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Un drôle de zèbre

Publié le par Michel Monsay

Un drôle de zèbre

Auteur à succès depuis ses débuts en 1986 avec « Bille en tête » et « Le zèbre », jusqu’à « Des gens très bien » en 2011 où il dévoile le passé vichyste de son grand-père, Alexandre Jardin est aussi depuis 15 ans un citoyen engagé, qui vient de créer un mouvement d’actions citoyennes pour réveiller le pays.

 

Lassé des promesses politiques qui ne sont jamais tenues, Alexandre Jardin a cofondé en mars dernier le collectif « Bleu, Blanc, Zèbre » appelé aussi « Les zèbres » pour rassembler ceux qui ont encore aujourd’hui un crédit moral à ses yeux, en l’occurrence ceux qui font au lieu de dire, et rendent ainsi un service immédiat à la population: « Si l’on prend l’exemple de Solaal, qui fera à un moment ou à un autre un excellent zèbre, ce sont des professionnels qui s’organisent pour faciliter le lien entre les donateurs des filières agricoles et les associations d’aide alimentaire, ils ne promettent pas ils le font. » Avec ses zèbres, l’écrivain est en train de faire naître un pôle de confiance pour négocier avec les partis politiques au moment des échéances électorales, une nouvelle alliance avec la société civile sous forme de contrat de mission pour tous les sujets sur lesquels elle a prouvé sa compétence et sa légitimité: « Si l’on donne un autre statut à ces acteurs qui sont capables d’apporter des solutions, on sortira d’un schéma politique infernal dans lequel on vote pour des gens qui ne savent pas régler les problèmes des français, enfermés qu’ils sont dans une logique législative. »

 

Refuser la fatalité

Ce que fait Alexandre Jardin avec les zèbres s’inscrit dans la continuité de l’association qu’il avait créée en 1999, « Lire et faire lire », pour agir contre l’échec scolaire et en particulier pour aider les 20% d’enfants qui ne maîtrisent pas l’écrit à l’entrée au collège. Aujourd’hui, 16 000 bénévoles retraités viennent dans des écoles maternelles et primaires chaque semaine pour transmettre le plaisir de la lecture à 400 000 enfants : « Ce programme intergénérationnel favorise aussi l’intégration par la tendresse et permet de lutter contre la violence en augmentant le lexique des gamins. »

Ce rôle de fédérateur, que le romancier a pris à bras le corps, se nourrit à la fois de son aversion pour l’impuissance et la fatalité, et de la jouissance que lui procure les rencontres avec tous ces acteurs qui agissent. Après avoir passé beaucoup de temps au téléphone et en rendez-vous, il a réuni une centaine de programmes en à peine sept mois pour les faire monter en puissance et en faire des acteurs politiques de gestion de la Nation. Dès à présent les zèbres coopèrent avec des maires pour étendre la portée de leur action. L’effet de masse, qui va donner un réel poids au mouvement, commence à se faire sentir et le collectif s’est structuré pour sélectionner les nouveaux zèbres. Les programmes ont d’ores et déjà fait leurs preuves à l’image de Lire et faire lire ou du compte nickel : « Ce compte que l’on peut ouvrir en cinq minutes pour vingt euros chez un buraliste est la solution qu’attendait les deux millions et demi de français qui n’ont pas de RIB. En quelques mois, près de 60 000 comptes ont été ouverts. »

 

