Cuisine 3 étoiles
Diplômé de Sciences-Po Bordeaux, Pascal Canfin, après avoir été journaliste économique, député européen puis avoir fondé l’ONG Finance Watch, contrepouvoir des lobbys financiers, est depuis plus d’un an Ministre chargé du développement. A près de 39 ans, cet écologiste qui se sent bien là où il est, pousse à ce que l’économie et l’écologie soient de plus en plus imbriquées dans les décisions gouvernementales.
En quoi la politique de développement de François Hollande est-elle différente de celle de Nicolas Sarkozy ?
Pascal Canfin - Notre politique de développement doit concilier la lutte contre la pauvreté et la soutenabilité mondiale. Nous prenons les doctrines de l’agence française de développement (AFD), qui est notre principal opérateur, et nous les révisons les unes après les autres. Par exemple dans le domaine énergétique, la priorité a été donnée aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique. Par ailleurs, plus aucun investissement agricole pour le Sud ne sera financé par l’AFD s’il ne respecte pas une politique de responsabilité sociale et environnementale. Nous avons adopté un principe de zéro déforestation nette et nous ne financerons plus la recherche, l’achat, la promotion ou la multiplication de semences génétiquement modifiées. Autre différence, nous mettons beaucoup plus l’accent sur les enjeux de transparence de notre aide. Nous sommes en rupture avec la Françafique, il n’y a plus de cellule Afrique autonome à l’Elysée ni de Ministère de la coopération, mais à la place un Ministère du développement.
L’aide au développement est-elle moins prioritaire du fait de la crise ?
P.C. - Le gouvernement a fait le choix volontariste de ne pas faire supporter les effets de la crise par les plus pauvres dans le monde. Avec notre aide de 9,35 milliards d’euros, qui comporte des prêts et des dons, nous sommes présents dans plus de 100 pays. En 2013, nous avons stabilisé les crédits au développement, en y affectant 10% des revenus de la taxe française sur les transactions financières. Cela va nous permettre par exemple de financer l’accès aux soins de 2 millions d’enfants au Sahel. Nous sommes les premiers au monde à avoir mis en place cette taxe et à y consacrer une part au développement. J’insiste également beaucoup sur la transparence dans un souci d’efficacité de l’aide, de légitimité et de responsabilité vis-à-vis des contribuables français. A titre d’expérience pilote, tous les projets financés par la France pour assurer le développement du Mali seront sur un site Internet, donc consultables à la fois par les maliens et par nos concitoyens, qui pourront vérifier la mise en œuvre des projets. Si cette expérience est concluante, mon ambition est de la généraliser sur l’ensemble de notre aide.
Que fait la France pour éviter de nouvelles émeutes de la faim comme en 2008 ?
P.C. - L’action de la France contre la faim dans le monde et pour éviter des ruptures d’approvisionnement est multiple : nous sommes le premier pays au monde à avoir interdit dans notre loi bancaire, la possibilité pour les banques françaises de spéculer sur les matières premières agricoles. Nous travaillons avec la communauté économique des états de l’Afrique de l’Ouest sur la constitution de stocks de sécurité pour lisser les à-coups. L’objectif est de trouver en Afrique les modalités de production qui permettent d’augmenter les rendements de manière écologiquement soutenable, en intégrant les impacts du changement climatique, qui est la première menace sur la sécurité alimentaire. La France soutient activement l’engagement de la communauté internationale pour qu’à l’horizon 2030, plus personne ne meurt de faim.
Quel bilan tirer de l’intervention française au Mali ?
P.C. – Sur le plan militaire, nous avons réussi à restaurer l’intégrité de l’ensemble du territoire malien. Nous étions les seuls à pouvoir intervenir, nous avons pris nos responsabilités. Nous sommes intervenus à la demande des autorités maliennes, et avons eu le soutien de l’ensemble de la communauté internationale sur le plan politique, et du peuple malien. Il fallait absolument empêcher les groupes terroristes de prendre le contrôle du Mali. Depuis le début du mois de juillet, une opération de maintien de la paix sous l’égide des Nations Unies a commencé à prendre le relais de la France.
En ce qui concerne le développement, nous avons réussi à mobiliser la communauté internationale lors de la conférence des donateurs de Bruxelles qui a permis de débloquer plus de 3 milliards d’euros pour le développement du Mali et la restauration de ses services publics pendant les deux prochaines années
Quelles sont les avancées significatives à l’issue du sommet du G8 ?
