Un troublant récit initiatique à l’énergie explosive
Après avoir réalisé l'excellente minisérie Oussekine et plusieurs épisodes des séries Le Bureau des légendes et Baron noir, c'est dans son village d'enfance, à Longué-Jumelles dans le Maine-et-Loire, qu'Antoine Chevrollier a choisi de camper l'intrigue de son premier film. Il ausculte la complexité d’un territoire et participe de ce cinéma français qui décale son regard vers les zones rurales, à l’instar de Vingt Dieux. La fluidité de La Pampa emporte le regard. Fluidité de la narration, qui suit un personnage vecteur, fluidité de la mise en scène, déterminée, qui décoche sa flèche avec l’énergie de la première scène, et ne la lâche plus jusqu’à la résolution du parcours. Entre les deux, les bouleversements émotionnels rythment le vécu des protagonistes et la chronique d’une amitié fusionnelle. Nourri de sensations autobiographiques, sans pour autant retracer à la lettre la jeunesse de son auteur, La Pampa baigne dans un monde où l’injonction et l’exclusion s’avèrent tragiques et marquent au fer rouge. Conditionnement et déterminisme peuvent étouffer les êtres en train de grandir, et l’unique solution à leur salut reste parfois la sortie de route. Quelle qu’elle soit. Le titre de l’œuvre vient du nom du véritable terrain de motocross qu’observait le jeune Antoine Chevrollier, retourné filmer dans son village angevin d’origine. Précis dans sa direction d’acteurs, le réalisateur a rappelé l’interprète de sa mini-série Oussekine, Sayyid El Alami, qui était déjà très bien dans le rôle de Malik Oussekine, et qui ici confirme une présence et un talent évident en incarnant le personnage central, observateur et déterminé, capable de passer du doute à la colère, de la fébrilité à la résilience. Citons également, Damien Bonnard, épatant d’aveuglement bouillonnant, Florence Janas qui confère une subtilité touchante à son personnage, et Artus, le réalisateur d’Un p’tit truc en plus, inattendu à tous égards. La Pampa envahit l’écran par son humanité, à hauteur d’adolescence, par sa puissance émotionnelle, et par sa capacité à embrasser la vigueur malgré la douleur.