Hallucinante escroquerie

Publié le par Michel Monsay

Hallucinante escroquerie

Parmi les superlatifs qui fleurissent pour qualifier l’arnaque à la taxe carbone, on ne peut s’empêcher de penser que le titre d’« escroquerie du siècle » avait tout pour stimuler l’imaginaire de Xavier Giannoli, dont l’œuvre est peuplée de troublants affabulateurs, et qui aime saisir une époque dans ses moments de bascule. Après son éblouissante adaptation d’Illusions perdues, le cinéaste a choisi, pour sa première série, de raconter, en s’inspirant librement de l’enquête du journaliste de Mediapart Fabrice Arfi, comment de petits escrocs de Belleville ont su profiter, à la fin des années 2000, des failles d’un système financier, censé lutter contre la pollution, pour détourner l’argent public. Le résultat est un déploiement captivant en douze épisodes : à la fois enquête sous tension, réflexion indignée sur un ultralibéralisme sans scrupules, et peinture fervente des passions humaines. En mettant en scène cette fraude d’une ampleur inégalée, le réalisateur s’attelle à un défi : illustrer un marché dématérialisé. Heureusement, la galerie de personnages impliqués se prête à imager l’affaire, ces escrocs sont l’expression ultime de tout ce qu’il y a de dégénéré dans les sociétés modernes, cette obsession du consumérisme, du luxe comme la preuve d’une réussite. C’est à la fois totalement obscène et enfantin, tout en étant un matériau extraordinaire pour un cinéaste. La série, aussi froide et clinique lorsqu’elle suit les enquêteurs dans leur travail de fourmi que colorée quand elle emmène le spectateur dans l’entourage des escrocs, repose autant sur un scénario très détaillé que sur le jeu de ses acteurs. À la sobriété de Vincent Lindon, répondent la folie furieuse de Ramzy ou la théâtralité de Niels Schneider, tous trois excellents, sans oublier les rôles secondaires très bien incarnés par André Marcon, Judith Chemla, Yvan Attal,... Xavier Giannoli met parfaitement en scène cette vaste comédie humaine, tournée dans plusieurs pays, avec l'ampleur, la démesure dont on le sait capable, portée par une bande originale addictive d'une lumineuse noirceur du compositeur de musique électronique Rone.

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Publié dans replay

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