Interview réalisée dans le cadre d'un dossier sur les femmes
Première femme à avoir traversé l’Atlantique puis le Pacifique à la rame, mais aussi à avoir accompli un tour du
monde à la voile en solitaire à contrecourant, Maud Fontenoy s’est reconvertie naturellement dans la préservation de l’élément qu’elle connaît si bien. Sa fondation qu’elle a créée en 2008,
alerte, sensibilise, transmet autour de la nécessité de protéger les océans.
Quel a été votre parcours en quelques mots pour parvenir à votre activité ?
Maud Fontenoy - Ce qui m’amène aujourd’hui à essayer de sauvegarder les océans, est le fait que je les
connais bien pour avoir passé dessus plus de temps que sur terre. Je suis partie en mer avec ma famille alors que j’avais à peine une semaine. Durant mon enfance j’ai toujours habité sur un
bateau et appris à aimer les océans, que j’ai parcouru ensuite dans le cadre de mes aventures. Il m’est apparu naturel de m’engager dans la protection du grand bleu mais aussi dans l’éducation et
la sensibilisation de la jeune génération.
Avez-vous rencontré des difficultés en tant que femme ?
M.F. - Les femmes sont peu nombreuses dans le milieu maritime. Comme mes aventures étaient des premières
féminines, que ce soit à la rame dans l’Atlantique Nord puis dans le Pacifique et à la voile pour le tour du monde à contrecourant, elles m’ont permis de prouver que ce n’était pas qu’une
question de gros bras mais de volonté et de détermination. En tant que femme, on est plus regardée et attendue au tournant, parfois un peu caricaturée. Pendant mon tour du monde, comme j’étais
sponsorisée par L’Oréal, je disais que je m’épilais les jambes en mer et mettais de la crème antirides, ce qui a beaucoup fait rire les marins. Cela ne m’a pas empêché lorsque j’ai démâté de
réparer mon mât et de réussir à boucler mon tour du monde. C’est sûr que l’on ne nous attend pas là, et pour trouver des sponsors lors de ma première traversée à la rame alors qu’aucune femme ne
l’avait fait et que l’on s’attendait à voir arriver un gros gabarit, il m’a fallu redoubler d’arguments convaincants.
Que demande-t-on de plus ou de différent à une femme, dans les milieux où vous êtes ?
M.F. - On se dit qu’une femme a moins de chances de réussir ces aventures en mer vu sa morphologie, et
on va lui demander d’être rassurante quant à ses performances physiques. Au fur et à mesure, on parvient à démontrer qu’il y a aussi l’organisation et la gestion de l’aventure qui sont très
importantes. On adapte également un peu les bateaux à sa taille, même si pour mon tour du monde le mien faisait 26 mètres, 30 tonnes, avec un mât de 32 mètres de haut, et qu’il n’était pas
franchement adapté à mon gabarit.
Dans la sauvegarde de l’environnement, on rencontre autant de femmes que d’hommes, mais il y a quand même une sensibilité
très féminine pour tout ce qui touche cette cause. Les femmes, en gérant davantage les enfants, leur nourriture, leur santé, se sentent énormément concernées.
Quelles sont vos plus grandes satisfactions en tant que femme ?
M.F. - J’ai été très fière de réaliser ces 3 premières féminines, et voir par l’abondant courrier que
j’ai reçu comment toute une génération de femmes a été portée par mes aventures, qui leur ont donné beaucoup d’énergie pour croire en elles et en leurs projets. Aujourd’hui, ma satisfaction au
quotidien est d’arriver à consacrer du temps à mon petit garçon autant qu’aux autres. Je suis également heureuse de voir que le travail de ma fondation porte ses fruits, avec des enfants de plus
en plus sensibilisés par les programmes éducatifs que l’on met en place.
Comment percevez-vous le métier d‘agricultrice et son évolution ?
M.F. - A l’image de celui de marin pêcheur, c’est un métier physiquement dur où l’on s’attend à voir
plus des hommes que des femmes, un métier de l’ombre qui n’est pas assez valorisé et pourtant Dieu sait comme il est difficile. C’est un merveilleux métier que de produire quelque chose qui va
nourrir d’autres humains.
Les femmes aujourd’hui sont agricultrices au même titre que les hommes, elles gèrent les exploitations aussi bien, ont la
force physique pour le faire et sont respectées. J’espère aussi que l’agriculture saura se développer en préservant l’environnement.