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L’élégance du conte, la précision du film noir et la poésie singulière d'Alain Guiraudie

Publié le par Michel Monsay

L’élégance du conte, la précision du film noir et la poésie singulière d'Alain Guiraudie

Les films d’Alain Guiraudie ont l’élégance, depuis ses débuts, d’être des échappées. Des films qui regardent de travers le monde, les gens, les sentiments. Miséricorde ne déroge pas à la règle mais il prend le cinéma de Guiraudie lui-même de travers. Là où d’ordinaire, le cinéaste filme la campagne verdoyante, le soleil qui écrase les corps, les couleurs qui éclatent, ce nouvel opus est un film d’automne, un vrai. Magnifiée par le travail de l'excellente chef opératrice Claire Mathon, cette nature sur le point de mourir devient le décor à la fois oppressant et doux d’un film comme un conte. En quelques plans, avec un vrai sens du détail, Alain Guiraudie nous donne à voir un monde qui a vieilli, un endroit qui a été mais n’est plus. Il filme aussi une menace invisible, le sentiment que quelque chose se dérègle et va mal finir. Quelque chose de la mort et du désir circule entre tous les personnages et fait monter la tension. Surtout, Alain Guiraudie nous déroute car il ne nous donne pas exactement ce que l’on attend de son cinéma. Il joue avec nous, à la manière d’un Hitchcock, créant un suspense qui tient autant du récit que de ce que nous imaginons des routes qu’il pourrait prendre, et s'ingénie à cultiver l'ambiguïté tant sur le fond que sur la forme. Il nous convie à une sorte de conte forestier irrigué par le désir, la jalousie et les secrets. Un écosystème où le bizarre fait naître le rire et la gravité, parfois en même temps. Un film qui déploie sa richesse entre deux chasses aux champignons, et interroge quelques règles morales établies, notamment sur la question de la culpabilité, du remords, du pardon mais aussi sur jusqu'où peut aller l'amour du prochain. Cinéaste inclassable, Alain Guiraudie (L'inconnu du lac, Rester vertical, Viens je t'emmène) plébiscite les fictions libertaires où il met en scène des protagonistes aux prises avec le tumulte de leurs désirs et de leurs pulsions inavouables. Contrairement à L’Inconnu du lac, qui jouait d’une sexualité explicite, Miséricorde reste au seuil d’une libido qui semble surtout appartenir au passé, endormie sous les habitudes rurales et les structures familiales, mais susceptible quand même de remonter à la surface. Alain Guiraudie opère ici une greffe inouïe entre la tragédie et le burlesque, dans une mise en scène impeccable qui alterne entre la majesté imperturbable des plans larges et la troublante proximité des visages, le tout remarquablement interprété par l’ensemble des comédiens.

Publié dans Films

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Passionnante traversée du surréalisme dans les arts

