Un choc esthétique et émotionnel

Publié le par Michel Monsay

Un choc esthétique et émotionnel

Inspiré du film de Robert Bresson, Au hasard Balthazar, Jerzy Skolimowksi signe à 84 ans une fresque épique où l’homme est vu à travers les yeux d’un âne. L'œuvre est d'une audace visuelle soufflante qui démarre dès le générique, et nos yeux ne quitteront plus l’écran, fascinés, hypnotisés par la beauté graphique des plans qui se succédent. Préférant laisser parler les images plutôt que les mots, il y a très peu de dialogues, Jerzy Skolimowski renoue avec l’essence du cinéma, qui n'est pas forcément de raconter une histoire, le fameux storytelling que l'on retrouve dans beaucoup de films aujourd'hui, au détriment d'une vraie créativité dans la forme. A la limite de l’expérimental, EO n’est pourtant pas déconnecté du public, qui s’identifiera à cet âne embarqué dans une aventure où s'expriment les contradictions d’une humanité en perte de sens. Au début des années 1990, Jerzy Skolimowski avait arrêté le cinéma pour se consacrer pendant dix-sept ans à la peinture. Sa maîtrise des couleurs, son art de la composition font de EO une expérience esthétique sans pareil, où farfois l'objectif s'éloigne pour capter des paysages. La plupart du temps, il nous place dans le regard de l'animal pour nous offrir un point de vue sur le monde tout à fait nouveau. Cet œil errant devient une caméra qui sonde la bêtise et la cruauté humaine. Prix du jury au Festival de Cannes, ce film, véritable ovni, nous offre une aventure sensorielle enthousiasmante, jouant avec les couleurs et les lumières, l’endroit et l’envers, les stridences et la musique, le naturalisme et les images mentales les plus folles. C'est un plaidoyer plein de bruit et de fureur en faveur de la nature et de la condition animale.

Publié dans Films

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