P.C. - Depuis le G20 en avril dernier jusqu’au G8 en juin, l’action concertée des Etats-Unis, de la Grande Bretagne, de la France et de l’Allemagne a permis d’enregistrer des victoires très importantes dans la lutte contre l’évasion fiscale, assurant un échange d’informations fiscales et bancaires entre tous les pays du monde. Au G8 de Londres, il a été décidé de créer un registre des trusts pour savoir qui se cache derrière ces sociétés écrans, afin de ne pas limiter la portée de ces échanges d’informations. L’autre avancée significative de ces derniers mois est l’extension de la transparence dans les industries extractives, comme le pétrole ou le gaz. Nous avons voté en Europe une loi qui oblige les entreprises européennes de ces secteurs à rendre publique l’ensemble des revenus tirés de l’exploitation des ressources naturelles, pour éviter la corruption et le transfert de ces richesses vers des paradis fiscaux. Trop souvent aujourd’hui la population locale ne voit que les inconvénients de ces extractions. Les Etats-Unis font de même, le Canada vient d’annoncer qu’il travaillait à rejoindre ce cadre réglementaire, la prochaine étape est de faire en sorte que le Japon, l’Australie et la Chine se soumettent à cette obligation de transparence.
Quel rôle jouent les écologistes au sein de la majorité présidentielle et vous-même au gouvernement ?
P.C. - Nous sommes au gouvernement pour peser sur les orientations, notamment en ce qui concerne la transition énergétique, qui est un levier pour sortir de la crise, et dont les conclusions du grand débat national seront arbitrées à l’automne. Nous plaidons également pour la mise en place d’une fiscalité plus forte sur les pollutions, dès le projet de loi de finances 2014. Il s’agit non pas d’impôt supplémentaire, mais de faire en sorte que notre système fiscal taxe davantage la pollution et moins le travail, ou bien encourage certaines consommations sous forme d’aides ou de crédits d’impôt, et cela à pression fiscale constante. Les pays les plus compétitifs en Europe, comme le Danemark ou la Suède, ont intégré cette contrainte et en ont fait un facteur positif pour l’emploi et l’économie. Le potentiel de création d’emplois en France de la transition écologique est de 600 000 d’ici 2030. Nous souhaitons avec Europe Ecologie Les Verts que le gouvernement prenne davantage en compte la nouvelle donne environnementale. Notre compétitivité de demain résidera dans notre capacité à produire des biens à haute valeur ajoutée écologique, et qui seront moins chers en consommant moins d’énergie. Voilà notre chemin vers la prospérité. Nous poussons pour ne pas rater ce marché-là : A titre d’exemple, les bus ayant les meilleures normes environnementales, que les villes européennes achètent dans le cadre de marchés publics, sont des bus chinois, c’est quand même incroyable.
Sur un sujet comme l’Europe qui a divisé les écologistes, comment vous positionnez-vous ?
P.C. - La politique européenne de François Hollande commence à porter ses fruits puisque nous avons obtenu un délai de deux ans sur la réduction du déficit public à moins de 3%. Je considère que le fait d’avoir ratifié le pacte budgétaire européen (TSCG) a permis à la Banque centrale européenne de dire qu’elle interviendrait quoiqu’il arrive pour sauver l’euro, à condition que chaque pays tende vers l’équilibre budgétaire. Le TSCG était la contrepartie demandée entre autres par l’Allemagne ou les Pays Bas, aux mécanismes de transferts financiers vers les pays européens en difficulté. Nous commençons à réorienter l’Europe, même si cela reste insuffisant. Nous devons aller plus vite, je pense notamment à la taxe européenne sur les transactions financières qui n’est toujours pas en place. C’est pour cela, que sur ce sujet comme sur les autres, nous préférons être sur le terrain, à l’intérieur du gouvernement et non en spectateurs, afin de le pousser à être le plus ambitieux possible.
L’élève du Pr Apfelbaum est devenu à l’image du maître, une référence de la nutrition et un personnage très médiatique. A 54 ans, Jean-Michel Cohen continue de vulgariser son métier à la télé, dans ses livres et dans toutes sortes de médias qui le sollicitent régulièrement, continue aussi de proposer un régime équilibré à ses patients et sur Internet, enfin développe en permanence de nouveaux projets qui touchent à la santé et l’alimentation.