Publié le par Michel Monsay

Passionnante traversée du surréalisme dans les arts

Avec près de 500 œuvres et documents, l'exposition Surréalisme au Centre Pompidou retrace plus de quarante années d’une exceptionnelle effervescence créative autour du surréalisme dans la peinture, la sculpture, la photographie mais aussi dans la littérature et le cinéma. Dans sa scénographie, l’exposition s’est inspirée des expositions historiques du surréalisme et de leur volonté d’émerveiller, faisant même appel à un magicien pour créer dès l’entrée une atmosphère onirique. De plus, Surréalisme montre enfin ces artistes femmes comme Léonora Carrington, Dorothea Tanning, Dora Maar et Léonor Fini qui, elles aussi, ont pris part au mouvement en créant de très belles œuvres. Il y a vingt-deux ans, lors du dernier accrochage consacré au mouvement, seules trois œuvres signées par des femmes y étaient alors exposées. Dès l'entrée de l'exposition, le Centre Pompidou nous plonge dans cet univers fantasque, bizarre, coloré, parfois drôle, parfois dérangeant, parfois poétique. Le long d’un parcours en spirale, treize chapitres se suivent, chacun défini par un thème (forêts, nuit…), un nom (Alice, Mélusine…) ou une notion (rêve, érotisme, cosmos…). Toute la diversité de l'art surréaliste est représentée pour les 100 ans du mouvement à travers ses plus grands artistes : Salvador Dali, Max Ernst, René Magritte, Giorgio de Chirico, Victor Brauner,... et les femmes citées précédemment. Ils font, de façons très diverses et changeantes, surgir des formes, des figures et des espaces tels qu’on n’en avait jamais vu auparavant, et continuent à dérouter et à magnétiser le regard des décennies plus tard. Ces artistes ont détourné les procédés habituels de la représentation picturale pour donner à voir ce qui n’existe que dans les songes, ils ont ouvert des territoires immenses et inventé des mondes, qu’ils ont arpentés jusqu’à leur mort. Pour se délecter de cette impressionnante exposition, il faut d’abord franchir les portes de l’Enfer, du nom du cabaret situé boulevard de Clichy, à Paris, où les surréalistes aimaient parfois se retrouver. Il avait pour façade la gigantesque gueule ouverte d’un monstre aux dents acérées, reproduite pour l’occasion. On ressort de Surréalisme avec le tournis tant la révolution orchestrée par les surréalistes a touché toutes les disciplines, générant à travers le monde une extraordinaire diversité de styles et de techniques. On réalise combien ce mouvement ouvert aux femmes, antitotalitaire et anticolonialiste, qui mettait sur un pied d’égalité cultures occidentales et non européennes, résonne encore avec notre époque.

Surréalisme est à voir au Centre Pompidou jusqu'au 13 janvier.

Passionnante traversée du surréalisme dans les arts
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Passionnante traversée du surréalisme dans les arts

Publié dans Expos

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Robinsonnade émouvante d'une beauté limpide

Publié le par Michel Monsay

Robinsonnade émouvante d'une beauté limpide

Récit initiatique, Le Royaume de Kensuké est aussi une méditation sur la famille, qui prend ici toutes sortes de formes, et sur la relation à l'autre, quel qu'il soit. Hymne à la paix, le récit invite à réfléchir à la place de l'humain sur une terre que les hommes partagent si mal. Une bonne partie du film se passe de mots, les images et la mise en scène prenant pleinement le relais avec notamment des décors somptueux. À noter aussi la belle idée de passer par le dessin à l'estampe, que pratique Kensuké, pour raconter l'évolution de la relation entre le jeune personnage principal et le vieil homme, mais aussi et surtout pour figurer la tragédie de Nagasaki dans une scène bouleversante. Un des charmes de ce très beau film d’animation, adapté d’un livre de Michael Morpurgo (son Cheval de guerre l’a été par Spielberg) : rendre le dessin plus éclatant au fur et à mesure que le héros s’intègre dans son nouvel environnement, s’accorde avec les êtres qui l’entourent, abandonne sa peau de garçon impatient pour muer en jeune humain empathique, équilibré et joyeux. Fable écologiste pleine de poésie et film d'aventures aux rebondissements multiples, Le Royaume de Kensuké est une merveilleuse ode aux liens humains et à la beauté de la planète. Cet îlot de poésie est limpide, inspiré et  plein de tableaux naturels sidérants qui s'intègrent admirablement dans l’animation 2D sans fioritures au rendu souvent impressionnant.

Le royaume de Kensuké est à voir ici pour 4,99 € en location ou sur toute plateforme de VOD.

Publié dans replay

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Beau portrait de l'ovni du cinéma français

Publié le par Michel Monsay

Beau portrait de l'ovni du cinéma français
Beau portrait de l'ovni du cinéma français

