Romantique et flamboyant
Le Comte de Monte-Cristo est à la fois un roman d’aventures, un roman d’amour, une tragédie, un thriller, une comédie humaine et politique, et l’interaction de ces genres dégage un souffle tour à tour romantique, drôle, ironique ou effrayant. Moins frénétique et plus éloigné de la grande histoire que Les Trois Mousquetaires, ce Comte de Monte-Cristo s’accroche au drame personnel vécu par Edmond Dantès, incarné par un Pierre Niney étonnant de noirceur, dans le regard et la gestuelle, dont le personnage dans la deuxième partie de l'histoire ne vit que par la haine. Autour de Pierre Niney, dans un rôle à la mesure de ce qu’il promettait, Bastien Bouillon, Anaïs Demoustier, Laurent Lafitte ou Patrick Mille sont très justes et Anamaria Vartolomei totalement magnétique. Après avoir redonné vie, l’année dernière, aux Trois Mousquetaires, les scénaristes Matthieu Delaporte et Alexandre de La Patellière, ont récidivé avec cette nouvelle adaptation du Comte de Monte-Cristo, mais cette fois-ci ils l'ont eux-mêmes réalisée. Pour mémoire, on leur doit Le prénom, qui avait marqué les esprits il y a 12 ans au cinéma et auparavant au théâtre. Contrairement à la réalisation survitaminée de Martin Bourboulon pour Les trois mousquetaires, au dynamisme narratif, et à l’interprétation pétulante, véritable blockbuster à la française un tant soit peu éloigné de Dumas, celle de Matthieu Delaporte et d’Alexandre de La Patellière est non seulement beaucoup plus fidèle au texte d’origine, mais se présente aussi comme relevant, avec une certaine nostalgie, de la tradition du romanesque cinématographique. Un film donc fortement imprégné de certains aspects qui faisaient le charme des productions d’antan, mais qui présente aussi tous les avantages d’une réalisation moderne, une caméra beaucoup plus mobile qu’autrefois, une photographie à la palette numérique d’une précision inouïe, un rendu des décors extérieurs magistralement mis en valeur par le recours aux drones, une création très crédible des costumes d’époque, un montage percutant, des sons et bruitages d’un réalisme très travaillé. De prime abord, on se dit : rien de nouveau sous le soleil. Revenir sur un tel texte sent le réchauffé et la crise des scénarios. Or c'est tout le contraire qui se produit avec ce film épique, valorisant la dimension psychologique des personnages et d'Edmond Dantès au premier chef, en nous faisant redécouvrir ce grand classique avec le plaisir et l'ivresse de la première fois.