Le courage des femmes iraniennes
Tout va si vite qu’il est impossible de savoir où en sera demain le pouvoir en Iran. pour l'instant, les autorités de Téhéran ont coupé l’accès à Instagram et WhatsApp — YouTube, Facebook, Telegram, Twitter, Tiktok sont déjà entravés, voire totalement bloqués. Signe de panique et enjeu de taille : depuis sept jours, les réseaux sociaux sont la caisse de résonance d’une vague de colère qui, loin de s’essouffler, prend de l’ampleur. La fronde a éclaté après la mort d’une inconnue devenue symbole, Mahsa Amini, 22 ans, interpellée par la police des mœurs pour avoir eu l’outrecuidance de laisser dépasser quelques cheveux de son voile islamique… Et voilà que le corps des femmes, une fois de plus au cœur de l’arène politique, objet des diktats liberticides des islamistes iraniens (comme, ailleurs, des talibans afghans), devient une arme de libération aux yeux du monde entier : on ne compte plus les photos et les vidéos d’Iraniennes arrachant leur voile, dansant autour d’un feu de joie avant de le jeter aux flammes, ou se coupant les cheveux… Agissant à visage découvert, applaudies par des hommes qui les soutiennent. Ce n’est certes pas la première fois que des manifestations éclatent en Iran, ni que des Iraniennes défient les barbus sur les réseaux. Mais, de l’avis de nombreux spécialistes, cette révolte-là revêt un enjeu particulier, parce qu’elle traverse les classes sociales, fédère donc hommes et femmes, et n’a pas pour cause, comme ce fut le cas dans le passé, la hausse des prix ou le non-respect de la démocratie… L’imposition du voile va bien au-delà, marqueur politique des mollahs autant qu’outil de contrôle social. Ce à quoi nous assistons dans ces images sur Twitter, ces bouts de tissu qu’on brûle et ces cheveux qu’on coupe, c’est à la mise en cause de tout un régime. Et d’une conception du monde qu’on aimerait ranger une fois pour toutes dans le passé. Cela dit, c'est loin d'être gagné, la répression brutale du régime est sans pitié. Les autorités, outre le blocage d'Internet, sont déjà responsable de la mort de 31 manifestants, sans parler des nombreux blessés, des innombrables arrestations et passages à tabac.