Les oiseaux de passage
Toujours à l'affût de films venus du monde entier, notamment de pays n'ayant pas une grande culture cinématographique mais dont peuvent surgir à tout moment des pépites d'une beauté et d'une puissance rares, la découverte de ce film colombien en est le parfait exemple et procure des émotions inhabituelles et intenses. Pour son quatrième long-métrage, co-réalisé avec sa femme, Ciro Guerra cinéaste de 38 ans qui s'était fait remarquer fin 2015 avec "L'étreinte du serpent", confirme à la fois son talent mais aussi qu'il est devenu un réalisateur important sur le plan international. Pour preuve, il est en train de finir son premier film américain, adapté d'un roman du Prix Nobel J.M. Coetzee, avec Johnny Depp, Mark Rylance et Robert Pattinson, et on vient de lui proposer la présidence du jury de la Semaine de la critique au festival de Cannes 2019. A la fois tragédie grecque en 5 chants, film de gangster, western et récit ethnographique, "Les oiseaux de passage" nous plonge en 1968 à la naissance des cartels de la drogue et les ravages que cela va progressivement occasionner chez le peuple amérindien Wayuu, dont les croyances, les rites et la culture sont encore très présents à l'époque. Plus globalement, c'est aussi l'histoire récente de la Colombie qui va être bouleversée par ce qui s'est passée au cours des années 1970 dans cette région aride et sauvage. Tourné avec des acteurs professionnels et des personnes originaires de ce territoire qui apportent une force incomparable à la narration, ce film truffé de très beaux plans est un grand moment de cinéma qui se vit comme une passionnante aventure et nous transporte à l'autre bout du monde auprès d'une population où les femmes ont bien plus leur mot à dire que l'on ne pourrait le croire.