De l’intime à l’universel
Cette romancière et journaliste de 51 ans explore une nouvelle fois le passé de sa famille, pour nous offrir un roman bouleversant et passionnant sur son père mais aussi sur des moments douloureux de l’Histoire de notre pays. Il faut dire que la matière est considérable, sa famille a traversé tellement d’épreuves depuis l’exil d’Europe de l’Est vers Strasbourg en 1920, fuyant les mesures antisémites notamment à Sanok où le grand-père de Colombe Schneck voit ses parents lâchement assassinés dans leur magasin sous prétexte qu’ils sont juifs. La suite est tout aussi révoltante avec les différentes guerres qui vont marquer à jamais le père de la romancière, enfant caché sous l’occupation nazie, et jeune médecin de l’armée française côtoyant la torture en Algérie sans pouvoir la dénoncer. L’auteure, avec colère, gratitude, douceur et amour filial selon les chapitres qu’elle aborde dans la vie de son père, éclaire la part d’ombre de cet être lumineux et accepte enfin d’être aimée par quelqu’un d’autre que lui 25 ans après sa disparition. En préambule, elle nous parle de ce père prévenant, doux, souriant, aimant et aimé par tout le monde, qui répétait souvent qu’il ne fallait offrir que de bons souvenirs et ne pas parler de choses qui fâchaient. Afin de comprendre ce qui se cachait derrière ce refus d’amertume ou de tristesse malgré un passé traumatisant, elle décide de mener l’enquête en recueillant des témoignages, en consultant de nombreuses archives et en laissant son imagination faire le reste. Ce roman très touchant par l’honnêteté de son auteur, sa capacité à affronter la vérité sur son père mais aussi sur elle-même, prend le parti de désobéir à l’injonction paternelle en parlant de ce qui fâche avec beaucoup d’à-propos, pour tenter de se libérer de cette culpabilité familiale dont Colombe Schneck a hérité.
Les guerres de mon père - Un roman de Colombe Schneck - Editions Stock - 337 pages - 20,50 €.