Un secret de famille insupportable

Si Alexandre Jardin a souvent évoqué sa famille dans ses romans, « Des gens très bien » paru en 2011 marque une étape cruciale, puisqu’il y révèle le passé vichyste de son grand-père, directeur de cabinet de Pierre Laval, chef du gouvernement de Pétain, notamment au moment de la rafle du Vel’ d’Hiv. Pas facile de dynamiter sa propre famille, l’écrivain a attendu d’avoir 46 ans, l’âge que son père avait lorsqu’il a été emporté par un cancer, pour affronter le réel et briser ce secret de famille. Cette histoire est d’autant plus compliquée que Jean Jardin était apparemment quelqu’un de bien, mais Alexandre est persuadée  qu’en étant directeur de cabinet, son grand-père était au courant de tout ce qui se passait , et par la suite, cet homme n’a jamais été inquiété. Le romancier n’a eu aucun état d’âme pour mettre fin à la cécité dont était frappée sa famille, même si cela a été douloureux : « J’ai cinq enfants et il n’était pas question d’en faire les héritiers d’un rapport au réel impossible. La sortie du livre a été un mélange d’enfer et d’insultes avec ensuite des moments magnifiques, où les gens venaient me parler de leur secrets de famille. J’ai eu accès à l’infinie complexité des familles françaises. Je n’aurai jamais pu me lancer dans une grande aventure civique comme celle des zèbres, sans être au clair sur ces questions-là. Si j’ai créé Bleu Blanc Zèbre, c’est que j’avais la conviction très nette que le FN allait prendre le pouvoir dans mon pays, parce qu’il n’est pas possible de ne pas régler les problèmes des gens, à un moment ils deviennent fous. »

 

De père en fils

Pascal Jardin, père d’Alexandre, écrivain et grand scénariste-dialoguiste du cinéma français des années 1960 et 70, auteur notamment du Vieux fusil, a appris à son fils qu’il était possible de vivre sans la peur. Cet homme n’avait aucun frein, il vivait comme dans un film, mais il en est mort alors que son fils n’avait que 15 ans : « Son mode de vie ne pouvait pas durer. Vous ne pouvez pas écrire 17 films dans l’année, aimer 5 femmes, perdre des fortunes, avoir le fisc qui vous saisit, la surchauffe est telle que vous ne pouvez pas espérer vivre 90 ans. » Le point commun entre le père et le fils est une vraie liberté : « Il m’a montré comment vivre large, que l’on pouvait écrire à la fois des comédies, des films d’aventures, des films intellos. »

Après avoir voulu être empereur durant son enfance, Alexandre Jardin fait Sciences-Po mais se rend compte qu’il s’est trompé de voie, et son désir de gouverner s’arrête là. Quelques mois plus tard, il publie en 1986 son premier roman à 21 ans, « Bille en tête », et rencontre tout de suite le succès. Idem pour « Le zèbre » deux ans après, qui décroche en plus le Prix Femina. Ses premiers écrits plein de vie, à l’image de leur auteur, contrastent avec l’essentiel de la production littéraire française composée, selon Alexandre Jardin, de bouquins sinistres. Il rend d’ailleurs hommage à Françoise Verny, une femme qui savait prendre des risques dans le monde de l’édition. Cette reconnaissance immédiate, il la vit gaiement sans trop y croire, le jeu social n’ayant jamais eu de sens à ses yeux.

 

Réveiller le lecteur

Lorsqu’on lui demande de ressortir un roman de sa bibliographie, il cite le dernier, « Juste une fois », comme étant le mieux construit : « La dramaturgie est dix coudées au-dessus, ma langue a évolué, ma passion pour la concision s’est affermie, et j’ai été porté par la révolution narrative induite par les grandes séries américaines qui ont imposé d’autres standards narratifs et une liberté phénoménale. » Sa principale motivation dans l’acte d’écrire est de réveiller les autres, il adore l’idée qu’un roman puisse faire agir un homme ou une femme, notamment pour une pulsion amoureuse. Encouragé dès le début par Françoise Verny à écrire ce qu’il était le seul à pouvoir écrire et non à copier d’autres romanciers, les livres d’Alexandre Jardin ressemblent furieusement à leur auteur. Cette obsession de vouloir se sentir vivant et de n’être attiré que par des personnes vivantes se ressent tout au long de son parcours, autant dans ses écrits que dans son action citoyenne aujourd’hui : « Lorsque vous voyez la révolte des bonnets rouges, ce sont des gens vivants, ils n’acceptent pas la fatalité. Sont vivants pour moi les êtres qui sont dans l’action et la création d’eux-mêmes. »

