La puissance inégalée du grand écran
On n’avait pas ressenti cela depuis un moment : l’excitation éprouvée devant le spectacle d’une grande machinerie qui se met en route, le petit vertige suscité par la mise en orbite d’un blockbuster inspiré et inspirant. Le film évite le piège du simple coup de peinture censé rafraîchir une façade intacte, bien au contraire, il donne un sacré coup de vieux au "Top Gun" original, avec ses effets de style tenant du clip vidéo dont l’impact sur leur époque n’a d’égal que leur ringardise, une certaine idée de la masculinité toxique, et plus généralement une vision très macho d’une Amérique triomphante. Même si le scénario de "Top Gun : Maverick" n'est pas révolutionnaire, l'arrogance du personnage central a disparu et il y a même un peu d'autodérision et d'ironie par-ci par-là, et surtout le film transpire cette envie de ressusciter les films d’action où les effets spéciaux n'étaient pas la règle. Point d'image de synthèse ici, afin de livrer l’expérience la plus authentique possible, les acteurs, grâce à un entraînement intensif de cinq mois, se sont habitués aux principes fondamentaux du vol et de la force G, et ont tourné eux-mêmes leurs séquences dans de vrais F-14 en plein vol, pilotés par des militaires. Plus de 800 heures de rushs ont été emmagasinés afin d'offrir un résultat ébouriffant qui nous colle littéralement à notre siège. Dans la continuité de ses cascades folles sur les derniers Mission : Impossible, Tom Cruise redéfinit avec "Top Gun : Maverick" la notion de grand spectacle, portée ici par un vrai point de vue de mise en scène à l’intérieur de cockpits d’avions lancés à pleine vitesse, et non sur l’expansion toujours plus grande des effets spéciaux. Voilà un message clair adressé à Hollywood par l’une des ultimes stars d’action à l’ancienne : remballez vos fonds verts et vos doublures numériques. A bientôt 60 ans, Tom Cruise continue de repousser ses limites physiques, le temps ne semble pas avoir de prise sur lui. Que l'on aime ou pas l'acteur, force est de constater qu'il n'a pas de rival pour les films de pure action avec de vraies cascades, comme Belmondo à son époque.