Un film puissant et désespéré sur la jeunesse tunisienne

Publié le par Michel Monsay

Un film puissant et désespéré sur la jeunesse tunisienne

Dix ans après la révolution tunisienne du Printemps arabe, l'américain Lofty Nathan, dont c'est le premier long-métrage de fiction, repart à Sidi Bouzid dans le Sud du pays, où tout a commencé. Il y dessine le portrait, hélas familier, d’un jeune homme qui peine à s’en sortir dans un pays rongé par l’injustice et la corruption, où l’histoire tragique se répète. Dans nos cinémas occidentaux, on en a vu, des chroniques de la misère ordinaire. Mais si Lofty Nathan décrit avec réalisme ce drame social, sans jamais en faire un simple prétexte de cinéma, il emprunte aussi dans sa mise en scène les codes du thriller moderne et vitaminé. En cela, le réalisateur nous rappelle qu’il a beau être né en Égypte, pays voisin qui a aussi connu un Printemps arabe aux résultats décevants, il est avant tout un réalisateur de New York. Sous ses aspects de thriller stylisé, il a peut-être réussi le plus efficace des films sociaux sur la Tunisie post-révolution. Il n’y a pas réellement de bourreau, d’ennemi contre lequel se révolter pour le personnage principal, si ce n’est la société tout entière. Quelque chose de pourri. Une gangrène qui compresse et étouffe, et contre laquelle il n’y a rien à faire. C’est l’amer constat que propose Lofty Nathan, avec fatalisme et lucidité. Certes, le pouvoir en place a été remplacé. Mais la corruption et la misère règnent toujours, et sur les plages de Tunisie, nombreux sont encore les harkas qui tentent la traversée de la Méditerranée. Si ce film puissant et très sombre nous laisse en état de choc, outre le talent prometteur du réalisateur Lofty Nathan, cela tient aussi à l’interprétation foudroyante de son acteur principal français d'origine tunisienne, Adam Bessa, qui a obtenu pour sa prestation le Prix d’interprétation de la section Un Certain Regard lors du dernier Festival de Cannes.

Publié dans Films

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