 

Rien ne vaut l’écriture

En parallèle à son parcours d’écrivain, il a goûté à l’univers du cinéma en tournant trois films en tant que réalisateur, dont Fanfan avec Sophie Marceau et Vincent Pérez, l’adaptation de son roman, mais cette expérience ne lui a pas beaucoup plu. En raison d’un divorce, il a d’ailleurs mis entre parenthèses cette carrière depuis 2000 pour s’occuper de ses enfants. Son rôle de père, en réaction à l’absence régulière du sien durant son enfance, a toujours été une priorité pour lui. Pendant quelques temps, il a aussi été chroniqueur littéraire au Figaro et pour Canal + dans l’émission Nulle part ailleurs.

Aujourd’hui à 49 ans, il est clairement tourné vers ses zèbres, ses romans, sa famille et n’a le temps pour rien d’autre : « J’écris toujours 50 trucs à la fois, j’ai tous les programmes des zèbres dans la tête, et si vous voulez vraiment aimez ceux que vous aimez, cela vous demande un temps fou. » Outre ces moments intimes avec les siens, ses plus fortes émotions sont dans l’écriture : « J’écris tout le temps, j’essaie beaucoup de choses, en jette une grande partie mais lorsque je rencontre un archétype, en sentant que mon personnage représente beaucoup plus que lui-même, il y a un moment miraculeux où la jouissance est très forte. »

Publié dans Portraits

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Une expérience humaine incomparable

Publié le par Michel Monsay

Une expérience humaine incomparable

Il arrive parfois que le cinéma indépendant américain nous offre une pépite, aux antipodes du cinéma standardisé que Hollywood vend dans le monde entier. Ici, point de stars ni de cinéaste culte, encore moins d’effets spéciaux ou de héros invincibles, juste un jeune réalisateur américain d’origine hawaïenne de 35 ans avec un film apparemment tout simple mais qui nous touche profondément dès les premières images. Se servant de son expérience d’éducateur dans un centre pour adolescents fragilisés par les épreuves qu’ils ont subies, le réalisateur recrée cet univers en le scénarisant juste ce qu’il faut pour ne pas être dans le documentaire  ou le cinéma réaliste social, mais plutôt dans une fiction d’une étonnante justesse alternant une émotion à fleur de peau, que l’on sent chez tous les personnages, avec un humour salvateur qui parsème cette histoire touchée par la grâce. Remarquablement interprété par tous les comédiens avec une mention particulière à Brie Larson la jeune responsable du centre, ce film d’une grande humanité, sans faire l’économie des moments difficiles que traversent les ados mais aussi les éducateurs, ne tombe jamais dans le manichéisme ou l’outrance. L’histoire démarre  avec l’arrivée d’un éducateur tout juste sorti de l’école, pour son premier jour sur le terrain dans un centre pour adolescents en difficulté. L’ambiance est bon enfant entre éducateurs, ils bavardent dehors avant d’entamer leur journée, et l’un deux raconte une anecdote assez drôle qui lui est arrivé à ses débuts. Avant qu’il n’ait fini, un adolescent sort en trombe du centre en hurlant. Du coup les éducateurs s’interrompent et courent après lui pour le rattraper, l’immobiliser et le calmer. Admirable portrait de groupe, ce film provoque sans ne jamais être larmoyant une empathie à l’égard de tous ses personnages au passé douloureux. Par sa sensibilité qui se ressent jusque dans ses cadrages, sa psychologie à la finesse rare, le réalisateur Destin Cretton restera l’un des plus belles révélations de cette année.

 

                                                                                                                      

States of Grace – Un film de Destin Cretton avec Brie Larson, John Gallagher Jr, Kaitlyn Dever, … - Condor Entertainment – 1 DVD : 19,99 €.

