Un documentaire passionnant qui est un régal pour les yeux

Publié le par Michel Monsay

Un documentaire passionnant qui est un régal pour les yeux

A la demande du documentariste américain de légende, Frederick Wiseman, la famille Troisgros père et fils a accepté d'ouvrir en grand ses cuisines et les coulisses de l'un des meilleurs restaurants du monde, le Bois sans feuilles, dans la Loire. Dans ce film, il a su saisir l'essence, la philosophie et la fluidité inouïe de cette maison d'exception. Les gestes. Mille fois refaits. Parfaits. Un vrai ballet. Nous sommes en cuisine, un jour de travail ordinaire au Bois sans feuilles, le restaurant triplement étoilé de la vénérable maison Troisgros à Ouches, près de Roanne (Loire). Chacun est à son poste et à sa tâche, mais le calme règne, tout juste perçoit-on les cuillères tinter dans les casseroles et le grésillement des aliments poêlés. Ce climat presque feutré peut surprendre pour qui se figure les cuisines comme un lieu trépidant et bruyant où sont aboyés les ordres. Rien de tout cela chez les Troisgros, cuisiniers de pères en fils depuis quatre générations. Comme à son habitude, Frédérick Wiseman, 93 ans, prend son temps. Les près de quatre heures que dure son film, on ne les sent pas passer. Il faut bien ça pour se retrouver en immersion, pour voir et comprendre ce qui se joue en coulisse, la somme de travail, d'imagination, de rigueur et de réactivité que réclame la tenue de ce lieu de très haute gastronomie. Si Frederick Wiseman est connu pour aborder des thèmes sociaux (prisons, hôpitaux, tribunaux, aide sociale, etc.), il s’est aussi penché sur des sujets moins graves, et notamment en France, où il a exploré successivement les coulisses de la Comédie française (1996), du Ballet de l’Opéra de Paris (2009) et du Crazy Horse (2011). Récompensé d’un Oscar d’honneur (2016) et d’un Lion d’or (2014) pour l’ensemble de sa longue et fructueuse carrière (une cinquantaine de films à son actif), le réalisateur est réputé pour son exigence fondée sur quelques principes immuables : ses documentaires ne comportent ni commentaire, ni voix off explicative, et sont exempts de musique additionnelle. Se fondre dans le décor, faire oublier la caméra, filmer en longueur, puis tout reconstruire patiemment au montage, qui tient lieu chez lui de commentaire, voilà tout l’art incomparable de Wiseman. Menus-Plaisirs s’ouvre dès potron-minet sur le marché en plein air, où César et Léo Troisgros viennent sélectionner les plus beaux légumes avant de retrouver leur père Michel pour une discussion sur de futurs plats. Le réalisateur fait ensuite la navette entre leur restaurant triplement étoilé du Bois sans feuilles et celui, plus accessible (financièrement parlant), de la Colline du colombier, en passant par les visites avec les chefs chez des fournisseurs locaux passionnés : éleveurs bovin ou caprin, fromager affineur, maraîcher et même apiculteur, personne n’est oublié lors de cette balade volontiers bucolique dans la campagne ligérienne. De ce documentaire captivant on ressort avec la sensation d'avoir cheminé intimement aux côtés de ces artistes des fourneaux toujours en quête de perfection, au point de les connaître. Une transparence qui ne gâche en rien la magie et le mystère de leur travail.

Menus-Plaisirs-Les Troisgros est à voir ici pour 2,99 € en location.

Publié dans replay

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