Extraits judicieusement choisis et témoignages pertinents : ce documentaire très complet retrace brillamment la carrière du gamin des Quatre Cents Coups.  Jean-Pierre Léaud existe-il vraiment hors de l’écran ? Cette question judicieuse posée au début du documentaire résume parfaitement le phénomène. Le désintéressement en bandoulière, Jean-Pierre Léaud s’est tellement donné au cinéma qu’il en est devenu lui-même un peu irréel. Le vrai, le faux, le jeu, le sérieux, tout cela fusionne en créant quelque chose d’unique dès qu’il apparaît à l’image. Avec cette sensation qu’il semble jouer sa vie et sa mort à chaque film. Rien ne manque d’essentiel dans ce film qui retrace le parcours de l’acteur, depuis la légendaire séquence de casting des Quatre Cents Coups où le gamin défend son côté gouailleur devant un Truffaut qu’on devine totalement conquis, jusqu’à Le lion est mort ce soir (2017), du réalisateur japonais Nobuhiro Suwa. De temps à autre, Michel Fau, filmé dans un studio, lit des commentaires de Jean-Pierre Léaud lui-même sur ses expériences, et quelques comédiens en herbe rejouent du Léaud. Le contenu éclairé des témoignages (Françoise Lebrun, Noémie Lvovsky, Tsaï Ming-liang, Olivier Assayas…) et des extraits choisis (films de Truffaut, Godard, Eustache, Balasko…) fortifient ce beau documentaire. Quelques documents rares, photos et extraits d’interviews, montrent bien cette fièvre unique teintée d’anxiété, caractéristique de ce comédien hors norme, qui a inventé une nouvelle manière d'être devant une caméra, où tout est vrai et tout est fiction.

Le cinéma de Jean-Pierre Léaud est à voir ci-dessous ou sur le replay d'Arte.

Publié dans replay

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Magnifique chanson pour célébrer le grand Charles

Publié le par Michel Monsay

Magnifique chanson pour célébrer le grand Charles

Il aurait eu 100 ans cette année mais il nous a quitté il y a six ans, et comme le biopic qui vient de sortir n'est pas à la hauteur de ce grand Monsieur de la chanson française, réécoutons cette merveilleuse chanson sortie ne 1972 : Comme ils disent. Écrire une chanson contre l’homophobie dans la France pompidolienne où les gays étaient surtout victimes de moqueries, il fallait oser. Aznavour l’a fait, bravant les conseils de son entourage, qui craignait qu’il écorne son image. Inspiré de plusieurs de ses amis, le portrait qu’il brosse de cet artiste travesti qui « habite seul avec maman » transpire la mélancolie, que le chanteur accentue en faisant, comme souvent, traîner sa voix de crooner. L’émotion qu’il dégage est forte. Et le message sur le droit à la différence, bien reçu par le public de l’époque, doit, hélas, encore être martelé cinquante ans après.

Publié dans Chroniques

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Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil

Publié le par Michel Monsay

Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil

On la connaît peu en France mais, dans les années 1920, elle a inventé un style exceptionnel inspiré notamment du cubisme. L’œuvre de Tarsila do Amaral est un jalon de l'art moderne qui mérite d'être reconsidéré. La très belle exposition du musée du Luxembourg, à Paris, lui rend justice. Qu'elle que fût la force de son talent, l'artiste présentait trois handicaps pour son époque : elle était femme, brésilienne et communiste. Pourtant, Tarsila do Amaral (1886-1973), élève, entre autres à Paris, de Fernand Léger, a inventé dans les années 1920, un vocabulaire pictural absolument unique, tenant à la fois du cubisme, du surréalisme, de Georgia O'Keeffe et des dessins d'animation contemporains. Mais contrairement à une autre Latino-américaine au profil similaire, Frida Kahlo, le fait qu'elle ne développe pas son propre culte de la personnalité, la cantonnera, en termes de célébrité, au Brésil. En 2018, une rétrospective au MoMA de New York lui a donné un premier écho international. Parce qu'elle est quasi complète, l'exposition du musée du Luxembourg qui voyagera ensuite au musée Guggenheim de Bilbao lui redonnera certainement la place qu'elle mérite dans la chronologie moderne. Elle a appris son art dans notre capitale pendant l’entre-deux-guerres, avant d’aller le confronter aux influences tropicales de son pays. Avec sa peau pâle, ses cheveux noir de jais séparés par une petite raie et ses lèvres rouge carmin, l'autoportrait de la Figure en bleu peint en 1923 peut suggérer bien des influences. Il y a du Cézanne, ou encore du Matisse, avec son fond bleu uni et ses quelques oranges, qui forment un aplat décoratif comme chez le maître. De multiples allers-retours entre São Paulo et Paris, de 1920 à 1932, permettront peu à peu à la Brésilienne de humer puis de partager, au sein de la Ville lumière, les mille feux d’une avant-garde artistique, qu’il s’agisse de peinture avec Fernand Léger, de musique, elle y rencontre le compositeur Heitor Villa-Lobos ou de littérature, sa durable amitié avec l’écrivain Blaise Cendrars. Une vie libre et sacrément osée qui la conduira, de retour dans son pays, à devenir la figure centrale du modernisme brésilien et l’inventrice d’une peinture primitive inspiré de l’imaginaire indigéniste pour dévorer la culture coloniale occidentale qu’elle ne connaissait que trop bien. Riche de cent cinquante tableaux, études et dessins, l’exposition brosse le portrait en creux d’un maître de l’art moderne au féminin.