Publié dans DVD

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Retour gagnant d’un poète rock essentiel

Publié le par Michel Monsay

Retour gagnant d’un poète rock essentiel

Même si Charlélie Couture n’a quasiment pas arrêté d’enregistrer régulièrement des albums depuis plus d’une trentaine d’années, nous sommes restés bloqués à la perfection de « Poèmes rocks » sorti en 1981, qu’il n’avait plus retrouvée depuis. Artiste pluridisciplinaire diplômé de l’école nationale supérieure des Beaux-arts, il vit depuis dix ans à New-York où il a ouvert un atelier galerie, et une rétrospective de ses peintures dessins, photos et autres œuvres se tient à Nancy, sa ville natale, jusqu’au mois de mars. Ce retour musical au premier plan est en partie dû à l’incontournable Benjamin Biolay, dont le talent de réalisateur et arrangeur d’album se confirme une fois de plus quel que soit l’univers auquel il se frotte. A 58 ans, Charlélie Couture avec sa voix nasale si reconnaissable a écrit et composé 12 chansons qui pourraient être une suite de son disque référence. On y retrouve la même qualité d’écriture autant dans les textes que dans les mélodies, avec une teinte plutôt sombre d’où ressortent la question du temps qui passe et celle d’exister. Musicalement, l’album oscille d’une part entre un blues et un rock enthousiasmants, notamment sur les deux morceaux chantés en anglais où l’on pense fortement à Lou Reed. D’autre part, de touchantes ballades accompagnées de cordes ou dans une ambiance jazzy apportent un joli pendant aux compositions plus percutantes. Dans ce superbe album de chanson française agrémenté d’ambiances newyorkaises, Charlélie Couture, même s’il nous raconte toujours le monde qui l’entoure à travers des petites histoires dont il a le secret, livre davantage ses propres angoisses. D’où le jeu de mots du titre de l’album de cet artiste désormais franco-américain depuis 2011, à la fois Immortel et I’m mortel. Au final, ce disque est vraiment mortel !

 

                                                                                                                

Charlélie Couture – ImMortel – Mercury – 1 CD : 15,99 €.

Publié dans Disques

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Sublimement noir avec une touche de lumière

Publié le par Michel Monsay

Sublimement noir avec une touche de lumière

Confier l’écriture du scénario à l’excellent romancier Dennis Lehane, auteur entre autres de Mystic river et Shutter island, et la réalisation au belge Michael R. Roskam à qui l’on doit Bullhead, premier film très sombre et remarqué jusqu’à Hollywood, sur le papier l’idée était enthousiasmante, sur l’écran le résultat l’est bien plus encore. Il arrive souvent que le premier film américain d’un cinéaste étranger, dont le talent a été repéré par les studios hollywoodiens, ne soit pas à la hauteur des espérances escomptées, et que le cinéaste se perde ou soit contraint de faire un film qui plaise au plus grand nombre. « Quand vient la nuit » en est le parfait contre-exemple, tant le réalisateur s’empare pleinement de l’écriture de Dennis Lehane pour en faire une œuvre somptueusement noire. Evitant les poncifs du genre, ce polar original, peuplé de personnages solitaires en souffrance qui tentent de reconstruire leur vie, nous entraîne au fil d’une intrigue admirablement construite baignant dans une atmosphère plutôt désenchantée non dénuée d’espoir. L’ensemble est visuellement très réussi, autant dans la manière de filmer cette histoire que dans la restitution des ambiances de nuit à Brooklyn. Les interprètes ne sont pas en reste et apportent chacun à leur manière des nuances dans leur jeu qui mettent en avant la complexité des personnages, notamment Tom Hardy tout en intériorité et le regretté James Gandolfini. Bob, un homme solitaire qui tient un bar avec son cousin dans Brooklyn, nous explique le système de blanchiment d’argent collecté et déposé chaque nuit dans un bar différent. Le lendemain, ils sont victimes d’un braquage. Heureusement pour eux ce n’est pas un soir de dépôt. Bob découvre par ailleurs un jeune chien blessé enfermé dans une poubelle et fait à cette occasion la connaissance d’une femme, qui vont tous deux bouleverser sa solitude. Ce superbe film qui navigue avec finesse entre le bien et le mal est bâti autour d’un antihéros magnifique, bien plus touchant et passionnant que les traditionnels héros du genre. D’autant que les personnages qui l’entourent ont la même épaisseur.

