il se focalise moins sur des destins extraordinaires et ce satané besoin d'homme providentiel qu'au sous-texte que représentent ses créatures. La série construit ses monstres en suivant une opposition simple entre aristocrates vautrés et peuple affamé. Aux riches les mets exquis et les délices de palais, aux pauvres les restes, la soupe à l'eau. Loin des fantasmagories fantasy, l'histoire de Kingdom se contente de rejouer celle de l'accaparement des richesses par une caste de privilégiés prête à tout pour défendre ses intérêts, quitte à laisser les gueux pourrir entre eux, vieillards, femmes et enfants compris. La série prend un malin plaisir à multiplier les portraits d'aristocrates ridicules de veulerie et de couardise devant le monstre qu'ils ont participé à créer. Décidément la Corée du Sud, qui est depuis plusieurs années un grand pays de cinéma, n'a rien à envier aux plus grands en matière de série, en témoigne Juvenile justice, Deserter pursuit, ou Kingdom, qui excelle à mélanger les genres avec subtilité et ingéniosité.
Kingdom est à voir ici sur Netflix pour 5,99 € avec pub et 13,49 € sans pub, un mois d'abonnement sans engagement.