Tarsila Do Amaral, peindre le Brésil moderne est à voir au musée du Luxembourg jusqu'au 2 février.

Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
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Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
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Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
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Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
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Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
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Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil
Très belle découverte avec Tarsila Do Amaral, figure majeure de l'art moderne au Brésil

Publié dans Expos

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Miguel Bonnefoy, Grand Prix du roman de l'Académie française

Publié le par Michel Monsay

Cliquez sur les photos pour les voir en grand et vous pouvez ensuite les faire défiler.

Miguel Bonnefoy, Grand Prix du roman de l'Académie française
Miguel Bonnefoy, Grand Prix du roman de l'Académie française
Miguel Bonnefoy, Grand Prix du roman de l'Académie française
Miguel Bonnefoy, Grand Prix du roman de l'Académie française
Miguel Bonnefoy, Grand Prix du roman de l'Académie française
Miguel Bonnefoy, Grand Prix du roman de l'Académie française
Miguel Bonnefoy, Grand Prix du roman de l'Académie française

Publié dans Photos

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La conquête de la liberté par une jeune bourgeoise parisienne

Publié le par Michel Monsay

La conquête de la liberté par une jeune bourgeoise parisienne

Ce très beau livre autobiographique est paru en 2008, alors que Benoîte Groult a 88 ans. Elle est  alors convaincue que toutes les femmes sont des féministes qui s'ignorent. Elle-même a longtemps ignoré qu'elle faisait partie de ces combattantes, souvent caricaturées. Il faut dire que rien ne l'y prédestinait. Vivant dans un milieu protégé de la bourgeoisie parisienne, entre un père styliste de meubles et une mère dessinatrice de mode, élevée par une nanny irlandaise jusqu'à l'âge de 10 ans, elle n'a même pas vu passer la seconde guerre mondiale. La jeune fille de bonne famille va se dévergonder un peu, à la Libération, au contact de militaires américains. Mais l'heure de sa véritable évasion n'a pas sonné : "Il allait me falloir encore vingt ans et trois mariages pour me rendre compte que je jouais avec des dés pipés." Elle raconte sans détours ses avortements clandestins avant le vote de la loi Veil, le drame de son premier mariage avec un jeune homme emporté par la maladie, l'échec de son deuxième mariage avec le journaliste Georges de Caunes, et enfin la réussite du troisième, avec Paul Guimard, l'auteur entre autre du roman Les choses de la vie, adapté au cinéma par Claude Sautet. Ils avaient conclu un pacte à la Sartre-Beauvoir, laissant à chacun sa liberté. Pas toujours facile, et même très dur par moments, reconnaît-elle, mais le couple a tenu... cinquante-quatre ans, jusqu'au décès du romancier en 2004. Ce sont ses livres qui ont permis à Benoîte Groult de se réconcilier avec elle-même. Elle a d'abord écrit à quatre mains avec sa sœur Flora, avant de réussir plusieurs best-sellers, comme Ainsi soit-elle en 1975, dont elle a découvert en cours de rédaction que c'était un manifeste féministe. D'une belle plume alerte et mordante, Benoîte Groult nous raconte sa deuxième naissance, à mi-vie. "Chaque femme devrait se mettre au monde elle-même", affirme cette évadée. Avec le recul, elle a l'impression d'avoir vécu une interminable course d'obstacles. Un combat sans fin, car "les barreaux des prisons et des clôtures ont une fâcheuse tendance à repousser, comme les bambous". Cette belle et énergique autobiographie révèle aussi à quel degré les femmes de sa génération avaient intériorisé ce qu’elle appelle "une des fatalités de la condition féminine, la norme en quelque sorte". Irriguée de part et d’autre par le féminisme, Mon évasion peut être lue comme une réflexion tantôt critique, tantôt amusée, mais toujours d’une grande acuité sur les modèles sociaux qui ont régi la vie des femmes en France au cours du XXe siècle.