 

Quand vient la nuit – Un film de Michael R. Roskam avec Tom Hardy, Noomi Rapace, James Gandolfini, Matthias Schoenaerts, … 

Publié dans Films

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Femme en bleu sur fond végétal

Publié le par Michel Monsay

Femme en bleu sur fond végétal

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Présentation de Cyril Lignac

Publié le par Michel Monsay

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Cueillette de lavande

Publié le par Michel Monsay

Cueillette de lavande

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Introduction d'un émetteur dans un saumon migrateur

Publié le par Michel Monsay

Introduction d'un émetteur dans un saumon migrateur

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Le destin gâché d’une femme remarquable

Publié le par Michel Monsay

Le destin gâché d’une femme remarquable

Ce magnifique roman est l’une des plus belles surprises de la rentrée littéraire. A 49 ans, Eric Reinhardt est au sommet de son art, celui de mêler on ne peut plus habilement réalité et fiction en s’incluant dans l’exercice. Il n’est pas question ici d’une autofiction classique, même si le roman est écrit par moments à la première personne et si l’auteur apparaît à plusieurs reprises dans l’intrigue, il s’agit bien plus d’un bouleversant portrait de femme. Si cette histoire nous touche autant, au-delà des intolérables faits relatés, c’est aussi dû à l’écriture empreinte de poésie, de romantisme, au style à la fois d’une grande précision jusque dans les détails et d’un usage de la métaphore qui touche à la perfection, enfin à une remarquable construction qui maintient une émotion constante de la première à la dernière ligne. C’est la colère qu’il ressent face à des destins empêchés qui motive souvent Eric Reinhardt à prendre sa plume. La rencontre avec des lectrices victimes d’harcèlement conjugal lui a inspiré son 6ème roman, véritable descente aux enfers entrecoupée de rares moments de plénitude. Le livre démarre justement lorsqu’Eric Reinhardt reçoit une merveilleuse lettre d’une lectrice, qui le touche profondément. Commence alors une correspondance de la même teneur entre l’écrivain et cette femme professeur de français dans un lycée de Metz, jusqu’à une première rencontre dans un café du Palais-Royal à Paris. Ils y parlent du dernier livre de l’auteur et à travers ce que cette lectrice lui raconte de son ressenti, Eric Reinhardt commence à entrevoir les problèmes qui empêchent cette femme d’être heureuse, qu’elle lui révèlera lors d’une deuxième rencontre quelques mois plus tard. Par un processus d’écriture d’une grande originalité, l’écrivain nous offre un roman poignant, un personnage inoubliable, un témoignage précieux sur le harcèlement conjugal, dont on ne sort pas indemne.

 

                                                                                                                      L’amour et les forêts – Un roman d’Eric Reinhardt – Gallimard – 366 pages – 21,90 €. 

Publié dans Livres

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Une passion et des convictions bien ancrées

Publié le par Michel Monsay

Une passion et des convictions bien ancrées

À la tête de l’Institut du monde arabe (IMA), Jack Lang est en passe, à 75 ans, une nouvelle fois de faire des miracles pour mettre en avant la culture. Celui qui a marqué de son empreinte indélébile le monde culturel sous les années Mitterrand, apparait déçu par ce qu’est devenue la politique aujourd’hui.

