Passionnant portrait du pionnier du jazz moderne et trompettiste de génie
S'il existe pléthore de documentaires sur le trompettiste-compositeur visionnaire et innovateur, le film du documentariste Stanley Nelson Jr. est particulièrement réussi pour évoquer celui dont le fil conducteur de son existence a toujours été sa détermination sans failles à casser les codes, à se renouveler continuellement et à vivre intensément sa vie comme il le souhaitait. Un portait sans concession de la légende du jazz disparue en septembre 1991 à l’âge de 65 ans, qui bien que devenu une icône culturelle a souffert toute sa vie du racisme. Sur le rythme d'une partition jazz, les images d'archives se succèdent, des vidéos de concerts, des séances d’enregistrement, et la voix off déclame quelques extraits de l'autobiographie de Miles Davis. Les témoignages se succèdent avec émotion, ceux des musiciens bien sûr, comme Jimmy Cobb, Ron Carter, Carlos Santana, Herbie Hancock, The Roots, Wayne Shorter, Quincy Jones, ou le pianiste René Urtreger et Juliette Gréco qui reviennent sur la relation de Miles Davis avec la France. Il y a aussi ceux des proches comme sa femme Frances Taylor ou son fils Erin qui n'éludent pas les démons de l'homme impénétrable, parfois taciturne, irascible ou violent, rongé par les persécutions et ses addictions. Le film évoque parfaitement le parcours musical de celui qui n’écoutait jamais ses anciens disques et qui a bouleversé à jamais les codes de la musique, du be-bop au cool, jusqu'au jazz-fusion. Cette quête absolue d'un nouveau son est parfaitement illustrée dans la bande originale de ce documentaire. Né à l’ère du swing, compagnon de Charlie Parker lors de la révolution bop, parrain du cool, leader de deux quintets mythiques, rénovateur de l’orchestre élargi aux côtés de Gil Evans, initiateur d'un jazz fusion plus électrique, enfin star chic du funk, Miles a beaucoup inventé, anticipé, évolué, muté. Avec lui, le jazz s’est invité sur les scènes des festivals rock et les podiums de la haute couture. Supérieurement intelligent, le trompettiste sut en outre séduire et maintenir à distance le milieu dans lequel il évoluait, un monde tenu par les Blancs où le moindre faux pas, et souvent il en fallait moins que ça, pouvait valoir à un Noir tel que lui les pires ennuis. Malgré cela, il parvint à devenir une star, une icône. La musique de Miles Davis trouble et troublera toujours par sa très pure beauté.
Miles Davis, birth of the cool est à voir ici ou sur le replay d'Arte.