Un portrait inspiré d'un peintre et collectionneur d'une grande modernité
Ardent défenseur de l’impressionnisme, Gustave Caillebotte a été éclipsé par ses renommés pairs, Manet, Monet et Renoir en tête. Il reprend vie dans un documentaire passionnant. Un siècle et demi après la révolution impressionniste, qui bouscula les tenants de l’académisme et s’attira les quolibets de la société bourgeoise, les œuvres de Manet, Monet ou Renoir sont aujourd’hui on ne peut plus consensuelles, jusqu’à orner mugs, foulards et autres objets. Comment rappeler l’audace de ces peintres dans un documentaire évoquant l’un des leurs ? En passant notamment par des choix de réalisation affirmés, en accord avec la personnalité de Gustave Caillebotte (1848-1894), dont Lise Baron signe un portrait vigoureux. Elle y retrace la trajectoire brève et intense d’un artiste doublé d’un collectionneur, qui défendit avec ardeur sa conception de la modernité. Mort à l’âge de 45 ans, il travailla d’arrache-pied à l’élaboration d’une œuvre. Artiste d’extraction bourgeoise, il contribua aussi au mouvement impressionniste en employant une part de sa fortune à acquérir des toiles de ses pairs, voire à les soutenir financièrement. Aux coulées de violons nappant les toiles impressionnistes dans maintes productions sucrées, la documentariste a préféré une musique aux accents électroniques composée par Clémence Ducreux, et dirigé la comédienne Caroline Ferrus, qui dit le commentaire, dans le sens d’une certaine rectitude. La même exigence se traduit à l’image. Donner à voir de la peinture à la télévision est compliqué, surtout quand la touche est épaisse et ne peut être appréciée à l’écran comme dans un musée. Pour y remédier, Lise Baron parsème son film de gros plans, qui rendent cette matérialité. L’œil de Caillebotte, isolé par la caméra sur son autoportrait au chapeau d’été, donne l’occasion d’évoquer par le commentaire l’idéalisme du jeune homme. Et pour montrer qu’à 24 ans, celui-ci peint frénétiquement dans la maison d’Yerres acquise par son père, une photo de la demeure peu à peu recouverte de touches de peinture empruntées à ses toiles suggère l’intensité de son activité. Les idées de prises de vues et de montage qui abondent dans ce documentaire, renvoient ainsi au bouillonnement créatif de l’impressionnisme, à contre-courant de tant de productions académiques, conçues pour être lisses, faciles à ingérer autant qu’à oublier.
Gustave Caillebotte, héros discret de l'impressionnisme est à voir ici ou sur le replay de France Tv.