 

Appelé par le Président de la République en janvier 2013 avec l’accord de l’ensemble des pays arabes, pour redresser l’IMA dont les finances et la fréquentation n’étaient pas très bonnes, Jack Lang qui aime les missions difficiles ne pouvait qu’accepter celle-ci. Ses attaches avec le monde arabe ont commencé durant sa période étudiante alors qu’il était militant anticolonialiste. Par la suite en étant professeur de droit il a noué des liens avec des professeurs du Maghreb, puis comme créateur du festival mondial de théâtre universitaire de Nancy, il a invité des auteurs, intellectuels et chercheurs arabes. « L’IMA est une institution unique, qu’aucune autre capitale ne possède, qui établit le pont entre le monde oriental et occidental, comme l’explique son Président. Dans cette période où des violences éclatent dans des pays du Proche-Orient, nous avons besoin plus que jamais d’une telle institution qui incarne l’esprit d’ouverture, de tolérance, de respect et de paix. »

 

Une année grandiose

Le temps de se mettre en place avec son équipe, Jack Lang a voulu frapper un grand coup en 2014 avec trois grandes expositions : L’Orient-express, le pèlerinage à La Mecque et le Maroc contemporain qui a lieu en ce moment. D’autres sont à venir en 2015 sur les jardins arabo-musulmans, et sur l’Egypte ancienne à travers les récentes découvertes d’archéologues. Libre, indépendant, sans pression d’aucune sorte, l’IMA est aussi un lieu de réflexion, de dialogue, avec des colloques et des débats organisés régulièrement sur l’actualité politique, culturelle et sociale. En janvier 2015, un symposium international sur le renouveau du monde arabe, montrera tous les changements positifs survenus ces dernières années dans plusieurs pays. Sans augurer de la suite, Jack Lang a réussi à faire repartir la fréquentation à la hausse, mobiliser des mécènes, et après des années de déficit, 2014 sera à l’équilibre.

 

D’une circonscription à l’autre

Absent des bancs de l’Assemblée Nationale depuis 2012, il n’en ressent aucun manque : « La politique ne donne pas aujourd’hui une belle idée d’elle-même. Elle manque d’imagination, de souffle, d’élan, se limite encore plus qu’avant à des combats de chefs et de sous-chefs et ne propose pas de projets forts. » Pourtant en 2012, il s’était présenté dans les Vosges pour les élections législatives et avait été battu de justesse dans une circonscription difficile, qui était à droite depuis trois législatures. Paradoxalement, c’est dans la région où il était le plus légitime, étant né à Mirecourt dans les Vosges et ayant vécu longtemps à Nancy, qu’il a été battu. Alors que son parachutage dans le Loir et Cher puis dans le Pas-de-Calais s’étaient fort bien passés. Même si cette campagne électorale sur le terrain l’a passionné, il n’a de regrets que pour ses proches et amis qui se sont mobilisés. Il se dit reconnaissant au sort de ne pas l’avoir choisi comme député des Vosges, car il serait aujourd’hui dans une situation très difficile face à la désindustrialisation galopante et une politique gouvernementale qui ne lui paraît pas assez volontariste. Pour autant, il ne serait pas  dans les frondeurs, ayant toujours eu le sens de la solidarité.

Parachuté dans le Loir et Cher en 1986, il a beaucoup aimé cette région et y compte encore de nombreux d’amis, notamment à Blois dont il a été maire durant 11 ans. Il vient d’y retourner pour participer à une manifestation qu’il a créée en 1998, Les rendez-vous de l’Histoire. Beaucoup le reconnaissent, Jack Lang a transfiguré la ville, il l’a réveillée. Ayant toujours préféré l’action aux discours, il y a construit entre autres une nouvelle bibliothèque, une université, une école d’ingénieur, un pont, et la halle aux grains qui a failli être détruite avant qu’il n’arrive est devenue un haut-lieu culturel.

 

Fidèle à ses convictions

A l’Assemblée Nationale, en tant que député du Loir et Cher, il a particulièrement apprécié la période durant laquelle il était  président de la commission des affaires étrangères de 1997 à 2000, où il s’est occupé de dossiers sur la protection des droits de l’homme dans différents pays, les traités européens, le développement économique en Afrique. Plus tard, lorsqu’il a été élu du Pas-de-Calais, il s’est trouvé parfois en désaccord avec ses propres amis, notamment quand le Président Sarkozy a entrepris une révision constitutionnelle en 2007, et lui a demandé avec d’autres personnalités de gauche de faire partie d’un comité de réflexion présidé par M. Balladur et dont Jack Lang est devenu vice-président : « Nous avons avancé avec ce comité, des propositions qui étaient conformes à celles que le Parti socialiste lui-même avait formulées quelques années auparavant. Ce qui tue la politique est cette incapacité à être en cohérence avec soi-même, on ne peut pas tenir un langage différent selon qu’on soit dans l’opposition ou au gouvernement. J’ai donc été le seul socialiste à voter cette réforme des institutions. »

