Bouleversante déclaration d’amour à une mère
Avec son sixième roman, Delphine de Vigan provoque à coup sûr l’un des événements phares de la rentrée littéraire, qui comporte cette année 654 sorties. Cette romancière de 45 ans dont l’œuvre est souvent d’inspiration autobiographique, avait fait parler d’elle en 2007 avec No et moi vendu à 400 000 exemplaires et en 2009 où elle avait failli avoir le prix Goncourt pour Les heures souterraines. Ces deux livres ayant été traduits dans 25 pays. Son superbe dernier roman raconte avec une émotion rare et une vérité sidérante, la vie de sa mère, Lucille, qui s’est suicidée en 2008 à l’âge de 61 ans. Au-delà du parcours très accidenté de cette femme d’une grande beauté qui a toujours été un peu à part, secrète, introvertie, il y a une plongée passionnante au cœur d’une fratrie de 9 enfants dont Lucille était la 3ème, avec un père et une mère aussi différents que surprenants, chacun à sa manière. A travers une écriture sensible, précise, la romancière explore les personnages de cette famille, leurs rapports, les drames, les non-dits, les moments plus lumineux avec toujours en fil conducteur, l’évolution de Lucille. Le livre s’ouvre sur le choc que l’auteure ressent à la mort de sa mère, et les mois qui suivirent avec la question de lui consacrer un livre, qui peu à peu est apparue vitale. Ce long chemin d’écriture, douloureux, semé de doutes, de remises en question, qui nous fait pénétrer au plus près des arcanes de la création, revient régulièrement entrecouper le récit en lui apportant une étonnante profondeur. On est captivé de bout en bout et souvent très ému par l’histoire de cette femme et de sa famille, qui trouve forcément un écho à nos propres histoires, tant les mots d’une incroyable justesse et la faculté de saisir l’essentiel nous touchent au plus profond.
Rien ne s’oppose à la nuit – Un roman de Delphine de Vigan – Editions Jean-Claude Lattès – 437 pages – 19 €.