En attendant son nouveau livre, « 250 aliments santé et minceur » qui sortira fin août, le Dr Cohen vient d’accepter d’être Monsieur santé sur i>Télé en présentant quotidiennement une chronique diffusée plusieurs fois par jour sur la nutrition, l’actualité de la santé et du progrès médical. Depuis 2000, son activité médiatique est assez intense avec des émissions sur M6 ou D8, et des interventions régulières en tant que spécialiste autant à la télé qu’à la radio et dans la presse écrite. Ce besoin de transmettre et de vulgariser est comme une deuxième peau : « Je suis un communicant de nature, lorsque j’étais prof à l’université Xavier Bichat de Paris 7, les étudiants faisaient la queue pour venir à mon cours de nutrition et physiologie. Au début, je n’aimais pas du tout les médias, j’étais pétri d’académisme et de médecine noble. Puis je suis allé par provocation sur le plateau de « C’est mon choix » sur France 3, car je trouvais antidémocratique le mépris que certains avaient pour cette émission, et j’en suis devenu un des piliers. On m’a alors invité à e=m6 où je me suis lancé dans une diatribe virulente contre tous les escrocs de mon métier, ce qui a généré un très bon score d’audience et le début de ma collaboration avec M6. »
Un parcours médiatique efficace
Cela commence avec « J’ai décidé de maigrir » une émission qui au début fait scandale, ce qui n’est pas pour déplaire à Jean-Michel Cohen l’impertinent, mais il obtient l’autorisation de l’Ordre des médecins et fait venir les plus grandes pointures de la nutrition à l’antenne. Il enchaîne ensuite différents programmes et réussit à créer de l’intérêt pour sa discipline. Il faut bien reconnaître que l’on parle beaucoup plus de nutrition depuis la médiatisation du Dr Cohen. Son livre sorti en 2004, « Savoir manger : Le guide des aliments », en étant le premier à décrypter les étiquettes de supermarché, ce qui n’a pas manqué d’amener au nutritionniste des menaces de toutes sortes, a eu beaucoup de retentissement et a été plusieurs fois réédité avec de nouvelles mises à jour. De même, son émission avec le chef Cyril Lignac, « Vive la cantine » sur M6, a lancé un sujet de société en alertant sur l’état des cantines scolaires dès 2006, depuis on observe une prise de conscience et quelques améliorations. On a l’impression que tout ce que touche Jean-Michel Cohen se transforme en succès. Il a écrit récemment un livre aux Etats-Unis, « The parisian diet », qui non seulement a très bien marché mais notre célèbre french docteur a été invité dans les plus grands shows de la télé américaine.
Rééduquer le consommateur
Opposé au régime rapide miracle du Dr Dukan, le Dr Cohen qui avait dénoncé les dangers pour la santé d’un tel régime, a gagné en 2011 le procès en diffamation que lui avait intenté son rival. Il est vrai que le domaine de l’amaigrissement comporte de nombreuses offres au marketing efficace qui cachent les effets néfastes sur le long terme. Ce que propose Jean-Michel Cohen prend plus de temps et parait plus à l’écoute de l’individu sans négliger la part de plaisir : « Le comportement alimentaire des humains est dicté par la biologie mais aussi par le plaisir et si vous l’enlevez vous créez de la frustration. Je suis beaucoup plus dans le rééquilibrage, la rééducation alimentaire, la protection des individus que dans le résultat rapide qui conduit derrière invariablement à des échecs. Je crois avoir apporté une simplification de notre métier en démontrant aux gens qu’ils pouvaient s’approprier la nutrition. Ma plus belle satisfaction a été de voir, après la sortie de mon guide des aliments, les consommateurs retourner les produits dans les supermarchés pour voir les étiquettes. Il y a quelques combats que j’ai gagnés contre les industriels, comme la modification de l’étiquetage et la diminution de l’huile de palme que l’on trouvait partout sous forme déguisée. »
Engagement politique au sens citoyen
Avec un sens développé du civisme et de sa responsabilité de citoyen, il a été auditionné en tant qu’expert par la commission pour la prévention et la prise en charge de l’obésité créée par le Président Sarkozy en 2009. Dans cette même logique, il s’est engagé localement sans être politisé auprès du maire de Boulogne-Billancourt, Jean-Pierre Fourcade, de 1995 à 2008 en étant chargé des sports. Ensuite, il n’a pas voulu travailler avec le nouveau maire pourtant du même bord politique, considérant qu’il ne servait pas les intérêts de la ville, mais il est resté conseiller municipal indépendant et va chaque mois marquer son opposition lors du conseil. Le sport, indépendamment du fait qu’il soit associé à la santé, si le Dr Cohen s’en est occupé auprès du maire, c’est qu’il a toujours aimé cela et a été un très bon joueur de tennis, qui aujourd’hui pratique plutôt le vélo et la musculation.
