La touchante difficulté de communiquer entre un père et son fils
Pour raconter cette histoire simple qui échappe à chaque instant au misérabilisme, une histoire que Samir Guesmi définit joliment comme « une déclaration d'amour sans effusion », le comédien devenu cinéaste joue à merveille de la suggestion et de l'épure. En 1 h 20 et sans un plan de trop, sur fond de décors parisiens ordinaires remarquablement filmés, il met en scène une petite merveille de sensibilité, où les silences et les regards se substituent aux dialogues redondants et aux laborieuses explications de texte. On appréciait beaucoup l'acteur Samir Guesmi, après ce premier film bouleversant, on est désormais en droit d'attendre beaucoup du cinéaste. "Ibrahim" est aussi un film profondément social, qui donne à voir les petites gens et le Paris populaire comme rarement dans le cinéma français. Il adopte une mise en scène toute en retenue, en pudeur et en délicatesse pour raconter ces deux hommes qui ont tant de mal à dire leurs sentiments. L’un s’est trop endurci, l’autre est encore trop fragile, et cette vulnérabilité d’Ibrahim, derrière sa carapace d’ado, le nouveau venu Abdel Bendaher la fait vibrer à merveille. Touche aussi dans ce film, la volonté de montrer, sans grandiloquence, ce qui compte dans l’existence. De regarder en face le dénuement d’un quotidien matériellement difficile pour parler du soutien qui permet de tenir le coup, de l’affection qui change tout. Des choses que le cinéma ne raconte pas souvent, et rarement aussi bien.