Un documentaire exemplaire à la fois pédagogique et historique
On a tous en mémoire le traumatisme provoqué par l'attentat terroriste contre Charlie hebdo le 7 janvier 2015, la tristesse infinie, la colère insondable et l'incompréhension face à l'assassinat de Cabu, Wolinski, Charb, Honoré, Tignous, Bernard Maris, Elsa Cayat, Mustapha Ourrad, Franck Brinsolaro, Michel Renaud, Frédéric Boisseau. Ce documentaire forcément émouvant n'est pas militant ni provocateur, il témoigne pour l'Histoire avec mesure et intelligence à la fois sur un journal satirique presque marginal que des fanatiques ont voulu anéantir, sur la liberté d'expression dont Charlie est devenu le symbole, sur la parole très forte des survivants qui s'expriment pour la première fois, sur l'attentat en lui-même, et sur le procès en septembre 2020 des complices présumés des attentats contre Charlie, l'hyper casher et la policière de Montrouge, pour tenter de comprendre ce qui s'est passé. Hugues Nancy, à qui l'on doit déjà de nombreux documentaires de qualité qui apportent un éclairage nouveau permettant un recul sur les événements ou personnalités dont ils sont le sujet, trouve ici le ton juste pour aborder cette page si douloureuse de notre Histoire récente. Il mêle habilement des archives et des témoignages qui mettent en lumière l'irrévérence des dessinateurs envers les pouvoirs autant politiques qu'économiques et envers toutes les religions, et ce dès le premier numéro en 1970. Cette bande de copains ne supportait pas la bêtise et s'en moquait sans limites, en la dénonçant avec une liberté précieuse qui malheureusement leur a valu procès et menaces de mort de la part d'intégristes de tous bords. Le documentaire témoigne également du terrorisme qui a encore frappé au moment du procès, avec une nouvelle attaque contre les anciens locaux de Charlie, l'horrible assassinat de Samuel Paty et l'attentat à la basilique de Nice. Autre point intéressant mis en exergue dans le film est la responsabilité des uns et des autres face à l'exacerbation de la haine envers Charlie, sentiment que ses dessinateurs ne connaissaient pas, dixit Wolinski au lendemain de la publication de la caricature de Mahomet. Comme le dit le titre et le démontre une partie du film, Charlie n'est pas mort et une nouvelle génération de dessinateurs est venue se greffer à Riss, blessé lors de l'attentat et qui dirige le journal aujourd'hui, pour faire vivre ce dessin caricatural qui fait autant rire qu'il questionne la société, et maintenir la ligne éditoriale sans concessions qui rend perpétue la mémoire de tous les morts du 7 janvier 2015.
Le documentaire est à voir ici