La famille et le Pr Apfelbaum
Si sa femme, docteur en pharmacie et cosmétologue, et ses trois filles lui ont permis de garder les pieds sur terre, notamment ses filles qui le taquinaient en chantant « Les gens l’appellent l’idole des gros » ou en le traitant de guignol lorsqu’il faisait une émission qui ne leur plaisait pas, Jean-Michel Cohen a toujours été très attaché à la vie de famille. Celle-ci a commencé à Oran en Algérie française, et lorsque ses parents sont rapatriés en 1962, il n’a que trois ans. Les débuts sont difficiles, son père n’ayant pas de travail ni de revenus, ils vivent à quatre dans une chambre de bonne à Paris et à l’école on lui fait sentir sa différence à cause de son accent. Rapidement, lé déménagement à Clichy va arranger la situation et au cours d’une enfance assez heureuse, le jeune homme inconsciemment se montre sensible dans ses lectures aux personnages de médecins. Après le Bac, il choisit médecine avant tout pour être libre et à son compte, mais en 3ème année la rencontre à Bichat avec Marian Apfelbaum, le plus grand nutritionniste mondial de l’époque, est déterminante : « Evidemment j’admirais le professeur qui en plus était très médiatique, mais j’avais été gros durant mon enfance et ma mère qui l’était aussi, avait consulté tous les charlatans de Paris, j’avais donc un intérêt particulier pour cette discipline. » On peut dire aujourd’hui que l’élève a copié le maître.
Les bases du métier
A cette période, la discipline n’est pas du tout répandue, très peu en vivent et Jean-Michel Cohen va d’abord travailler au laboratoire de recherches de l’université Bichat puis dans l’industrie pharmaceutique sur de la nutrition parentérale. Les dix années passées à la fac restent un très grand souvenir : « C’était le début de la nutrition et tout s’est fait à cette période, depuis la fin des années 1980 il ne s’est rien produit de nouveau. C’était fabuleux, chaque jour amenait son lot des surprises, nous avons commencé à comprendre le mécanisme cellulaire de surpoids, l’impact du cholestérol et des triglycérides, et nous avons découvert le premier gène de l’obésité. »
Il s’installe ensuite à son compte en étant l’un des premiers à créer un centre médical pluridisciplinaire en région parisienne. Le régime qu’il propose à ses patients n’est pas une méthode, comme beaucoup de ses confrères, mais l’application de règles élémentaires de nutrition pour manger équilibré. L’accompagnement régulier étant un facteur primordial dans un régime, le Dr Cohen s’est depuis doté d’un site Internet pour créer de la stimulation et encourager les patients. Malgré l’apport efficace des nouvelles technologies, le moment qu’il préfère reste la première fois qu’il rencontre un patient, découvre son histoire et essaie de comprendre.
Insatiable
Le cordonnier étant le plus mal chaussé, le célèbre nutritionniste ne s’applique pas vraiment les règles qu’il dicte aux autres, et alterne périodes de régime et d’euphorie alimentaire : « Depuis que je suis un personnage public, je passe ma vie au restaurant dans des contextes conviviaux, ce qui ne me déplait pas. On ne fait maigrir que ceux qui ont besoin ou envie de maigrir. » Toujours à la recherche de nouveaux projets, il en a plusieurs qui pourraient se concrétiser prochainement : « Il est possible que je m’occupe de la restauration de la SNCF, que je lance un encas de régime avec Danone, j’ai un projet de pain avec un boulanger pour New-York, d’autres autour de la santé avec Lagardère, et je vais aussi continuer à écrire. J’ai besoin de nouveauté, d’excitation, je n’arrive pas à vivre calmement sinon au bout d’une semaine je deviens dépressif, je tourne en rond. »