Portrait à la fois dur et émouvant d'une mère
Il n'a que 28 ans, et Édouard Louis est déjà une figure importante de la littérature, ses trois premiers romans ont été traduits dans une trentaine de langues et ont fait l'objet d'adaptations théâtrales, cinématographiques et bientôt en série. Pour composer ce nouveau texte, écrit à la première personne, il extrait des bribes, des éclats, des morceaux de la vie de cette femme qui est sa mère et, à la fin, ces fragments forment un tout troublant et touchant. Il retrace la descente aux enfers d’une jeune fille privée d’éducation, condamnée au mariage à 18 ans, à des maternités non choisies, à la pauvreté, à des hommes alcooliques et violents. Violence sociale, violence patriarcale qui empêchent cette femme d'être maîtresse de sa vie jusqu'à une métamorphose inattendue. Même Édouard Louis, qui ne se ménage pas dans son récit, avait honte de cette mère abîmée par la vie et au langage populaire. On peut voir cependant un parallèle entre les trajectoires de la mère et du fils, qui ont réussi à s'extraire des souffrances de leur condition de femme et d'homosexuel. En une petite centaine de pages, Édouard Louis réussit à dire violemment et lumineusement à la fois l’intime et le politique dans ce récit puissant et finalement assez tendre.