Passionnant folk rock entre émotion et énergie
Hurray for the Riff Raff, le groupe mené par la chanteuse Alynda Segarra, native du Bronx d’ascendance portoricaine, se distingue par une approche autofictionnelle éloignée du passéisme et des clichés sépia du folk et du country-rock. Celle-ci offre, en prime, une description du déclin de l’empire américain, ravagé par le commerce des opioïdes et des armes à feu, l’expérience trumpiste et la menace de son retour. Hurray for the Riff Raff, désillusionné mais combatif, se tient du côté des ennemis d’« America first », nomades et sans-abri, minorités et marginaux. À dix-sept ans, elle s’est accroché sa guitare sur le dos et a sauté dans un train de marchandise. Elle s’est retrouvée à la Nouvelle-Orléans, où elle a fondé un orchestre de rue avec d’autres marginaux dans son genre, chantant, entre autres, de vieilles chansons de Woody Guthrie. Ça marchait plutôt bien pour elle, puisqu’elle dit avoir gagné correctement sa vie comme ça. Elle a pu financer ses propres enregistrements et les diffuser sous le nom, Hurray for the Riff Raff. Elle a publié son premier album professionnel en 2011, une production modeste mais qui a été remarquée. Il y a dans la voix d’Alynda Segarra, parfois, la colère et l’intensité de la jeune Patti Smith, qu’elle évoque un peu dans son personnage scénique, longs cheveux noirs coiffés d’un béret, une énergie punk, c’est certain. Mais ses orchestrations ont parfois la finesse et la sophistication rythmique de certains disques de Paul Simon, qui lui aussi s’est beaucoup inspiré des rythmes portoricains. En 2017, il y a eu l'excellent The Navigator, dont ce blog avait dit le plus grand bien. Dans son nouvel album qui porte un titre très explicite, The Past Is Still Alive, le passé est toujours vivant, Alynda Segarra évoque les souvenirs de cette vie libre et vagabonde, les odeurs, les parfums, les visages, les images qui lui restent de cette vie. L’amour, la perte, les errances vagabondes, l’homophobie… la chanteuse d’origine portoricaine est plus que jamais la voix des opprimés, à travers des chansons délicates et positives. Mais plutôt que de pleurer, avec nostalgie, un temps révolu, elle convoque ce désespoir qui servait autrefois de moteur pour, à défaut de croire en l’avenir, se battre au présent et ne rien lâcher. The Past is Still Alive séduit par sa sincérité et sa quête de beauté dans les ruines, et nous emballe tout au long des 10 chansons qui composent ce très bel album.
Ci-dessous, quatre superbes morceaux de The past is still alive :