Publié dans Livres

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Formidable Alexis Lebrun, double champion d'Europe

Publié le par Michel Monsay

Formidable Alexis Lebrun, double champion d'Europe
Formidable Alexis Lebrun, double champion d'Europe

Décidément, rien ne pouvait arrêter Alexis Lebrun, ce dimanche. Impressionnant en finale du double plus tôt dans l'après-midi, où il a remporté avec son frère Félix son premier titre européen, le joueur de 21 ans a aussi brillé en simple, réussissant un doublé historique. Face à l'Allemand Benedikt Duda, Alexis Lebrun a de nouveau été injouable. Il s'est imposé en quatre sets secs (11-5, 11-8, 11-6, 11-2). Agressif, solide sur son coup droit, en réussite quand il a voulu varier, l'aîné a laissé Duda sans solution. Exsangue, même, dans le dernier set. Il a au passage offert une jolie vengeance à son frère, éliminé samedi en quarts par son adversaire du jour. Absolument intouchable durant tout le tournoi, Alexis avait même battu le vice-champion olympique suédois Truls Moregard en demi-finale. Il devient le troisième Français à monter sur la plus haute marche européenne après Emmanuel Lebesson en 2016 et Jacques Secrétin en 1976.

Regardez le niveau d'Alexis Lebrun ci-dessous :

Publié dans Chroniques

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Un huis clos décapant sur la dérive d'un couple et l'aliénation à la télévision

Publié le par Michel Monsay

Un huis clos décapant sur la dérive d'un couple et l'aliénation à la télévision

Comédie sombre et cinglante mise en scène par Jean-Michel Ribes, Projection privée raconte la déliquescence d’un couple qui ne partage plus rien, et la place immense que prend la télévision dans ce ménage à la dérive. Gilles Gaston-Dreyfus, Clotilde Mollet et Joséphine de Meaux s’emparent parfaitement de leurs personnages et donnent vie à l’extravagance du texte de Rémi De Vos : le spectateur rit devant cet enchaînement de situations et de dialogues absurdes et observe les trois protagonistes perdre pied avec le réel. Ces derniers vont jusqu’à se fondre dans le feuilleton américain bas de gamme "Puissance, gloire et luxure" pour en incarner les héros. Un moment aussi désopilant que révélateur de la dimension aliénante du virtuel. Le texte est féroce de drôlerie, dénonçant aussi bien notre infantilisante société médiatique qu'un enfer conjugal macho, montrant à quel point les dévoreurs de séries que nous sommes devenus confondent peu à peu fiction et réalité. Le dramaturge Rémi de Vos, auteur d'une vingtaine de pièces, conjugue à merveille absurde noir et cocasserie surréaliste. Il a trouvé en Jean-Michel Ribes le compère facétieux et délirant qu'il lui fallait, également grand directeur d'acteurs. Une mention particulière pour Clotilde Mollet irrésistible de drôlerie, qui est exceptionnelle en femme délaissée accro à son feuilleton, qui sombre dans la folie.

Projection privée est à voir au Théâtre du Petit Saint-Martin jusqu'au 28 décembre.

Un huis clos décapant sur la dérive d'un couple et l'aliénation à la télévision
Un huis clos décapant sur la dérive d'un couple et l'aliénation à la télévision

Publié dans Théâtre

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