De même pour la loi Hadopi, il a trouvé incompréhensible que les socialistes se dressent aussi violemment contre ce texte, qu’il jugeait être en conformité avec tout ce qu’il avait entrepris comme Ministre de la culture : « C’est parce que je me sens beaucoup plus à gauche que certains donneurs de leçon qui m’ont engueulé à l’époque, que j’ai voté ces textes. Ce sont eux qui trahissaient l’idéal républicain en refusant de démocratiser la Constitution et en s’opposant à une loi de régulation d’Internet. » Aujourd’hui moins engagé dans la vie politique du fait de ses responsabilités à l’IMA, il est néanmoins en très bons termes avec le Président Hollande même s’il n’est pas toujours en accord avec ses décisions.

 

Un cheminement par étapes

Passionné de théâtre durant son adolescence, il le pratique en amateur avant de créer plus tard un festival à Nancy, mais sa volonté est de devenir professeur. Après des études de droit et de Sciences-politiques, il devient professeur de droit à la faculté de Nancy. A partir de là, il va mener trois vies qui s’entremêlent, celle de professeur et de juriste, celle de citoyen de gauche engagé dans la vie collective, et la troisième concerne bien évidemment la culture. La politique est venue progressivement à lui. Tout d’abord, il invite François Mitterrand en 1974 à venir assister à son festival de théâtre à Nancy, puis se laisse convaincre par un ami de s’inscrire sur une liste pour les élections municipales de 1977 à Paris dans le 3ème  arrondissement, dont la tête de liste Georges Dayan est un ami intime de François Mitterrand. Comme Jack Lang est élu conseiller municipal, il trouve normal d’adhérer au Parti socialiste. De fil en aiguille, après la défaite aux Législatives de 1978, François Mitterrand, qui est accusé d’être un homme du passé, décide de s’entourer de personnes plus jeunes et innovantes. Commence alors la longue et fructueuse collaboration entre le futur Président de la République et Jack Lang.

 

Aux côtés de François Mitterrand

Cela démarre par la campagne pour les premières élections européennes en 1979 dont Jack Lang a la charge, et qui se finit devant 150 000 personnes au Trocadéro. François Mitterrand est vite convaincu par la capacité de son conseiller pour la culture à drainer autant de monde, autant d’artistes et d’intellectuels. A peine élu, le chef de l’Etat lui confie l’organisation de sa journée d’investiture, qui se finit avec une foule immense au Panthéon. Les rapports entre les deux hommes vont aller crescendo, François Mitterrand étant retenu et intimidant, Jack Lang plutôt timide et ayant un profond attachement au leader socialiste. Durant les deux septennats, mis à part les deux cohabitations il est le seul Ministre de la culture du Président Mitterrand, et devient une référence à ce poste en créant de très nombreux événements comme la Fête de la musique, les journées du patrimoine et en amenant la culture dans toute sa diversité à un niveau jamais atteint. Ils mènent ensemble également d’importants grands travaux qui aujourd’hui forcent l’admiration, mais qui avaient provoqué des polémiques à l’époque, comme le grand Louvre avec la construction de la pyramide, l’Opéra Bastille, la grande bibliothèque, … De cette période exceptionnelle, il conclut : « François Mitterrand m’a apporté énormément, son intelligence politique, sa finesse, son immense culture. Si ce que nous avons entrepris a été une réussite, c’est en raison de ce duo original que nous formions, tout en étant très différents nous avions la même passion et la même détermination. »

Publié dans Portraits

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